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​“Plus de croissance que prévu grâce à Trump” : faut-il croire aux prédictions du FMI ?
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Trumpissimo

Dans son dernier "Global Economic Outlook", le FMI revoit ses prévisions de croissance à la hausse au niveau mondial, mais surtout aux Etats Unis, notamment en raison des politiques économiques qui devraient être mises en place par Donald Trump. Voici pourquoi ces nouvelles attentes sont crédibles.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Atlantico : Ce lundi 16 janvier, le FMI publiait ses dernières prévisions de croissance au niveau mondial, révélant une accélération de la croissance américaine en raison du programme économique de Donald Trump. En quoi le "Trumpisme" pourrait il finalement s’avérer être une bonne surprise pour l'économie mondiale ? Quels seraient les principaux bénéficiaires d'une accélération américaine ?

Jean-Paul Betbeze :Une fois n’est pas coutume, le FMI paraît moins inquiet. A la source de ce regain d’optimisme se trouve la politique américaine anticipée, sous la houlette de Donald Trump. Après une année 2016 médiocre, 2017 devrait connaître une accélération en fin 2017 et en 2018. La croissance mondiale passe de 3,1% en 2016 à 3,4% en 2017 et à 3,6% en 2018. La croissance pour les Etats-Unis passerait ainsi à 1,9% en 2017, plus 0,1% par rapport à la prévision d’octobre 2016, et surtout à 2,5% en 2018, soit 0,4% par rapport à cette même prévision de l’an dernier. C’est là l’écart majeur, et positif, de la prévision concernant les pays industrialisés. Les auteurs de l’étude indiquent qu’ils ont pris en compte la nouvelle politique de relance budgétaire, en retenant « la projection la plus probable parmi un large éventail de scénarios possibles ».

Cet ajout est sans doute destiné à montrer un écart par rapport à la Banque mondiale qui, elle, ne revoit pas ses chiffres sur les Etats-Unis, précisément pour des raisons d’incertitude. A titre d’illustration manifeste des écarts, le FMI titre sa mise à jour, A Shifting Global Economic Landscape, en mettant l’accent sur les changements, tandis que la Banque mondiale titre Subdued Growth, Shifting Policies, Heightened Uncertainty, attirant le regard sur les risques populistes, protectionnistes et ceux liés à la montée des taux aux Etats-Unis. Bien sûr, la Banque mondiale se réserve la possibilité de revoir à la hausse sa prévision de croissance pour les Etats-Unis, mais son attitude est assez claire : attendons. En même temps, le FMI met l’accent sur l’Allemagne et le Canada (plus 0,1% de croissance en 2018 tous les deux).

Au fond, la vision du FMI semble assez dépendante d’une politique Trump qui « marche », au-delà des incertitudes économiques et politiques qu’elle peut actuellement susciter. De ce point de vue, ce travail est crédible et plus encore utile, pour fixer une borne haute, mais raisonnable, des années qui viennent. 

A l'inverse, le FMI revoit fortement à la baisse la croissance mexicaine, soit une baisse de 0.6 point de croissance par rapport aux prévisions précédentes pour les deux prochaines années. Faut il y voir un effet direct des mesures protectionnistes voulues par Donald Trump ?

De fait, le Mexique est la victime directe de la politique Trump, avant même qu’elle se mette en œuvre ! La croissance mexicaine en 2017 serait ainsi de 1,7% en 2017 puis de 2% en 2018, soit un décrochage de 0,6% chaque année par rapport aux prévisions. De fait, la croissance mexicaine est directement exposée aux interventions de Donald Trump, son grand client, avec sans doute des effets à venir sur l’investissement et l’emploi, en attendant sans doute aussi une hausse des droits de douane. Ce sera, au fond, une façon de leur faire payer le mur ! Le Peso mexicain a ainsi beaucoup baissé, même si la banque centrale a monté ses taux pour tenter de le défendre – mais elle ne pouvait davantage miner la croissance du pays !

Pour autant, tous les effets d’une politique Trump ne sont pas pris en compte. Le prix du pétrole remonte dans les travaux, ce qui n’est pas sûr si les exportations américaines augmentent. Les échanges des pays avancés décélèreraient, mais pas venant des pays émergents et en développement. Autrement dit, la montée du protectionnisme, signalée par la Banque mondiale est ici moins présente. Ceci sans oublier les tensions avec la Chine, notamment en mer de Chine. Le monde se réarme – ce qui aura un effet sur la croissance.

Du point de vue européen, si le Royaume Uni et l'Allemagne voient également leur croissance 2017 revues à la hausse, la situation de la France est conforme aux attentes précédentes, alors que l'Italie repart à la baisse. Comment interpréter cette divergence des situations européennes ? Cette divergence n'est elle pas précisémment le plus grand danger en Europe? et notamment en ce qui concerne les cas de l'Allemagne, de la France et de l'Italie, au regard de la zone euro ?

Les prévisions du FMI concernant le Royaume-Uni sont revues à la hausse seulement pour 2017 : 1,5% contre 1,1% en octobre 2016, puis en baisse en 2018 de 0,3%. Au total, la croissance du Royaume-Uni en phase de Brexit s’établit à 1,5% puis 1,4% en 2017 et 2018, en rupture marquée par rapport aux 2% de 2016 et aux 2,2% de 2015. Nous verrons ensuite : l’incertitude est très forte. L’Allemagne bénéficierait d’une amélioration de ses marchés : Etats-Unis bien sûr, tandis que la décélération chinoise serait modeste, la croissance de l’Inde et des pays de l’Asean continuant sur leur lancée. La situation italienne  est toujours préoccupante, avec une croissance prévue à la baisse pour 2017 : 0,7% contre 0,9% et pour 2018 : 0,8% contre 1,1%. La dégradation de la note italienne par l’agence DBRS, plus la situation des banques, ne vont pas aider et poser dans le pays des problèmes économiques, financiers et politiques croissants. La France continue selon le FMI avec une croissance à 1,3% en 2017 et 1,6% en 2018, inchangée par rapport aux prévisions d’octobre et légèrement supérieure à celles de l’Insee et de la Banque de France.

De fait, une part de la zone euro va toujours bien, l’Allemagne, qui « fait » l’excédent extérieur de la zone, et le taux de change de l’euro, l’Espagne continue sa lente amélioration, la France croît lentement et l’Italie inquiète. Derrière des écarts Allemagne-France-Italie il y a des montées opposées de la dette publique et des risques nouveaux. Mario Draghi ne pourra pas continuer ses achats de bons du trésor entre une Allemagne en surchauffe, une France en croissance faible et une Italie en difficulté. La montée des taux sera bien reçue en Allemagne, pas vraiment ailleurs. Les réformes qui n’ont pas été faites quand l’argent était gratuit pour tous, symbole des difficultés de tous, devront l’être quand il deviendra plus cher, symbole des succès de certains. 

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