La France peut-elle faire face à une cyber-guerre ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Avec qui l'Etat peut-il travailler pour se protéger des attaques numériques venues de l’extérieur ?
Avec qui l'Etat peut-il travailler pour se protéger des attaques numériques venues de l’extérieur ?
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Hacking

Les parlementaires français cherchent à comprendre comment appréhender la menace numérique et comment développer une réponse efficace. Dans un pré-rapport présenté ce mercredi à la commission Défense du Sénat, Jean-Marie Bockel constate l'isolement tricolore.

Jean-Marie Bockel

Jean-Marie Bockel

Jean-Marie Bockel est un avocat et homme politique.

Nommé en 2007 Secrétaire d'Etat chargé de la Coopération et de la Francophonie, il devient secrétaire d'État à la Défense et aux Anciens combattants lors du remaniement ministériel de mars 2008.

Beaucoup voient dans ce changement le résultat de pressions exercées par les présidents Omar Bongo et Denis Sassou-Nguesso, mécontents de ses positions au sujet de la Françafrique.

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Atlantico : Vous présentez un premier rapport à la commission Défense du Sénat sur la cyber-défense française. Dans ce domaine, vous décrivez la France comme un « village de Gaulois ». Comment sortir de cet isolement et avec qui travailler pour protéger l’Etat des attaques numériques venues de l’extérieur ?

Jean-Marie Bockel : Sortir du « village Gaulois », ça se décide déjà au niveau national. Il faut une réponse transversale. Nous avons fait de grands progrès depuis la publication du Livre Blanc sur la Défense et la sécurité nationale qui évoque cette réalité de la cyber menace dés 2008. Ce sujet concerne la société dans son ensemble : d’un point de vue Défense nationale bien sûr, mais aussi d’un point de vue criminalité ou encore espionnage industriel et économique.

La cyber-défense, c’est un rapport au danger du monde moderne. Il faut savoir quelle capacité nous souhaitons nous donner pour éviter que dans le cadre d’un conflit ou d’une guerre plus froide, des tensions sérieuses face à un adversaire étatique ou autres. Une telle menace pourrait viser la sécurité nationale mais aussi des services publics comme le transport, l’énergie ou la santé. Des dégâts qui pourraient immobiliser le pays mais qui pourraient aussi coûter dans certains cas des vies humaines.

Pour répondre à cela, nous avons mis en place l’ANSSI, qui est un organisme à vocation interministérielle. Nous développons des méthodes. Nous sensibilisons les entreprises. Mais tout cela reste balbutiant. Aujourd’hui, même au niveau de l’outil de Défense, chacun travaille un peu dans son coin. Cette situation n’est pas propre à la France. Nos voisins allemand et anglais sont dans la même situation. Ils commencent à mettre des moyens dans des dispositifs de défense contre des attaques qui existent réellement.

Souvenons-nous de l’attaque dite « chinoise » qui a pris pour cible le ministère des Finances à Bercy l’an dernier à la veille du G8 et du G20. Il faut sortir de notre « village Gaulois » en renforçant la capacité nationale, en donnant les moyens à la société et aux entreprises de se défendre contre de telles attaques. Mais il faut aussi nous rapprocher de nos partenaires européens en mettant en place des procédures. Comment réagir, vite, ensemble ? Avec l’OTAN, grâce aux dispositifs militaires multinationaux qui existent. Nous avons agi en Libye avec nos partenaires, sous couvert d’une résolution des Nations unies. Il faut mettre en place le même type de dispositifs pour faire face aux menaces numériques.

Que peut apporter la France, dans un tel dispositif ?

La France a développé des moyens qui, s’ils restent encore insuffisants, ont le mérite d’être astucieux. Avec l’ANSSI, nous disposons d’un très bon outil et de spécialistes compétents. Lorsque Bercy a été attaqué, lorsqu’Areva a été attaqué, les ingénieurs et les techniciens de l’ANSSI ont pu intervenir. Ils ont cherché à identifier les attaquants et les dégâts.

Les Américains, les Britanniques et les Allemands ont une bonne image de la France dans ce domaine. Nous sommes avec les Britanniques l’une des principales forces militaires européennes et nous pouvons couvrir l’ensemble du champ de réponses stratégiques en cas d’attaque, depuis la dissuasion nucléaire jusqu’au numérique en passant par une large palette de moyens humains.

Nous avons aussi de grandes entreprises qui ont commencé à développer des solutions de défense et de protections contre les attaques informatiques. Tout cela nous donne un potentiel important même si la coordination est encore largement imparfaite.

Où se situent les Chinois dans tout cela ? Amis ou ennemis ?

Ils sont les deux. Il n’y a pas « les Chinois » au sens global et uniforme du terme. Lorsque vous avez un interlocuteur officiel, un fonctionnaire ou un ministre en charge de ces questions, il vous dira : « Ce n’est pas nous qui vous attaquons, nous sommes attaqués nous aussi et peut-être encore plus que vous ». Ils ont aussi des hackers et des cyber-criminels qui les prennent pour cible. Ils disent vouloir coopérer avec nous et je les pense sincères.

Dans cette même Chine, vous trouvez des bataillons entiers de hackers qui peuvent être en lien avec certains services gouvernementaux et qui se préparent à des attaques de grande envergure. Peut-être même expérimentent-ils des attaques. La Chine diverse reste à la fois un adversaire avéré et un allié potentiel. Cela rend les choses compliquées mais prouve que nous faisons bien face à un problème global.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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