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Les contre pouvoirs fonctionneraient-ils aussi bien en France qu’aux Etats Unis si un Donald Trump était élu chez nous ?
©REUTERS/Jacky Naegelen

What if ?

Michael Flynn, conseiller de Donald Trump sur la sécurité contraint à la démission, décision des juges de bloquer le décret du Président américain sur le muslim-ban, les Etats-unis s'imposent actuellement comme une démocratie dotée de contre-pouvoirs efficaces. En France en revanche...

Ramu De Bellescize

Ramu De Bellescize

Ramu de Bellescize est maître de conférence (HDR) à l’université de Rouen. Il a été visiting scholar à Georgetown Universitity (Washington DC) et à Wolfson College (Université de Cambridge, Royaume-Uni). Son dernier livre est intitulé « Le système budgétaire des Etats-Unis », LGDJ, 2015. 

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Atlantico : Quel différence notable y a-t-il entre les Etats Unis et la France en termes de contre-pouvoirs ? 

Ramu De Bellescize : Aux Etats-Unis, le Congrès est un contre pouvoir beaucoup plus puissant que ne l’est le Parlement en France. Le Président est en permanence obligé de chercher des compromis avec le Congrès, qu’il ait la majorité, comme aujourd’hui, ou qu’il ne l’ait pas. Dans deux ans, il y aura les élections de mi mandat avec une approbation ou une sanction de la politique du président Donald Trump. Il peut donc perdre sa majorité rapidement.  Si le Congrès le souhaite, il peut freiner ou paralyser la politique du président. C’est particulièrement vrai en matière budgétaire. Le Congrès dispose du CBO (Congressionnal Budget Office), qui est pratiquement un ministère des finances et du budget parallèle. Le CBO, chaque année, prépare un budget alternatif à celui du Président. Le budget qui sera finalement adopté penchera, selon l’état des forces politiques, dans le sens de la politique du Président ou de celle du Congrès. Si aucun accord n’est trouvé entre les deux pouvoirs, c’est le shutdown, c’est à dire la fermeture de l’administration faute de financement, jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé. C’est là un pouvoir immense dont dispose le Congrès. Il peut paralyser le Président. Il n’existe rien de tel en France.

Si un populiste prend le pouvoir en France, qu'est-ce que ça donne en termes de pouvoir et contre-pouvoirs ?

Ramu De Bellescize : D’abord, je me méfie du mot populiste. Celui que l’on désigne comme populiste, pour faire simple, c’est le candidat dont le programme ne correspond pas à celui des élites. Il n’y a rien de mal à cela. Ce qui importe, dans une démocratie, n’est pas de savoir si le candidat est populiste ou non, mais s’il est élu par la majorité du peuple français. Ou bien si l’on ne veut vraiment pas que cela se produise, il faut changer de régime politique. Dans «populisme », il y a peuple. En terme de contre-pouvoirs, je pense que le président français est plus puissant que celui des Etats-Unis. Je pense à deux décisions qui ont pu être prises sans consentement direct du peuple.  Le 23 février 1996, le président Jacques Chirac annonce la « suspension » du service militaire. Il prend cette décision seul, les mécanisme constitutionnels de contre-pouvoirs ne jouent aucun rôle. En 2008, le traité de Lisbonne est ratifié par le Parlement, alors que le peuple français a rejeté la majorité du contenu de ce traité par referendum, trois ans plus tôt. Ce phénomène de concentration des pouvoirs a encore été renforcé par le passage du septennat au quinquennat, en 2000 et par la réduction du mandat des députés à cinq ans.  Avant, avec deux mandats différents, il y avait deux légitimités différentes, deux élections réellement différentes, à des moments différents. Aujourd’hui, le mandat de l’Assemblée nationale est de la même durée que celui du Président. Les élections ont lieu à peu près au même moment.

Cela a encore accru la focalisation de la vie politique sur l’élection présidentielle et donc sur le président. 

Factuellement, dans une telle configuration,  quelles seraient les garanties apportées par la Ve république et la constitution de 1958 ?

Ramu De Bellescize : Le Conseil constitutionnel, « gardien des libertés », pourrait censurer des lois qu’il estime non conformes à la constitution. Surtout, le Président, une fois élu, pourrait ne pas avoir de majorité à l’Assemblée nationale. On se retrouverait donc dans une situation de cohabitation. Les pouvoirs du Président sont, dans cette situation, beaucoup plus limités. Le président, en tout état de cause, c’est la plus grande et surtout la plus belle garantie, est obligé de respecter le premier article de la constitution, au terme duquel la France est une démocratie.

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