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La France, phare de la civilisation et terre d'accueil des damnés de la planète depuis la Révolution ? Pas si simple...
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Bonnes feuilles

Non, nous n’assistons pas à une crise de la démocratie – nous ne nous sommes même jamais autant exprimés. Nous vivons clairement une crise de la citoyenneté. Après avoir dénoncé les aveuglements de la politique de l'émotion et de la compassion, Yves Michaud détaille ses propositions concrètes pour former des citoyens loyaux et engagés. Extrait de "Citoyenneté et loyauté" d'Yves Michaud, aux Editions Kero (2/2).

Yves Michaud

Yves Michaud

Yves Michaud est philosophe. Reconnu pour ses travaux sur la philosophie politique (il est spécialiste de Hume et de Locke) et sur l’art (il a signé de nombreux ouvrages d’esthétique et a dirigé l’École des beaux-arts), il donne des conférences dans le monde entier… quand il n’est pas à Ibiza. Depuis trente ans, il passe en effet plusieurs mois par an sur cette île où il a écrit la totalité de ses livres. Il est l'auteur de La violence, PUF, coll. Que sais-je. La 8ème édition mise à jour vient tout juste de sortir.

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C’est une de nos pieuses légendes que, depuis la Révolution française, jamais la France n’a failli à sa mission de terre d’asile pour les persécutés dans sa tradition sacrée d’accueil humanitaire des malheureux. Dans la réalité, les choses ont toujours été beaucoup plus nuancées. En premier lieu parce que le droit d’asile n’est pas né avec la Révolution française. Dès les XVIIe et XVIIIe siècles, il fait partie du « droit des gens ». Sa pratique est même immémoriale : l’étranger abandonné, chassé, persécuté est accueilli, ne serait-ce que de manière provisoire, afin qu’il reprenne des forces – et poursuive son chemin. Il peut être accueilli plus durablement à condition qu’il ne représente pas un poids insupportable et qu’il respecte les lois de l’hospitalité dont il bénéficie.

Dans « le droit des gens », ébauche du droit international, le droit d’asile, commandé par la charité et l’humanité, s’adresse aux fugitifs implorant « la protection d’un souverain contre la nation et le prince qu’ils ont quittés ». Le demandeur d’asile, que l’on n’est pas forcé d’accueillir, doit avoir été chassé. Il doit s’abstenir de mener des actions séditieuses et respecter les lois du pays qui l’accueille. Pufendorf, à la suite de Grotius, parle de « donner retraite à un petit nombre de gens qui ne sont pas bannis de leur patrie pour quelques crimes, surtout s’ils ont de l’industrie, du bien, et pourvu qu’ils ne viennent pas troubler la religion ni les lois du pays ». En quelques mots tout est dit. Le demandeur d’asile ne doit pas être un criminel. Ce n’est pas plus mal s’il a de l’industrie et des biens. Il ne doit pas troubler la religion ni les lois du pays et… c’est encore mieux s’il y en a un petit nombre.

Comme on voit, le sens de l’humanité et la bienveillance sont tempérés par le réalisme politique et la prudence. Le fait est que les protestants français furent accueillis en Allemagne ou aux Pays-Bas sur des bases de cette sorte après la révocation de l’édit de Nantes en 1685, et réciproquement la France accueillit des catholiques écossais ou irlandais, ou des réfugiés grecs fuyant les massacres ottomans. Le statut de ces réfugiés pose plusieurs problèmes : celui des secours à leur apporter, celui de leur retour ou éventuellement de leur naturalisation, celui de leur statut de réfugiés séjournant durablement.

Extrait de Citoyenneté et loyauté d'Yves Michaud, aux Editions Kero.

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