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Et si le PS et les Républicains démontraient que l’existence d’une structure même largement déconsidérée demeurait un atout majeur pour gagner une présidentielle face à des candidats brillants mais isolés comme Macron ou Mélenchon ?
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Partis papys font de la résistance

Alors que seuls 11% des Français affirmaient dans une enquête du Cevipof en janvier faire confiance aux partis, cette structure politique demeure indispensable pour remporter une campagne, mais également pour la vie démocratique de notre pays.

Atlantico : Dans le contexte actuel français, peut-on parler d'une crise des partis politiques ?

Maxime Tandonnet : La crise des partis est la caractéristique essentielle de la vie politique française. La situation désastreuse des partis "de gouvernement", le PS déchiré et LR en pleine turbulence autour de la remise en cause de la candidature de François Fillon, est en le symptôme le plus évident.  Dans l'enquête Cevipof de janvier 2017 sur le baromètre de la confiance des Français, seuls 11% leur font confiance ce qui fait d'eux, d'assez loin, l'institution la plus impopulaire. L'ascension phénoménale de M. Macron, un candidat hors parti, mais extrêmement présent sur les médias et les réseaux sociaux, semble être le signe du déclin des partis politiques.

Aujourd'hui, il serait possible de réussir une brillante carrière électorale en dehors de toute structure partisane par le seul rayonnement médiatique et le soutien des réseaux sociaux. Dès lors, les partis politiques ne serviraient plus à rien. La cause de ce phénomène? Les partis politiques ont un rôle bien défini par la Constitution: ils concourent à l'exercice de la démocratie. Leur rôle est double: d'une part, participer au débat d'idée et à la conception d'un programme de gouvernement. D'autre part, faire émerger les candidats, les meilleurs, les plus charismatiques, les plus loyaux et les plus intelligents pour l'élection des parlementaires. Il faut dire que les partis ont échoué dans ces deux missions. Ils ne participent plus vraiment à la conception des programmes. Les projets sont réalisés par des "écuries" des candidats aux élections présidentielles, qui les publient dans des livres. Le recrutement des candidats aux législatives est souvent (pas toujours) affaire de réseau familial, clanique, où l'on se refile la circonscription par amitié politique. L'obsession présidentialiste de la politique française a tendance à accentuer ce déclin des partis: le débat d'idée nationale s'estompe devant le paraître, la dictature de l'image et de la posture des personnalités. Dans ce contexte, les partis n'en finissent pas de mourir...

Comment interpréter cette crise ?

La politique devient chaque jour un peu plus l'otage des médias et des réseaux sociaux. Elle évolue sans cesse vers le grand spectacle, le sensationnel. Elle se réduit à l'émotionnel et aux sentiments qu'inspirent tel ou tel personnage. Elle se rapporte à des jeux d'images, à des sensations, à des impressions. Le fond des choses disparaît derrière le paraître. Les slogans remplacent les idées. La manipulation de masse se substitue à la volonté générale. C'est pourquoi nous voyons la politique fuir jour après jour du monde des réalités. Le système présidentialiste français en est le grand coupable.

La politique consiste désormais à vendre un personnage armé de son slogan, un acteur, un comédien, et non plus un projet collectif. Elle devient affaire de séduction où la passion – haine ou amour – finit par broyer le sens des réalités et du bien commun. Non, la mort des partis signifie la mort de la politique et au fond, de la démocratie. Ce sont les partis actuels, dans leur conception, qui paraissent mortellement touchés. Mais l'idée de formation politique, de rassemblement des énergies pour faire triompher un projet est vitale à la démocratie. Dans un climat général soumis au culte de la personnalité, on a totalement oublié que la politique est une affaire d'unité, de projet collectif. Les partis politiques sont à réinventer, peut-être sous une forme différente mais la démocratie ne peut pas se passer d'eux. Ils en sont les garants et les pierre angulaires. Il est indispensable de réhabiliter le collectif et le débat d'idées. Sinon, nous courons à la catastrophe, nous allons vers une situation ou la vie publique ne sera plus que scandales, polémiques, haines et idolâtries. La politique sans partis, sans collectif, livrée aux seuls médias, au sensationnel, au jeu  du lynchage et de l'idolâtrie, est le plus court chemin d'une dictature.

Dans ce contexte, quel regard peut-on porter sur le FN ? 

Je ne pense pas que le FN soit une exception dans ce contexte. N'ayant jamais été au pouvoir, il bénéficie du rejet des partis qui ont été associés aux gouvernements et peut apparaître pour certains comme une alternative, et aussi d'une forte exposition médiatique. Mais il représente la quintessence de la grande dérive de la politique française autour d'un culte de la personnalité exacerbé, de chiffons rouges et de leurres : sortie de l'Europe, "préférence nationale", taxes sur les importations, etc. Le monde des réalités s'efface, ne compte plus à ses yeux: avec quelle majorité au Parlement ? Comment faire face aux contraintes économiques, juridiques, internationales? Quelles conséquences, déchirements possibles de la société, mesures de rétorsion éventuelles et danger de l'isolement ? Le seul objectif est de prendre l'Elysée, à n'importe quel prix. Mais cette méthode fait des émules et tout le monde s'y met. Le culte de la personnalité se répand partout devenant le socle de la vie politique française, et les slogans ou gadgets clinquants, censés faire rêver – tel le "revenu universel" –   ont remplacé le travail programmatique sérieux et réaliste. Seule une recomposition politique majeure et l'émergence de nouvelles formations politiques tournées vers un projet, et non plus les mirages, les illusions, les chimères et les idoles, peut permettre de réconcilier durablement la France avec la politique.

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