Amateur de grosses cylindrées mais fin connaisseur des arts, faux dilettante mais vrai intello : Georges Pompidou ou l'histoire d'un président hors norme<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Amateur de grosses cylindrées mais fin connaisseur des arts, faux dilettante mais vrai intello : Georges Pompidou ou l'histoire d'un président hors norme
©wikipédia

Bonnes feuilles

Tour à tour agrégé de littérature, professeur dans un lycée à Marseille, collaborateur du Général de Gaulle, conseiller d'État, banquier d'affaires, Premier ministre, essayiste, spécialiste de poésie, baudelairien, amateur d'art moderne et deuxième président de la République Française, Pompidou a eu un parcours hors norme. Ses douze années passées à exercer le pouvoir coïncident avec la plus grande période de modernisation que la France ait jamais connue. Extrait de "Pompidou, le dernier Président qui a fait gagner la France" de Michael Miguères, publié aux Editions Ramsay (2/2).

Michael Migueres

Michael Migueres

Michael Migueres est Secrétaire national des Républicains.

Voir la bio »

Une envie de vivre par-dessus tout     

Sa manière d’aimer l’art, le luxe, les beaux objets, conduire une Porsche ou fumer un cigare comme on fume une cigarette rend son esthétisme abordable. Il aime les belles choses pour ce qu’elles sont et non pour le statut qu’elles octroient à celui qui les possède. Il ne met aucun affect dans son amour pour l’art et ne se soucie pas du regard des autres. Son rapport à l’argent aussi était simple, sans affect particulier. Il confia à l’un de ses amis, alors qu’il gagnait bien sa vie en tant que dirigeant de la banque Rothschild :              

« Je retrouve aussi, avec laisance matérielle, une impression de liberté extraordinaire pour qui naime pas largent: la possibilité daider largement autour de soi et de faire un peu de bien. Si Suzanne (la femme de son correspondant), qui continue, je pense, à soccuper d’œuvres sociales, a des cas particuliers très tragiques pour lesquels on puisse laider, je suis toujours prêt à le faire. Il faut bien que ce que je gagne serve. Comprends bien que je suis sorti des préoccupations dargent, sans pour autant, chercher à me constituer un « portefeuille » dont je ne saurais vraiment pas que faire. »     

Ce sont ses qualités humaines, cet air d’esthète et de dilettante doublé d’une intelligence et de malice qui durent probablement lui ouvrir les sympathies et la curiosité des artistes ainsi que des intellectuels. Il fréquente alors les milieux culturels et artistiques, et devientmême l’ami personnel d’André Malraux.Ses éminentes fonctions dans le monde des affaires ne l’ont pas empêchépour autant  de vivre une vie de couple normale et épanouie faite de sorties, de dîners et de rencontres. Sa vie familiale avec leur enfant n’est pas non plus délaissée et il se consacre tous les week-ends pleinement à eux dans la propriété familiale d’Orvilliers. Vivre, et vivre pleinement, intensément a étépour lui l’un des véritables buts de son existence. A la fois ami de Malraux donc, amateur de Saint-Tropez, des arts, de la poésie et du luxe, sa curiosité et son intellect ne sont soumis à aucun a priori. Ils faisaient de lui un esprit qui reste libre.

"Au fond, l'art est toujours une remise en question des choses. L'art doit discuter, doit contester, doit protester."

L’art demeura chez Pompidou un sujet d’intérêt et de curiosité majeur.A un journaliste qui soulignait le paradoxe de l'amateur d'art qui aime la contestation et de l'homme d'Etat qui aime l'ordre, Georges Pompidou répondit qu'il n'était pas mécontent qu'il y ait de la contestation et qu’il trouvait même que la contestation était une bonne chose mais que celle-ci devait être limitée dans ses conséquences même si c’est par la contestation et le dialogue que se fait le monde.L’acceptation d’une certaine contestation décida Georges Pompidou à la construction du Centre national d'art et de culture sur le plateau de Beaubourg, l’actuel Centre Georges Pompidou.

Les réactions furent vives, violentes et même outrancières. Mais le Président Pompidou, fin connaisseur des arts et de l’urbanisme savait qu’il y avait à chaque époque des constructions nouvelles, des créations selon des styles différents, selon les sensibilités et les capacités des architectes contemporains. Dans le fond, pourquoi Paris aurait-elle dû se priver des nouvelles capacités permises par les progrès techniques. D’ailleurs, même si les protestations furent nombreuses à l’époque contre sa construction, qui souhaiterait aujourd’hui la destruction du Centre Pompidou ? Pris entre un présent qui ne le comprend pas et un futur qu’il devine, le visionnaire doit parfois se sentir bien seul. Amoureux de la Renaissance, il savait à quel point l’art était lié aux sciences, à quel point les avancées dans les techniques artistiques, à l’image de l’utilisation qu’en faisait Léonard de Vinci, permettaient des avancées scientifiques. Il était passionné par le lien inextricable entre l’art et l’industrie.

L’art, qui permet par les sciences l’avènement d’une société industrielle et mécanisée, qui engendre en retour des œuvres abstraites et critiques de cette société nouvelle. De tous les types d’arts celui qui le fascine le plus était l’art contemporain que Claude et quelques amis lui font découvrir. Il exerce sur Georges Pompidou un attrait particulier.Il y voyait l’expression de l’incertitude de l’époque nouvelle sur les hommes. Quel paradoxe cela peut-il sembler de voir un dirigeant si attaché à l’ordre et à l’industrialisation de son pays, admirer autant l’art contemporain ? En réalité, c’est là que réside la supériorité intellectuelle et d’esprit qui amène Georges Pompidou à épouser autant la modernité.

C’est dans sa relation à l’art que s’apprécie toute la dimension de l’homme en plus de celle de l’homme d’Etat. Sans doute, le petit-fils de paysan, l’étudiant en lettres n’était-il pas plus programmé pour faire de la politique qu’il ne l’était pour apprécier l’art ou l’urbanisme. Mais le dirigeant soucieux de voir son pays concilier ses traditions avec les exigences contemporaines considérait que l’art et l’urbanisme contemporain faisaient partie du même mouvement qui transformait de la France. L’art et l’urbanisme ne pouvaient rester figés dans le passé, mais tout au contraire être renouvelés sans cesse par l’imagination des hommes et les moyens dont ils disposent. C’est la même vision de la modernité dans l’entreprise, dans l’industrie ou dans l’art : que les hommes créent, innovent, inventent, en un mot : progressent,  grâce à leur environnement et à ce qu’ils ont en capacité propre. Dans une interview exceptionnelle d’intensité et de profondeur, il répondit au journal LeMonde qui le questionnait sur l’art contemporain avec sa vision empreinte de culture que d’anticipation de l’avenir:             

« Si l’art contemporain me touche, c’est à cause de cette recherche crispée et fascinante du nouveau et de l’inconnu. Comment ne citerais-je pas Apollinaire ?            

Soyez indulgents quand vous nous comparez          
A ceux qui furent la perfection de l'ordre            
Nous qui quêtons partout l'aventure…
Pitié pour nous qui combattons toujours aux frontières             
De l'illimité et de l'avenir              
Pitié pour nos erreurs pitié pour nos péchés

Extrait de "Pompidou, le dernier Président qui a fait gagner la France" de Michael Miguères aux éditions Ramsay.


En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !