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Benoît Hamon, le sympathique réactionnaire du PS
©Reuters

Dans tous les sens

Taxes sur les robots, réforme de la sécu... Derrière sa sympathie, le candidat de gauche présente certaines positions extraordinairement réactionnaires.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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C’est vrai qu’il est sympathique, Benoît Hamon, et qu’il est toujours très plaisant de passer un moment avec lui. Il a de l’humour, il est accessible, il n’est pas prisonnier de ces illusions parisiennes qui portent certains esprits à croire que l’humanité est divisée entre différentes classes existentielles obligeant les unes à faire sentir aux autres un obligatoire mépris plus ou moins assumé. Bref, on en viendrait à souhaiter sa victoire à la primaire de la gauche, ne serait-ce que pour donner de l’air frais au style politique en vigueur à gauche.

Le sourire aux lèvres, Benoît Hamon a une idée néanmoins assez curieuse : il multiplie, sous un air de combattant révolutionnaire (de salon, il est vrai), les positions extraordinairement réactionnaires, au point qu’on peut se demander à quel parti il appartient vraiment.

Taxer le progrès, une première idée stupéfiante

Dans nos colonnes, nous avons déjà évoqué l’idée très FN-compatible de la taxation des robots, qui résume en une seule expression une multiplicité de conceptions rétrogrades.

Par exemple, la taxation des robots laisse clairement penser qu’il faut pénaliser les entreprises qui remplacent les humains par des machines. C’est singulier intellectuellement, philosophiquement. Et tant qu’on y est, pourquoi ne pas taxer les entreprises qui utilisent l’avion ou le train pour le déplacement de leurs salariés, plutôt que de les faire voyager à pied? Pourquoi ne pas taxer le téléphone, qui a remplacé les messagers? Pourquoi ne pas taxer les mails qui remplacent les facteurs? Pourquoi ne pas taxer le cloud qui remplace les archives et leurs inévitables magasiniers?

Il fut un temps, répétons-le, où l’aliénation du prolétariat par un travail abrutissant laissait peu le choix : la machine était la seule façon de traiter dignement l’ouvrier. Toute tâche confiée à un humain qu’une machine était capable de réaliser à sa place était perçue comme une tâche dégradante, ou aliénante.

À l’époque où le Parti Socialiste croyait au progrès, il semblait évident à ses dirigeants qu’il fallait libérer les prolétaires en confiant les tâches pauvres à des machines chaque fois qu’on le pouvait. Benoît Hamon a, pour sa part, renversé le raisonnement : il préfère inciter à recruter des humains à la place des machines.

Tuer la Sécurité Sociale, quelle audace!

Autre idée réactionnaire vendue avec un sourire moderniste : le balayage complet de la sécurité sociale. Sur le fond, la proposition de Benoît Hamon, qui consiste à asseoir la contribution patronale au financement de la protection sociale sur la valeur ajoutée et non sur le travail, revient en effet à tuer l’idéal porté en 1945 avec les ordonnances sur la sécurité sociale.

Quel était en effet le principe de la sécurité sociale à l’époque? Organiser la protection des travailleurs contre les risques de la vie par un système mutualisé intégrant une participation des employeurs. La sécurité sociale était forcément liée au travail, par opposition aux systèmes “beveridgiens” fondés sur la fiscalité et la solidarité.

Benoît Hamon propose de tourner la page de cet équilibre dit “contributif” par les spécialistes en orientant le “modèle social” français vers une solidarité financée par l’impôt. Il ajoute même qu’il propose de fusionner la CSG et l’impôt sur le revenu (avec un projet de 10 tranches…), ce qui achèvera de tuer les contributions directes des salariés au financement de la protection sociale.

Ces idées ne manquent pas d’intérêt. Elles sont largement pratiquées ailleurs. Pour le coup, on aurait plutôt attendu François Fillon dans cet exercice, et c’est un candidat socialiste qui les porte, en se présentant comme issu de l’aile gauche de son parti. Hamon est probablement de bonne foi et peut-être n’a-t-il tout simplement pas vu qu’en vidant le travail de l’organisation de la sécurité sociale, il écartait encore un peu plus le prolétariat du destin glorieux que lui promettait, à une époque, le Parti Socialiste.

Nier le recul du droit des femmes dans les banlieues…

Le week-end a manifestement porté de nombreux conseils réactionnaires à Benoît Hamon ne lui donnant l’occasion d’entamer une véritable oeuvre de banalisation des comportements machistes et sexistes dans les milieux islamistes. Il est toujours très cocasse de voir des responsables de “gôche” réaliser une grande synthèse coupable entre leurs principes proclamés coeur sur la main et des réalités bien plus sordides.

L’histoire est pourtant simple à comprendre. L’immigration a conduit à constituer des banlieues à forte population étrangère. Depuis plusieurs décennies, la gauche au sens large a abandonné ce prolétariat contemporain. Les islamistes ont occupé la chaise vide. Les élus de gauche nouent, par tous les moyens possibles, des alliances plus ou moins visibles avec eux afin de conserver leur siège.

D’un côté, donc, on fait profession de lutte égalitaire, de défense du droit des femmes, etc. De l’autre, on pactise avec le diable pour sauver son fauteuil, en niant les évidences.

Et si ça se trouve, la stratégie de Hamon sera payante à la primaire…

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