Aller au travail dans un train à 900km/h : ces quelques obstacles que l’Hyperloop devra encore franchir avant d’être l’incroyable révolution qu’on nous promet<!-- --> | Atlantico.fr
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Avec l'Hyperloop vous pourriez faire Paris-Marseille en 35 minutes. Forcément attractif...
Avec l'Hyperloop vous pourriez faire Paris-Marseille en 35 minutes. Forcément attractif...
©Reuters

A la vitesse de l'éclair

L'Hyperloop, le projet fou d'Elon Musk qui consiste en un train avançant à 900km/h, est encore loin d'être abouti. Il ne devrait pas permettre tout de suite une grande révolution des transports publics. Ses capacités d'accueil du public et le prix de ses infrastructures le rendront accessible à une seule élite.

Gilles Dansart

Gilles Dansart

Gilles Dansart, journaliste, créateur et directeur de Mobilettre, lettre confidentielle spécialisée dans les questions de mobilité (www.mobilettre.com). A auparavant été journaliste au Nouvel Economiste, L'Evénement du Jeudi, La Vie du Rail, Ville & Transports. Privilégi,e dans les traitements éditoriaux des questions de mobilité, des approches globales mêlant l'économie, la technologie, le sociétal, le politique...
 
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Atlantico : Alors que la question des transports dans la ville de demain intéresse grandement les urbanistes, dans quelle mesure l'Hyperloop, un train avançant sur des coussins d'air à très basse pression et pouvant atteindre les 900 km/h, pourrait-il changer à l'avenir la mobilité entre domicile et lieu de travail ?

Gilles DansartSi le projet Hyperloop va à son terme, ce qui est loin d'être assuré étant donné l'audace du projet, il constituera difficilement une alternative au transport de masse. Les effectifs de personnes transportées seront trop faibles pour prétendre répondre aux flux des métropoles. Les capsules sont aujourd'hui estimées à 28 places chacune... Et leur nombre sera forcément limité, car il faudra respecter les intervalles nécessaires à la sécurité (pour qu'une capsule n'en percute pas une autre en cas d'incident d'exploitation, par exemple). On pourrait multiplier les quais de départ et d'arrivée, mais on arrivera difficilement à un nombre de rotations permettant de transporter des millions de personnes, malgré les projections des ingénieurs. 

Le problème aujourd'hui des déplacements entre métropoles tient davantage au temps perdu dans les lieux d'intermodalité que dans le temps de voyage lui-même. Le projet Hyperloop séduit parce qu'il donne du rêve, réduit spectaculairement les distances et ne signifie pas a priori des investissements gigantesques. Sera-t-il pour autant le TGV des années 2030 ? J'en doute. L'avion et le train selon les pays et les distances devraient conserver un avantage certain, à condition de fluidifier les accès aux aéroports et aux pôles d'échanges. 

Quels sont les avantages et inconvénients de ce projet (temps de transport, sécurité, coût...) ?

La tarification envisagée (18 euros entre Los Angeles et San Francisco, par exemple) est attractive. Avec l'Hyperloop vous pourriez faire Paris-Marseille en 35 minutes... Mais en arrivant où ? Les villes contemporaines sont déjà très saturées. Si c'est pour perdre deux heures dans les embouteillages... Globalement, le coût de construction apparaît pour l'instant faible au regard de ce que nécessite une infrastructure ferroviaire classique. Mais il faudra quand même trouver des espaces disponibles, ce qui est loin d'être évident en zone dense.

Du point de vue de la sécurité, les ingénieurs garantissent toujours le niveau maximal en phase d'études. Mais en la matière, tous les scénarii doivent être étudiés, y compris les plus improbables. Car aucune autorité publique ne délivrera de certificat d'exploitation sans des assurances maximales. D'autant que pour l'instant, rien ne permet de connaître la réaction physiologique d'un individu lambda à un tel voyage en capsule. S'il faut se munir au préalable d'un certificat médical...

Selon le Washington Post, des voitures autonomes pourraient à l'avenir nous conduire de chez nous jusqu'aux gares de l'Hyperloop. Cette vision est-elle réaliste ? Y a-t-il un potentiel de compatibilité entre les voitures sans chauffeurs et l'Hyperloop ?

De tous temps le rêve de l'automatisation a conduit à imaginer des solutions miracles. Mais une voiture individuelle, qu'elle soit autonome ou pas, prendra toujours le même espace sur la voirie. Comme le principal défi des métropoles est celui de la congestion, je ne vois pas en quoi la voiture autonome serait d'un grand secours. Les véhicules partagés autonomes le seront bien davantage, c'est pour cela qu'ils peuvent rendre de grands services. L'avenir sera plutôt à la modernisation et à l'amélioration du confort des transports collectifs.

Toutes les prévisions des instituts spécialisés font état d'une croissance des déplacements, aussi bien en intercontinental qu'en interurbain ou en proximité. Les financements publics disponibles viendront donc plus naturellement sur des infrastructures partagées et des aménagements d'espaces d'intermodalité. Si les Etats-Unis, avec une autre culture de l'investissement privé sur l'espace public et de grandes distances entre les métropoles, peuvent se lancer dans des projets comme l'Hyperloop, je doute que les pays européens soient prêts à y consacrer leurs ressources de plus en plus rares. Il a fallu presque vingt ans pour que voie le jour la liaison rapide CDG Express pour desservir l'aéroport de Roissy, alors imaginer une liaison Hyperloop à dix ans me semble bien difficile. Et n'oublions pas que le train à grande vitesse reste une exception au niveau mondial. L'avion reste d'une très grande pertinence, à condition d'améliorer son bilan énergétique.

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