Quel avenir pour le PS après la grosse panne Hamon du 1er débat de la présidentielle ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Quel avenir pour le PS après la grosse panne Hamon du 1er débat de la présidentielle ?
©AFP

Blues de la rose

Dans le dernier rolling Ifop pour Paris Match suite au premier débat télévisé de la présidentielle, Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon sont désormais à égalité, avec 11,5% des intentions de vote au premier tour.

Maud Guillaumin

Maud Guillaumin

Journaliste à Europe 1, BFM, ITélé, Maud Guillaumin suit pour le service politique de France-Soir la campagne présidentielle de 2007. Chroniqueuse politique sur France 5 dans l’émission Revu et Corrigé de Paul Amar, puis présentatrice du JT sur LCP, elle réalise également des documentaires : « Les Docs du Dimanche », « Les hommes de l’Élysée » sur les grands conseillers de la Ve République et « C’était la Génération Mitterrand » transposé de son livre Les Enfants de Mitterrand (Editions Denoël, janvier 2010). Elle écrit également dans la revue littéraire Schnock. Elle est l'auteur de "Le Vicomte" aux éditions du Moment (2015).

Voir la bio »

Atlantico : Dans le dernier baromètre Harris Interactive pour Atlantico, seuls 6% des Français interrogés estiment que Benoît Hamon est le candidat qui les a plus convaincus lors du 1er débat télévisé de la présidentielle, derrière les 4 autres candidats. Par ailleurs, Emmanuel Macron est celui qui a davantage convaincu les sympathisants PS, à 63% contre 56% pour Benoît Hamon selon ce même baromètre. En supposant qu'effectivement Emmanuel Macron remporte la présidentielle, quel avenir peut-on imaginer pour le PS ?

Maud GuillauminNous pourrions assister à une situation un peu similaire à celle de 2002 avec Lionel Jospin, même si Marine Le Pen n'est finalement pas au 2e tour. Il n'y a qu'à voir tous les appels du pied, dont celui de Pierre Larrouturou sur le besoin d'association entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon. Pensons également aux leçons de Julien Dray à Benoît Hamon. Cette vision du PS a peut-être été trop lente à attaquer, à se positionner dans la campagne. De fait, il sera donc impossible pour le PS de reprendre tel qu'il était : une vraie refonte aura lieu. Benoît Hamon représente les frondeurs tandis que de nombreuses personnalités du gouvernement et de l'équipe de François Hollande rejoignent Emmanuel Macron. Une scission pourrait avoir lieu au sein du PS, un peu à l'allemande, mais seul l'avenir nous le dira. En l'état, les divisions actuelles posent un véritable problème quant au choix à faire pour véritablement gagner.

Dans le cas où Emmanuel Macron continue sur sa lancée, celui-ci ne jouera pas directement un rôle dans la refonte du PS. N'oublions pas qu'il n'est "ni de droite, ni de gauche", et encore moins du PS. Même si des membres du PS sont sur le point de s'associer à sa campagne, cela ne signifie pas pour autant que dans le cas où il perdrait l'élection, il s'associerait directement avec le PS. Emmanuel Macron est un élément dissocié de ce dernier, même s'il a fait partie de l'équipe de François Hollande à l'Élysée ; il a effectivement fait partie du quinquennat Hollande mais n'a rien à voir avec Solferino.

Même si les ralliements PS à Emmanuel Macron sont de plus en plus nombreux, nous ne sommes pas encore tout à fait dans la situation où l'avenir du PS serait lié à Emmanuel Macron. Toutefois, il est certain que la question va finir par se poser : il y a une dizaine de jours déjà, des proches de Macron disaient qu'ils allaient, petit à petit, fermer les portes au PS afin de ne pas devenir une succursale de ce dernier. C'est d'ailleurs, je pense, tout le danger. Les personnes choisies seront celles qui décideront de s'associer directement au quinquennat de François Hollande, avec cette vision de la gauche libérale. L'équipe Macron insistera bien, je pense, sur le fait que ces personnalités ralliées n'affichent pas leur étiquette socialiste. Ce sont des proches de François Hollande, mais ils ne proviennent pas de Solferino géographiquement. Il y a une sorte d'opposition géographique entre l'Élysée d'un côté, et Solferino de l'autre. 

A l'inverse, quelle orientation (idéologique et structurelle) prendrait le parti en cas de défaite d'Emmanuel Macron ? Jean-Luc Mélenchon pourrait-il espérer, dans ce cas, reprendre le leadership de la gauche ? 

