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La France, "la seconde patrie" de Churchill, et fief de son vieil ami et "insupportable allié" Charles de Gaulle
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Bonnes feuilles

Il voulait être député parce que son père l'avait été, Premier ministre parce que son père n'avait pu l'être, militaire parce qu'il croyait en son génie stratégique, et journaliste parce que dans l'Angleterre victorienne, un officier était mal rémunéré et un député ne l'était pas du tout. Incapable de choisir entre ces quatre carrières, il les exercera toutes, consécutivement ou simultanément, durant soixante longues années. Extrait de "Churchill", de François Kersaudy ,aux Editions Perrin (2/2).

François Kersaudy

François Kersaudy

Le professeur François Kersaudy, historien polyglotte et biographe de Churchill, Goering et Mountbatten, est aussi l’auteur du seul ouvrage au monde sur les relations entre De Gaulle et Churchill (Perrin). Dans la collection "Maîtres de Guerre", il a également écrit Hitler, Staline et MacArthur.

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Au cours des mois qui suivent, ceux qui prenaient Winston Churchill pour un vieillard sénile en seront encore pour leurs frais. N’est-ce pas lui que la reine va consulter avant de nommer Harold Macmillan Premier ministre le 10 janvier 1957 ? Et combien d’observateurs chevronnés pouvaient écrire a la meme époque, apres avoir lu LeDocteur Jivago, de Pasternak : « C’est un pas dans la bonne direction, que nous devrions observer avec attention » ? Combien d’autres sujets de Sa Majesté auraient misé sur le général de Gaulle au début de 1958 pour résoudre le conflit algérien et rendre a la France sa grandeur d’antan ? Au lendemain du 13 mai 1958, il dira à lord Moran : « De Gaulle a une occasion unique ; il a pris le dessus. Ils se sont tous soumis a lui. Voila qui pourrait permettre de faire le ménage dans la politique française ! » Si Churchill s’intéresse de si près à la France, c’est qu’elle est devenue pratiquement une seconde patrie.

Des septembre 1955, il a débarqué sur la Côte d’Azur, et depuis lors, il passe de longs mois dans la villa « La Capponcina » de lord Beaverbrook au cap d’Ail, à « La Zoraide » de Daisy Fellowes au cap Martin, ou à « La Pausa » de Roquebrune, où demeure son agent littéraire Emery Reves. Entre les séances de peinture, d’écriture, de lecture et de farniente, il pourra s’entretenir avec bien des personnalités excentriques, célebres ou controversées. Outre les vieilles connaissances comme les Windsor, R. A. Butler, Paul Reynaud, le maréchal Montgomery et l’amiral Mountbatten, on verra se succéder à « La Pausa » le couturier Molyneux, Greta Garbo, Joseph Kennedy, Somerset Maugham, Stávros Niárchos, le prince Rainier et la princesse Grace, Noël Coward, lord Derby, Aristote Onassis, le président René Coty et le chancelier Adenauer.

La vieillesse étant moins pénible au soleil, ses séjours en Grande-Bretagne se font brefs et trépidants: dans un minimum de temps, il doit présider des inaugurations, etre présent aux grandes cérémonies commémoratives, participer aux votes importants a la Chambre, dîner au Palais, passer quelques soirées a son club, s’entretenir avec Macmillan, Nixon ou Ben Gourion, et prononcer des discours à Woodford en prévision des élections législatives à venir. Et avant de repartir pour le soleil, il lui faudra encore faire un détour par Paris, afin de recevoir la croix de la Libération des mains de son vieil ami et insupportable allié Charles de Gaulle, dernier président du Conseil de la IVe République. C’est à l’hôtel Matignon, le 6 novembre 1958, que se déroule cette cérémonie émouvante ; en présence de tous les compagnons de la Libération, le général de Gaulle décore le lutteur implacable, l’illustre homme d’État et le fidèle ami de la France. « Je tiens a ce que sir Winston Churchill sache ceci, déclare le Général au cours d’une courte allocution ; la cérémonie d’aujourd’hui signifie que la France sait ce qu’elle lui doit. Je tiens à ce qu’il sache ceci : celui qui vient d’avoir l’honneur de le décorer l’estime et l’admire plus que jamais. »

Sur la Côte d’Azur, Churchill est devenu un habitué des réceptions et des dîners privés organisés par l’armateur Onassis à bord du Christina. Ce gigantesque yacht effilé de 100 metres de long est une ancienne frégate d’escorte canadienne, reconvertie cinq ans plus tôt en palace flottant avec piscine, hydravion, cinéma, et meme un bloc opératoire complet… A son bord, Churchill participe avec son épouse à plusieurs croisières, la premiere en 1958 le long des côtes espagnoles, la deuxieme au Maroc et aux Canaries, la troisieme à l’été de 1959 en mer Égée, la quatrieme aux Antilles en avril 1960 et la cinquieme dans l’Adriatique trois mois plus tard. Ces croisières sont un émerveillement : on y visite bien des lieux chargés d’histoire, depuis Épidaure jusqu’aux Dardanelles, et Churchill s’entretient durant les escales avec les Premiers ministres de Grece et de Turquie, avec le patriarche Athenagoras et même avec un maréchal Tito redevenu fréquentable.

Extrait de Churchill de François Kersaudy, aux Editions Perrin.

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