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Revenu universel : miel, demi-sel ou sel ?
©Reuters

Fausse bonne idée

Quelle étrange question… Le Revenu Universel est tout miel. Avec Benoît Hamon, il permet d’ "éradiquer la grande précarité et de contribuer à définir un nouveau rapport au travail et au temps libre… On sera moins salarié qu’avant… Le revenu universel, c’est la nouvelle sécurité sociale". Depuis, la proposition est partout, des philosophes libéraux (Gaspard Koenig) à l’extrême gauche, en passant par le Républicain Frédéric Lefebvre.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Ce Revenu, c’est combien ? Autour de 600 euros. Pour qui ? Pour les 18 à 25 ans d’abord, puis pour tous, à vie. Comptons 400 milliards l’an. Financés comment ? A crédit au début, puis en substitution de toutes les aides, puis grâce à la croissance, à un supplément de revenu et à un meilleur moral, avec moins de chômeurs. Génial !

Miel partout. Le Revenu universel est, pour les libéraux, une façon de se responsabiliser. "Nous souhaitons apporter à chacun la sécurité fondamentale lui permettant de disposer pleinement de sa liberté et d’effectuer ses propres choix. Cette sécurité est le pendant de la responsabilité, puisqu’elle doit libérer les individus du besoin, et l’administration de l’obligation de multiplier sans fin les allocations, au gré des caprices politiques. C’est pourquoi nous proposons de baptiser ce revenu minimum LIBER. Calculé pour permettre à chacun de subvenir à ses besoins fondamentaux, il prend la forme non pas d’une somme versée à chacun, mais d’un crédit d’impôt" écrivent Gérard Koenig et Marc de Basquiat.

Non, demi-sel ! Emmanuel Macron dit : "il y a le RSA". Vincent Peillon ajoute : "je crois à la dignité du travail et par le travail". Pour Jean-Luc Mélenchon, c’est "une trappe à pauvreté" et, pour Philippe Martinez, "on se résigne à l’idée qu’il n’y a plus de travail, et donc qu’il faudrait accepter des périodes plus ou moins longues sans travail". Comment décider ?

Alors : miel ou demi-sel ? Passons aux effets pervers. Certains salariés pourraient ne plus travailler, ou au noir. Ce Revenu fait alors baisser le chômage des moins qualifiés, ce qu’on cherche, mais avec des personnes qui sortent du marché du travail ! Et ceux au noir (plus ce Revenu ?) se mettent à concurrencer les salariés les moins qualifiés. C’est la trappe à pauvreté de Mélenchon, la destruction d’emploi de Martinez.

Mais où est le vrai sel ? Dans la question qu’on évite : celle des chômeurs de longue durée à qualifications faibles et pour lesquels le SMIC brut est jugé trop élevé par les entrepreneurs. C’est tabou : on ne veut pas reconnaître que le SMIC brut freine l’embauche des peu qualifiés et qu’il faut tout faire pour permettre leur retour en entreprise, avec une formation adaptée à la révolution technologique en cours. Il faut obtenir de nouveaux comportements des chômeurs de longue durée, pour les remettre en emploi, et des entrepreneurs, pour qu’ils embauchent et forment. 

Nous n’y sommes…

- Pas encore, si l’objectif n’est pas de réduire le chômage de longue durée mais de permettre à chacun d’être plus libre et responsable, ce qui passe en outre par une réforme fiscale libérale qui devra être acceptée !

- Pas vraiment, s’il s’agit d’un "revenu décent". Additionnons les minima sociaux et attendons d’avoir plus de croissance pour le payer. Mais le chômage des non qualifiés demeure.

- Pas avec Hamon, puisque sa proposition de Revenu universel bénéficie d’abord aux jeunes. Et il accroît les dépenses publiques et réduit le temps de travail ! Le coût horaire du SMIC monte alors dans les entreprises sous pression fiscale, avec une demande plus exigeante de clients, eux-mêmes sous pression.

-Pas même avec Macron, qui propose de supprimer les charges sur les bas salaires au bénéfice des Smicards. Ils percevraient 100 euros de plus, mais quid des chômeurs non qualifiés ?

En face, une solution libérale serait que le revenu universel soit minimal (agrégeant certains minima sociaux) et que l’accent soit mis sur l’emploi des moins qualifiés, les charges patronales disparaissant du SMIC. Le Smicard touche autant en net, le patron paye moins. Ceci fait monter les embauches des emplois moins qualifiés. On entend d’ici : "comment vivre avec si peu ?" et "les patrons vont gagner plus !", mais ils pourront embaucher plus. Ces chômeurs peu qualifiés, souvent de longue durée, doivent revenir en entreprise. Une entreprise qui percevra des fonds pour les former vraiment, en vérifiant les résultats obtenus. Revenu ou chômeurs : il faut avoir le courage du sel.

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