Le jeu des 7 différences entre le Front national et Jean-Luc Mélenchon (mais surtout celui des 99 ressemblances...)<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Front national tente de ratisser un peu partout, là où il y a du mécontentement populaire qui, il est vrai, est largement répandu aujourd'hui en France, pour des raisons à la fois concrètes mais aussi pour des raisons fantasmées.
Le Front national tente de ratisser un peu partout, là où il y a du mécontentement populaire qui, il est vrai, est largement répandu aujourd'hui en France, pour des raisons à la fois concrètes mais aussi pour des raisons fantasmées.
©AFP

Qui se ressemble...

Bien qu'il s'en soit toujours défendu, Jean-Luc Mélenchon partage un certain nombre de similitudes avec le Front national. Ses dernières positions sur l'immigration n'ont fait que parachever un certain rapprochement idéologique, au moins partiel.

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet, ancien Président de l’Observatoire de l’extrémisme, est chroniqueur, directeur de la Revue Civique et initiateur de l’Observatoire de la démocratie (avec l’institut Viavoice) et, depuis début 2020, président de l’institut Marc Sangnier (think tank sur les enjeux de la démocratie). Son compte Twitter : @JP_Moinet.

 

 

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Atlantico : Les dernières positions de Jean-Luc Mélenchon sur l'immigration ont crispé la gauche et la gauche radicale : le leader de la France insoumise s'est notamment opposé à l'accueil de réfugiés en France. De telles positions ne rapprochent-elles pas le Front national et Jean-Luc Mélenchon ? Quels sont, aujourd'hui, les points les plus évidents ?

Jean-Philippe Moinet : En tout état de cause, des parallèles peuvent exister entre le national-populisme de la gauche radicale, que représente Jean-Luc Mélenchon, et le national-populisme de droite extrême, que porte Marine Le Pen. Tous deux jouent et sur-jouent "le peuple contre les élites mondialisées", la révolte populaire contre "le système", notamment institutionnel et financier, contre "l'Europe de Bruxelles" aussi qui sert de bouc-émissaire facile à des insatisfactions françaises très instrumentalisées. Tous deux se concurrencent pour incarner l'expression de la "fonction tribunicienne" qui, autrefois, incombait au Parti communiste. Le PC n'est plus, son idéologie s'est effondrée avec la chute du Mur de Berlin mais, notamment dans les régions où la désindustrialisation est à l'œuvre depuis plus d'une trentaine d'années, comme le Nord-Pas-de-Calais ou la Lorraine, les deux forces, mélenchonistes et lepénistes, sont en concurrence directe pour représenter des classes ouvrières et populaires qui doivent, parfois dans les difficultés et la douleur, s'adapter aux effets de la mondialisation et des reconversions qu'elle entraîne.

La grande différence est que la xénophobie est ajoutée, à l'extrême-droite, au carburant électoral populiste. Mélenchon, comme le PC de Marchais, peut être tenté de faire du protectionnisme national pour "le travail et les travailleurs français" (contre les étrangers), la xénophobie peut se retrouver à gauche aussi mais, idéologiquement, c'est l'extrême-droite qui, historiquement et actuellement, en fait la plus grande exploitation. C'est à la fois une constante du FN, et le cœur, plus ou moins assumé, de son logiciel discursif et programmatique.

À l'aide, notamment, de Florian Phillipot, le FN a su aspirer une partie conséquente de l'électorat communiste et de la gauche radicale, vivier de Jean-Luc Mélenchon. Leurs électorats respectifs sont-ils toujours aussi poreux ? Qu'est-ce que cela traduit de la proximité idéologique des deux fronts ?

Le Front national tente de ratisser un peu partout, là où il y a du mécontentement populaire qui, il est vrai, est largement répandu aujourd'hui en France, pour des raisons à la fois concrètes mais aussi pour des raisons fantasmées. L'impression de la "décadence" et du "déclin" est l'un des vecteurs du FN aussi, qu'on ne retrouve pas doctrinalement conçu et élaboré au Front de gauche. Dans certaines zones géographiques, FN et Front de gauche peuvent être en confrontation directe pour "canaliser" les couches populaires, mais dans d'autres régions, ils sont dans des secteurs très séparés ou distincts. Le parti lepéniste ratisse plus large, il cherche à exploiter toute une série de peurs, de l'étranger, de l'islam, de la mondialisation des échanges, du déclassement social, des bouleversements culturels et sociétaux. La palette des phobies exploitées semble bien moins large chez Mélenchon.

Tout au long de la campagne présidentielle de 2012, le candidat du Front de Gauche s'est acharné à démentir les déclarations de journalistes, lui reprochant de surfer sur la même vague de populisme que Marine Le Pen. Quelles sont effectivement les différences qu'il convient encore de noter et qui continuent à séparer Mélenchon du Front national ?

Leur populisme a des similitudes sans être idéologiquement et politiquement identique. Le style robespierriste de Mélenchon ne se retrouve pas exactement dans la verve lepéniste, qui ne puise pas dans la même tradition, ni dans le même imaginaire. On peut noter une similitude, en revanche, dans cette tendance commune  à Jean-Luc Mélenchon et à Marine Le Pen d'invoquer le peuple quand ça les arrange mais pas pour désigner le candidat de leur mouvement à l'élection présidentielle. Ils sont même  les champions de la candidature providentielle autoproclamée ! Pas question de primaires, ni au Front de gauche, ni au Front national : Mélenchon et Le Pen invoquent souvent la démocratie directe, la "souveraineté du peuple" mais tout cela reste opérationnel... dans les discours, très peu dans les actes. Ils prennent tous deux bien garde à ne pas appliquer les règles démocratiques pour organiser une sélection de candidats à un processus de primaires ouvertes. Leur tendance est comparable dans une forme d'autocratisme dans l'exercice du pouvoir. Les derniers épisodes qui, devant les tribunaux, ont opposé Marine Le Pen et Jean-Marie Le Pen montrent que l'usage de la démocratie interne n'est pas le point fort, c'est un euphémisme, du FN. Cette conception du verrouillage partisan se retrouve aussi dans le mouvement de Jean-Luc Mélenchon.

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