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L’inspiration politique
souffre du pré-formatage 
de la pensée partisane
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EDITORIAL

Pourquoi est-il si difficile, politiquement et culturellement, de sortir de l’éternel clivage gauche-droite ?

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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A l’époque des grandes crises, des grandes décisions, des grandes mutations, mais aussi comme cela est le cas dans les très grandes joies et les très grandes peines, l’heure est au rassemblement, à l’unité nationale. D’une certaine manière, l’Europe aussi est en « unité nationale », celle de la nation Europe, pour sauver le soldat grec, notre soldat Rayan. Une unité intéressée, peut-être peu spontanée, peut-être poussive, mais une Europe qui fait corps, quand même. Une solidarité raisonnée quand les ravages sociaux de la crise grecque pourraient aussi appeler à une solidarité de cœur qui ne trouve pas beaucoup sa place aujourd’hui face à des peuples repliés sur eux-mêmes.

Nicolas Sarkozy en 2007 appelait à la rupture, et appliqua l’ouverture suite à son élection. François Hollande en appelle aujourd’hui au « changement ». François Bayrou à une autre forme d’alternance que l’alternance traditionnelle gauche-droite qui semble pourtant à nouveau se dessiner et se pronostiquer. Marine Le Pen également, en lutte contre « l’UMPS » exhorte à un autre choix. Tous ont raison sur le besoin de nouveauté. L’époque a besoin d’innover pour se réinventer, c’est vrai du point de vue industriel, énergétique, scientifique, managérial, technologique, c’est vrai également du point de vue politique. Où est l’innovation politique de la campagne ? Qu’il est difficile d’être innovant lorsque l’on croit avoir tout essayé. L’innovation politique est nécessaire, s’il est difficile de la trouver dans les idées, elle peut venir de l’état d’esprit, des attitudes, de l’ouverture d’esprit.

Sans rentrer dans un quelconque parti pris, force est de constater que le clivage gauche-droite que nous offre pour l’instant la campagne, et la retranscription qui nous est faite par les médias, est tout sauf innovant, et donc de ce seul point de vue assez décevant. Décevant car le clivage dogmatique ne peut être constructif. Tout ce qu’a fait ou propose de faire l’autre est nécessairement mauvais. Le militantisme à outrance fixe des œillères à la pensée. Il est nécessaire, et même souhaitable d’avoir des convictions, et même très dommageable d’en manquer, mais celles-ci ne doivent pas être dogmatiques, populistes ou électoralistes. François Bayrou reconnaissait lundi soir sur TF1 des avancées du quinquennat sur la revalorisation des retraites, et en appelait à un État impartial lorsque certains pourraient avoir la tentation de diriger un corps de hauts fonctionnaires aux couleurs de leur parti politique.

Oui, les hautes fonctions de l’État doivent se placer au dessus du militantisme partisan. La seule cause, le seul parti doit être celui de la France.

Sans critiquer la personne, que je respecte, je souhaite à titre d’illustration revenir sur un tout petit épisode passé inaperçu (c’est là le drame) en novembre 2010, le 16 novembre pour être précis. Ce matin là, François Baroin est l’invité de Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1. Nous sommes au lendemain d’un remaniement, et il occupe nouvellement, au delà de ses fonctions ministérielles, celle de porte-parole du gouvernement. D’entrée lors de l’interview, François Baroin se félicite d’un gouvernement au service de l’action du Président de la République … « Pour créer les conditions de sa victoire en 2012 » !

Et bien NON, Monsieur Baroin, le gouvernement de la République française n’est pas un outil de campagne électorale, il n’est pas au service de la réélection du locataire de l'Élysée, il est dédié et concentré sur une seule mission, celle de servir la France et les Français. Cette phrase est lourde de sens, elle est passée inaperçue tant elle est rentrée dans les mœurs. Elle n’a même pas été relancée à chaud par Monsieur Elkabbach. D’ailleurs je ne sais pas ce qui est pire, asséner ce genre de propos sans même s’en rendre compte, ou les écouter sans rien dire.

Depuis cet épisode, et la campagne en cours me conforte dans ce point de vue, et même si cela peut relever du symbole, certains diront de l’utopie, une idée me taraude concernant les Ministres et éventuellement certaines très hautes fonctions de l’État, en fait deux idées : celle d’une part de demander à ces personnalités publiques, au service du public, de s’engager publiquement et de façon formelle à servir l’Etat, d’une certaine manière à prêter serment. D’autre part, pourquoi ne pas considérer qu’un ministre doit être sans étiquette partisane : dès lors qu’il est nommé, il démissionnerait de son parti politique. Son parti devient la France, la seule cause qu’il doit servir objectivement, libéré de ses contingences partisanes, ce qui d’ailleurs pourrait être plus facile à vivre, à la fois pour lui et pour le parlement.

Il faut se libérer pour innover, l’électricité n’a pas été inventée en perfectionnant la bougie.

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