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Pourquoi l'entreprise est vraiment l’incomprise des programmes économiques 2017
©Reuters

Présidentielle

Les programmes des présidentielles parlent peu de l’entreprise en tant que lieu fondamental de prise de risque et de socialisation, de création de richesses et d’emploi.

Denis Ferrand

Denis Ferrand

Docteur en économie internationale de l’Université Pierre Mendès France de Grenoble, Denis FERRAND est Directeur Général de Rexecode où il est notamment en charge de l’analyse de la conjoncture de la France et des prévisions macroéconomiques globales. Il est également vice-Président de la Société d’Economie Politique. Il est membre du Conseil National de l’Industrie et du Conseil d’Orientation pour l’Emploi au titre de personnalité qualifiée. Chroniqueur pour Les Echos, il est chargé du cours d’analyse de la conjoncture à l’Institut Gestion de Patrimoine de l’Université Paris-Dauphine et pour le Master APE de l’université Paris-Panthéon Assas.

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UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Les mesures proposées (quand il y en a) sont surtout fiscales, oubliant les raisons pour lesquelles les entreprises peinent sur la scène internationale, l’innovation, les emplois à haute valeur ajoutée ou le développement des ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire).

C’est se répéter que dire que la compétitivité vient de la rentabilité, qui permet seule l’entrée dans le cercle vertueux : rentabilité, dialogue social, investissement, formation, emploi. Mais comment faire autrement ? Avec des marges d’exploitation à 31,7% de la valeur ajoutée des entreprises (en hausse récente grâce au CICE et à la baisse des prix du pétrole) comparées aux 40,7% en zone euro, les entreprises installées se développent avec peine en France, quitte à s’étendre ailleurs.

Bien sûr, il est de bon ton de les critiquer : elles traquent les subventions, embauchent des intérimaires, se peuplent de stagiaires. C’est oublier que c’est de résistance à la pression conjoncturelle, surtout pour les plus petites, qu’il s’agit. Autre idée définitive, elles distribuent des dividendes au détriment de l’autofinancement. Tant pis si l’on oublie le calcul tiré de l’Insee selon lequel 80 % des résultats bruts vont à l’autofinancement et 20 % aux dividendes nets, des proportions très stables sur longue période. Et tout est à l’avenant : critiques et propositions inadaptées, (au mieux) par méconnaissance.

Bien sûr, mettre les entreprises au cœur d’un programme économique n’est pas tout leur permettre : c’est les mettre devant leurs responsabilités économiques et sociales. Cinq axes viennent structurer un tel programme.

Un, réduire la fiscalité de production plutôt que l’impôt sur les sociétés, dont le taux facial élevé a pour contrepartie une multiplicité d’exemptions, source d’une rare complication. Les entreprises ne sont pas hostiles à l’impôt sur leurs résultats, encore faut-il qu’il ne soit pas prélevé avant ! Elles savent bien que c’est ce résultat qui permet leur valorisation et leur croissance, interne et externe. Or, la fiscalité de production (impôts fonciers, CVAE, taxe sur les salaires, versements transports, forfait social…) rabote ce résultat. L’écart entre France et Allemagne s’élevait ainsi en 2014 à 71 milliards d’euros, soit 6,5 points de valeur ajoutée. La seule suppression (partielle) de la C3S l’a ramené à … 69. Le chemin est donc long, d’autant plus qu’il passe par la fiscalité locale…

Deux, négocier au niveau de l’entreprise sur la base d’un contrat : emploi, salaires, durée du travail, participation au résultat. Le primat de l’entreprise comme lieu de négociation et de contractualisation entre acteurs responsables implique qu’elle puisse nouer des accords qui engagent les parties prenantes, en fonction de l’environnement de l’entreprise et de sa stratégie.

Trois, mettre l’accent sur les territoires, base de la compétitivité en renforçant les liens entre formation, universités, laboratoires et capacité de recherche en entreprise, en valorisant dans les parcours académiques les projets de recherche appliquée en entreprise.

Quatre, simplifier vraiment la vie des entreprises, en adoptant une réglementation plus économe et mieux proportionnée aux objectifs de politique publique recherchés. Il faut permettre aux entreprises d’épouser la révolution numérique en cours, avec des messages et des formations adaptées. Le fameux « principe de précaution » est une incitation à agir de façon responsable : « dans le doute, mets tout en œuvre pour agir au mieux », alors qu’il est compris à l’inverse : « dans le doute, abstiens-toi ». Qu’on le dise !

Cinq, donner de l’horizon. S’il est un domaine où la France peut se prévaloir d’un record européen, c’est l’instabilité de la fiscalité des entreprises. De 2011 à 2014, le Conseil des Prélèvements Obligatoires a relevé 33 mesures fiscales par an, contre 12 pour les Britanniques, 10 pour les Italiens et 4 pour les Allemands. En changeant constamment les règles, c’est la capacité des chefs d’entreprise à faire leur calcul économique de rentabilité préalable à toute décision d’investissement qui est mise en défaut.

C’est moins d’aides ou d’exemptions dont ont besoin les entreprises que de règles stables dont la simplicité permettra une plus grande acceptabilité, avec plus d’emploi à la clef.

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