Il est évident que la question se posera car la gauche sera alors dans une situation terrible. Les frondeurs estiment qu'il y a véritablement une main tendue. Encore une fois, Arnaud Montebourg a demandé à Jean-Luc Mélenchon de se désister en faveur de Benoît Hamon, mais dans le sens de s'associer. Faire le lien entre Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon est une entreprise qui peut se faire, mais qui signifie en finir avec un PS dont ne veut plus Jean-Luc Mélenchon. C'est donc le PS tel qu'il existe aujourd'hui qui va devoir être complètement réinventé. 

Jean-Christophe Cambadélis, le Premier secrétaire du PS, s'est montré particulièrement dur à l'égard d'Emmanuel Macron suite au débat de ce lundi soir ("Il a surjoué une position centrale. Je suis d'accord avec l'un, je suis d'accord avec l'autre, ce qui montre que ce serait un président, s'il était président, qui serait d'accord avec tout le monde mais qui n'aurait pas pour autant de colonne vertébrale"), sans pour autant ménager Jean-Luc Mélenchon ("Mais est-ce que pour autant il est juste, est-ce que pour autant il est convaincant, est-ce que pour autant les propositions qu'il fait à la France permettent à ce pays de se redresser ?"). Toutefois, ne pourrait-on pas dire que le PS est en train d'acter le dépassement de Benoît Hamon par Jean-Luc Mélenchon, tout en s'opposant à Emmanuel Macron ? 

Il est vrai que le débat de ce lundi donne l'impression d'une véritable douche froide pour le PS. Pourtant Benoît Hamon était parvenu à réunir ses troupes dimanche dernier à Bercy, ce qui avait reboosté les rangs. Tout le monde croyait en ce débat. Hélas, cela n'aura pas duré bien longtemps. Il y a indéniablement des points communs entre Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon mais il y a également des éléments qui les dissocient ; et puis n'oublions pas que Jean-Luc Mélenchon ne voudra jamais s'associer à Benoît Hamon car il estime que sa campagne est d'ores et déjà lancée ; il ne se désistera donc pas au profit du PS. Pour lui, ce dernier est mort parce qu'il est responsable de fautes pour lesquelles, lui, a décidé de partir.

Je préciserai toutefois qu'il s'agissait là du premier débat, et qu'il convient d'attendre de voir les autres. Car souvenons-nous des débats de la primaire de la droite, mais aussi de celle de la gauche, qui nous ont parfois fait croire que tel ou tel candidat s'en sortait plutôt bien alors que les résultats nous ont, en réalité, bien trompé. Attendons de voir le positionnement véritable de Benoît Hamon à l'issue du second débat. Peut-être qu'au cours du premier, il n'a pas suffisamment marqué sa différence avec Jean-Luc Mélenchon ; peut-être aussi s'est-il trop positionné par rapport à Emmanuel Macron. Il en a donc résulté une sorte de tiédeur, d'autant plus qu'il est revenu en arrière sur certains points, notamment sur le revenu universel, sans assumer cette stature d'homme providentiel. Il est constamment dans le collectif, usant à répétition du "nous", et non pas dans la position du "je" à l'instar d'Emmanuel Macron, François Fillon ou Marine Le Pen. C'est ce qu'attendent les Français pourtant. Il a essayé de le faire un petit peu dimanche dernier à Bercy, lorsque sa compagne a été filmée en gros plan - ce qu'il déteste – afin de montrer un couple présidentiel. Il y a là un problème de positionnement, là où Jean-Luc Mélenchon, lui, assume sa volonté et son idée de VIe République. Benoît Hamon est aussi favorable à cette idée, mais l'on ne voit pas très bien vers quoi il veut tendre, lui, avec VIe République. Jean-Luc Mélenchon incarne naturellement cette position de leader. Benoît Hamon, lui, est encore jeune, et n'incarne pas encore assez ce leadership naturel.

L'opposition du PS à Emmanuel Macron, elle, est en revanche très claire. C'est la figure du traitre absolu. Le parti vit très difficilement toutes les défections survenues récemment. Dans la mesure où la plupart de ces défections concernent des personnalités de l'équipe Hollande, cela apparaît comme une manière pour l'actuel président d'accepter le candidat Macron. Pourtant, quand on regarde la tactique de Benoît Hamon, celui-ci avait essayé d'ouvrir les portes : lors de son meeting à Bercy, il a fait applaudir, au sujet du terrorisme, Jean-Yves Le Drian, Bernard Cazeneuve et François Hollande ; le seul qui n'a pas applaudi, c'est Manuel Valls. L'une des erreurs possibles réside peut-être dans le fait de ne pas faire suffisamment appel à l'équipe autour de Manuel Valls et de rester ainsi dans une vieille guerre. Pour l'instant, Manuel Valls ne s'est pas prononcé directement pour Emmanuel Macron. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !