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17h de travail par jour, cigares Corona et whisky soda... comment Winston Churchill a prouvé sa fureur de vaincre lors de la Première Guerre mondiale
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Bonnes feuilles

Il voulait être député parce que son père l'avait été, Premier ministre parce que son père n'avait pu l'être, militaire parce qu'il croyait en son génie stratégique, et journaliste parce que dans l'Angleterre victorienne, un officier était mal rémunéré et un député ne l'était pas du tout. Incapable de choisir entre ces quatre carrières, il les exercera toutes, consécutivement ou simultanément, durant soixante longues années. Extrait de Churchill, de François Kersaudy, aux Editions Perrin (1/2).

François Kersaudy

François Kersaudy

Le professeur François Kersaudy, historien polyglotte et biographe de Churchill, Goering et Mountbatten, est aussi l’auteur du seul ouvrage au monde sur les relations entre De Gaulle et Churchill (Perrin). Dans la collection "Maîtres de Guerre", il a également écrit Hitler, Staline et MacArthur.

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C’est avec un effarement certain que les ministres de Sa Majesté considèrent les méthodes de travail de leur remuant collègue ; car Churchill est maintenant à l’ouvrage de 8 heures à 2 heures du matin, avec une heure de sieste dans l’après-midi (un souvenir de Cuba). Naturellement, ses aides de camp, assistants et secrétaires sont censés l’imiter – sieste en moins –, ce qui a pour effet de les user prématurément.

Le matin, Churchill dicte un flot de lettres et de mémorandums depuis son lit ou sa baignoire, en fumant un gros cigare Corona (encore un souvenir de Cuba) et en buvant sans cesse du whisky and soda – une habitude contractée en Inde. Mais à l’évidence, la quantité de travail abattue est largement proportionnelle aux litres d’alcool ingurgités : en trois jours, les quarante kilomètres de la Manche entre Douvres et Calais ont été protégés de toute incursion navale allemande par des champs de mines ; en moins de deux semaines, 120 000 hommes du corps expéditionnaire britannique, commandé par le maréchal French, font la traversée sans la moindre perte ; dès le 12 août, les ports allemands de la mer du Nord sont soumis à un blocus étroit ; au même moment, des unités navales britanniques patrouillent sur toute l’étendue de mer entre l’Écosse et la Norvège, tandis qu’aux quatre coins du globe, des escadres de croiseurs poursuivent les navires allemands, avec ordre de couler à vue tous ceux qui refusent de se rendre ; c’est également à la Royal Navy qu’il incombe de convoyer vers la métropole les corps d’armée canadiens, australiens et néo-zélandais, ainsi que cinq divisions indiennes, en déjouant toutes les tentatives allemandes pour les intercepter… Enfin, Winston, toujours fasciné par le secret et l’espionnage, a fait installer dans la « Room 40 » de l’Amirauté un service d’interception et de décryptage des signaux de la marine impériale allemande, qui va se révéler redoutablement efficace.

Sur une énorme carte installée dans son bureau et constamment mise à jour, le Premier lord de l’Amirauté suit heure par heure le déroulement de tous les mouvements navals, et son esprit résolument offensif lui fait concevoir d’emblée des projets d’envergure : une occupation de l’île hollandaise d’Ameland, que l’on utiliserait comme base navale et aérienne pour une offensive contre l’Allemagne ; un blocus des Dardanelles, afin d’intercepter les navires allemands réfugiés dans les eaux territoriales turques ; un plan visant à forcer les détroits danois avec l’aide de 250 000 soldats grecs, pour convoyer des troupes russes vers la côte allemande près de Berlin. Tout cela peut sembler assez brouillon, mais contrairement à son illustre ancêtre Marlborough, Winston Churchill est un stratège impatient…

Une fois encore, sa fureur de vaincre au milieu de la bataille est telle qu’il lui faut s’occuper de tout – y compris bien sûr de ce qui ne le regarde pas : c’est ainsi que l’Amirauté va entreprendre la construction d’obusiers mobiles de 15 pouces, sous la supervision constante de son Premier lord ; celui-ci fera également recruter des milliers de volontaires pour créer une Royal Naval Division capable de participer aux opérations terrestres ; et le corps aérien dont il a doté la marine deux ans plus tôt, il va l’engager sans retard pour défendre l’île et chasser les sous-marins en mer du Nord. Il envoie donc immédiatement à Dunkerque trois escadrilles chargées d’intercepter tout avion ou zeppelin allemand qui menacerait les côtes anglaises, mais aussi d’aller bombarder les hangars de zeppelins de Cologne, Düsseldorf et Friedrichshafen… Et puis, pour protéger la base aérienne de Dunkerque des raids de uhlans, Churchill fait acheter par l’aéronavale toutes les Rolls-Royce du royaume, qui seront blindées sommairement, transformées en automitrailleuses et expédiées à Dunkerque. Elles y feront un excellent travail, jusqu’au jour où les Allemands s’aviseront de couper les routes par des tranchées, afin de leur interdire toute progression. Cette parade va immédiatement remettre en mouvement l’imagination fertile du Premier lord, qui demande à ses services de concevoir un véhicule blindé capable de contourner les routes et de franchir les tranchées. Voilà qui aboutira six mois plus tard à la mise au point d’un « landship » (vaisseau de terre), promis à un brillant avenir sous le nom de "tank"

Extrait de "Churchill" de François Kersaudy, aux Editions Perrin.

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