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Le vainqueur de l’élection sera M.Indécision
©Reuters

Les entrepreneurs parlent aux Français

Jamais l’indécision n’aura envahit la politique à un tel niveau.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Jamais l’indécision n’aura envahit la politique à un tel niveau. Plus fort que la grippe aviaire, plus massive que le pollen printanier, plus polluant que la fermeture des berges par Anne Hidalgo, l’indécision va décider du sort de l’élection présidentielle française. Un phénomène qui marque le dépit qui anime les électeurs de notre pays, du fait de la lamentable conduite de nos élites, associée à leur manque d’idée, de vision et de résultats probants. A 30 jours des élections, une large partie du corps électoral, corps meurtri qui en a assez d’encaisser les coups sans pouvoir les rendre, soit près de 45% des électeurs, pour certains instituts de sondage, ne savent pas pour qui voter. C’est certainement le seul sondage auquel nous donnons une quelconque crédibilité tant cette énorme incertitude devrait pousser les sondeurs à cesser leurs sondages inutiles. Quand près de la moitié des électeurs sont incertains, les sondages tentent de mesurer le vide, la « non matière », ce qui n’a d’intérêt que pour les spécialistes de la « non information ».

Aucun homme, puisque nous n’avons toujours pas de femmes en piste (quelle tristesse), n’entraîne une adhésion puissante. Ni même une adhésion naissante ou timide. Rien. Aucun programme pour entraîner les hommes et femmes de ce pays vers un débat, contrasté, qui aurait au moins le mérite d’exister. Aucune vision de ce que serait notre pays dans 5 ou 10 ans, ou à défaut de vision, une envie, un espoir, un petit quelque chose au moins qui prouverait que l’avenir fait bien partie des hypothèses envisagées par nos aspirants présidents ! Rien. A ne rien préparer on récolte le rejet, l’interrogation et l’élection ressemblera à une grille de loto que l’on remplit à l’inspiration en pensant à la date de naissance du petit dernier ou à son anniversaire de mariage. Les sondeurs décidément en panne sur leur métier traditionnel de la prévision, sont d’ailleurs passés à l’étude des émotions. Certains ont mesuré pendant le débat de TF1, la réaction émotionnelle face aux candidats. A défaut de mesurer la vision, absente de l’élection, on mesure désormais l’impact du néant politique en fonction du taux de sudation provoqué par les débats, la couleurs des yeux de certains ou les envolées vocales des autres. A quand les tissus connectés qui nous révèleront la fréquence cardiaque des candidats afin de nous faire savoir si ils mentent ou non. Nous aurions de grosses surprises ! Imaginez un peu :

Un détecteur de mensonge greffé à chaque candidat. Une transparence à laquelle mèneront peut être bientôt les technologies, puisque les premiers outils capables de mesurer le décalage entre les mots et les pensées des hommes sont désormais opérationnelles dans le domaine commercial. Imaginez Fillon prétendant que son épouse a réellement travaillé pour lui. Macron disant qu’il est de gauche. Lepen indiquant qu’elle veut quitter l’Europe qui finance son parti. Hamon disant qu’il pense pouvoir être au second tour ou Mélanchon indiquant qu’il poursuit une quête collective. Pour le coup, nous n’aurions plus d’indécis, nous n’aurions simplement plus d’électeurs. Avis aux technologues, donnez nous cette technologie et enfin nous pourrons renouveler le personnel politique français.

Plus sérieusement (et encore) le vide sidéral des propositions des candidats conduit à un vote généralisé du dépit, qui après l’abstention, devient le premier parti de France. On dépend tellement de la météo du jour, du dernier mot prononcé par l’un ou l’autre, que l’élection présidentielle devrait peut-être confier son organisation à la Française des Jeux. A défaut de gagner au loto, certains français pourraient au moins parier et s’enrichir à l’occasion de l’élection. A défaut de programmes parlant d’une France qui reprendrait le chemin de la réussite partagée, nous pourrions au moins avoir quelques gagnants qui auront tenté leur chance. L’appauvrissement politique créateur de richesse individuelle par le pari ? C’est un coup à tenter ! Le poulpe de la coupe du monde de football a certainement plus de chances de deviner le vainqueur que tous les instituts de sondage réunis.

C’est triste. Pitoyable même. Si vous écoutez comme moi les reportages et les interrogations concernant le vote du 28 avril, l’immense majorité vous parle de l’absence d’une vision d’avenir, de la place que chaque français pourrait y trouver. De l’absence d’une perspective, d’un destin qui pourrait les remobiliser et leur donner envie de voter par choix et non par dépit ou par un système proche de la loterie.

A force de nous parler d’une France d’avant, d’une façon de faire machine arrière, une politique du « c’était mieux avant », on se prépare un « ce sera pire demain » qui éloigne chacun de la politique qui a pourtant besoin comme jamais du soutien de ses citoyens. Les réformes à opérer pour se saisir de l’avenir sont telles, qu’un président sans soutien ne pourra nous offrir ce futur que nous méritons. Les décisions qui doivent être prises ne pourront l’être qu’avec un soutien sans faille d’une majorité. Il n’y aura aucune majorité, non seulement aux présidentielles (à part Marine Lepen, personne ne pourra prétendre représenter plus de 15 à 20% des électeurs), mais pire encore, aux législatives qui, faute de dégager une majorité pour aucun des candidats, nous entraînera vers la république de la « non décision ». Aucun des thèmes qui méritent leur attention n’est abordé, y compris les plus anxiogènes qui pourtant ont des solutions. Les français le savent. Le gagnant de l’indécision sera donc soit le candidat antisystème, dans un élan porté par le « faisons tout sauter, on a rien à perdre », ou celui qui « rassure par son expérience » malgré sa malhonnêteté. En clair, Lepen ou Fillon. Nous ne sommes pas prêt de perdre notre place de leader de consommateur de prozac !

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