Facebook peut-il sauver les adolescents de leur mal-être ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les messages tristes postés sur le réseau social peuvent servir d'alerte précoce pour repérer un début de dépression.
Les messages tristes postés sur le réseau social peuvent servir d'alerte précoce pour repérer un début de dépression.
©Reuters

Univers virtuel

Les jeunes ont une relation complexe avec ce réseau social à la fois espace de dialogue, recours en cas de crise, et lieu de harcèlement.

Gilles Klein

Gilles Klein

Gilles Klein,, amateur de phares et d'opéras, journaliste sur papier depuis 1977 et en ligne depuis 1995.

Débuts à Libération une demi-douzaine d’années, puis balade sur le globe, photojournaliste pour l’agence Sipa Press. Ensuite, responsable de la rubrique Multimedia de ELLE, avant d’écrire sur les médias à Arrêt sur Images et de collaborer avec Atlantico. Par ailleurs fut blogueur, avec Le Phare à partir de 2005 sur le site du Monde qui a fermé sa plateforme de blogs. Revue de presse quotidienne sur Twitter depuis 2007.

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Pour les adolescents, Facebook et les autres réseaux sociaux sont devenus un espace où l'on partage tout, quelques fois trop même, au point qu'une page Facebook recommande dans son titre "FACE your problems, don't FACE-book them" ("Faites face à vos problèmes, ne les Facebookez pas").

Mais, à en croire le New York Times, les spécialistes en santé mentale et en médecine des adolescents ne sont pas aussi catégoriques. Selon eux, les messages tristes ne doivent pas être ignorés ou écartés, parce qu'ils peuvent servir d'alerte précoce pour déclencher une intervention face à un début de dépression. Aux parents de trouver la clé de l'énigme : comment faire la part entre des déclarations mélodramatiques sans conséquence et le début d'une véritable crise ?

Une vraie question au vu des résultats d'une étude menée dans les universités de Washington et du Wisconsin-Madison. Des chercheurs ont étudié les profils Facebook de 200 étudiants et constaté que 30% de leurs mises à jour pouvaient être considérées, selon les critères de l'American Psychiatric Association, comme symptômes de dépression, de dévalorisation ou de désespoir, accompagnés d'insomnie ou d'excès de sommeil et de difficulté à se concentrer.

Ce pourcentage important (près d'un tiers des utilisateurs révéleraient des soucis personnels à travers leurs messages) est à mettre en perspective avec un  rapport de l'American Academy of  Pediatrics, publié en avril 2011, qui souligne que le nombre de préadolescents et d'adolescents  utilisant Facebook et autres a augmenté de façon spectaculaire : "selon un récent sondage, 22% des adolescents se connectent à leur site préféré des médias sociaux de plus de 10 fois par jour".

Le rapport fait allusion au sondage de Common Sense Media "Is Technology Networking Changing Childhood? A National Poll", paru en 2009. On y apprenait entre autres que 28% des adolescents avaient partagé sur un réseau social des informations personnelles qu'ils n'auraient pas évoqué en public, et que 39% avaient écrit des choses qu'il regrettaient d'avoir publié.

Non content d'exprimer leurs angoisses sur un réseau social, les adolescents peuvent aussi être les victimes de personnes mal intentionnées qui les harcèlent en ligne. Le phénomène n'est pas nouveau. Dès 2007, un sondage PewInternet montrait qu'environ 32% des "teenagers" utilisateurs d'Internet avaient été la cible d'activités malveillantes en ligne, qu'il s'agisse de messages menaçants, de messages privés rendus publics, de photos compromettantes diffusées ou de rumeurs négatives répandues à leur propos.

Les messages de désespoir sur Facebook suivis de suicide existent en France, comme ailleurs : "Un adolescent a été retrouvé pendu mardi matin dans la chambre de son internat à Avignon. Il avait annoncé la veille son geste désespéré sur le réseau social", signalait France Soir le 9 décembre 2010. "'This is my last day', 'C'est mon dernier jour'. Par ces cinq mots en anglais écrits sur son profil Facebook, mardi vers minuit, les amis de Paul auraient pu penser à un jeu, une provocation, voire à un simple appel au secours d'un gamin en mal de vivre. Il n'en était rien".

Il y a aussi des exemples aux États-Unis, comme celui, récent, d'Amanda Cummings, 15 ans, qui s'est suicidée en se jetant devant un autobus de Staten Island, New York, près de son domicile, le 27 décembre 2011.  Elle est décédée des suites de ses blessures six jours plus tard, rapporte le New York Daily News. Le 1er décembre, elle avait écrit sur Facebook : "Je vais me suicider".

Comme le signale le site du Staten Island Advance, le 6 janvier 2012, à peine était-elle enterrée que des centaines de messages plus ou moins insultants envahissaient la page Facebook ouverte à sa mémoire, accompagnées de photos d'elle retouchées. A la suite de cet incident, un homme politique local, le sénateur Jeffrey D. Klein, déposait un projet de loi pour enrichir la législation américaine contre le harcèlement en ligne. Une idée qui ne semble pas avoir eu de suites pour l'instant.

Quoiqu'il en soit, pour faire face à ce phénomène, Facebook a commencé dès 2007 à collaborer avec l'association National Suicide Prevention Lifeline, qui a bien sûr sa page Facebook. Un utilisateur qui  voit un message inquiétant  peut aujourd'hui le signaler au réseau social qui peut, après vérification, envoyer à la personne qui a écrit le message et à celle qui l'a signalé un lien vers Lifeline.

Et, depuis décembre 2011, Facebook peut envoyer à la personne en détresse un message avec un numéro de téléphone d'urgence ou lui proposer discuter en ligne avec un conseiller. Pas sûr que cela suffise, car dans la vie ceux qui veulent vraiment se suicider y arrivent, hélas. C'est peut-être, tout simplement, aux utilisateurs de veiller sur le moral de leurs amis.

Autre question que les spécialistes n'ont pas tranchée, évoquée par Fox News en mars 2011 : existe-t-il une "dépression Facebook"  liée au caractère quelques fois violent de cet univers virtuel ou bien le mal être qui s'y exprime n'est-il que le reflet de celui dont souffre le jeune utilisateur dans sa vie quotidienne, hors Facebook ?

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