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Dernière photo de fin de campagne : François Fillon en tête des souhaits de victoire pour les sympathisants de la droite et du centre devant Alain Juppé et Nicolas Sarkozy (mais le maire de Bordeaux mène en termes de pronostics)
©Joël SAGET Kenzo TRIBOUILLARD Martin BUREAU Lionel BONAVENTURE / AFP

Cheeeeeese !

A la veille du premier tour de la primaire de la droite, le scrutin n'a jamais été aussi serré. François Fillon semble avoir réussi à briser la dynamique de duel dans laquelle Alain Juppé et Nicolas Sarkozy s'étaient enfermés.

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud est professeur de sciences politiques à l’Institut d’études politiques de Grenoble depuis 1999. Il est spécialiste à la fois de la vie politique italienne, et de la vie politique européenne, en particulier sous l’angle des partis.

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Jean-Daniel Lévy

Jean-Daniel Lévy

Jean-Daniel Lévy est directeur du département politique & opinion d'Harris Interactive.

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Atlantico : Comment expliquer le décalage entre le souhait de certains électeurs et leurs prédictions ? Lequel de ces critères vous semble le plus fiable : le souhait ou la prédiction ?

Christophe Bouillaud : Il me semble que ces décalages sont liés au fait que les électeurs eux-mêmes sont des lecteurs de sondage et des lecteurs de la presse. Ces sondages enregistrent donc le fait qu'Alain Juppé a été pressenti comme le candidat qui avait le plus de chances de gagner et que jusqu'il y a peu, François Fillon n'était pas considéré comme un candidat potentiel à l'investiture. Il y a donc un très fort effet de circularité. A mon avis, il faut évidemment se référer au souhait de victoire et le vote qu'on prétend devoir faire si l'on dit être sûr d'aller voter. C'est pour moi l'élément qui sera le vrai test. Les électeurs ne sont pas influencés par les sondages, mais ils en tiennent compte. Il peut y avoir des effets de boule de neige, mais je suis réticent aux théories qui disent que les sondages font l'opinion.Ce n'est pas un hasard que ce soit un ancien président et deux anciens Premier ministres qui soient au coude à coude aujourd'hui, face à des candidats qui ont moins d'expérience politique.

On se trouve dans un contexte où la question de la légitimité et de l'expérience comptent vraiment plus qu'ailleurs.

>>>> A lire aussi : Un deuxième tour Sarkozy Fillon : ce qui serait la plus grosse surprise de toutes est-il un scénario possible ?

Jean-Daniel Lévy : Aucun des deux ! L'indicateur qui est le plus intéressant est peut-être le souhait, parce qu'il dénote d'une forme d'indication personnelle. Mais on sait qu'il peut y avoir une différence entre l'implication et le comportement électoral au final avec une nette différence. Et ce parce que dire qu'on souhaite que quelqu'un l'emporte, dire vouloir voter pour quelqu'un et voter effectivement pour quelqu'un sont trois comportements effectivement très différents. Mais cela reste plus impliquant que le fait d'être un pronostiqueur, parce que cela demande de se placer à l'extérieur du débat, et encore plus en matière de comportementS électoraux. Mais les pronostics montrent comment se structurent les dynamiques, qui peuvent être des dynamiques en pour ou en contre. Pronostiquer la victoire de François Fillon ou d'Alain Juppé participe de mouvements internes qui viennent contrer les postures de favoris ou d'outsiderS. Ce qu'est François Fillon aujourd'hui est ce qu'était Alain Juppé hier.

François Fillon est en tête chez les sympathisants de droite et du centre dans ce sondage en matière de souhait, mais est derrière Alain Juppé en termes de pronostics. Dans quelle mesure le décalage entre le souhait et le pronostic est-il biaisé ?

Christophe Bouillaud : Au sens de la technique du sondage, il n'y a pas de biais. La vraie question, c'est celle de la pertinence de ce genre de sondage sur ce genre d'événements inédits en France et inédit surtout à droite et au centre. Je pense que tous ces sondages sont des prototypes, et nul ne sait à quel point ces prototypes sont fiables. On le verra au soir du premier tour. Il me semble qu'un certain nombre de sondeurs, y compris ceux qui ont fait le grand sondage du Cevipof, sont extrêmement attentifs au fait que c'est un prototype et qu'on manque de référence. La question des échantillons est plus importante dans cette élection. Les incertitudes sont très grandes.

Dans la Ve République, une telle situation a-t-elle déjà eu lieu ? Comment cela s'était-il passé alors ? 

Christophe Bouillaud : S'il y avait effectivement une telle mobilité, ce serait très étonnant, et ce serait la première fois qu'on aurait une campagne aussi dynamique avec des candidats qui s'envolent et d'autres qui s'écroulent, à commencer par Bruno Le Maire qui, selon les sondages, s'est littéralement écroulé. C'est assez rare dans les annales de la Ve République. Au niveau national, la base électorale est très bien identifiée, les candidats ont une capacité à mobiliser définie en fonction de leur parti ou de leur mouvance qui est assez bien définie.

De plus, la mobilité forte de l'électorat s'explique par le fait que les grands candidats sont tous idéologiquement très proches. A part NKM et Poisson, tous les candidats sont presque sur la même ligne sur le point de vue économique et sécuritaire, les deux domaines les plus importants. Ils se distinguent sur des détails, par exemple en politique étrangère, avec la question du statut de la Russie. Ce genre de choses généralement mobilisent très peu les électeurs. Reste alors la capacité d'un candidat à crever l'écran ou non.

L'hésitation peut être, dans ce cas de figure, beaucoup plus grande. Ce qui est intéressant, c'est qu'un candidat a dit dans le débat, en l’occurrence Poisson, que les autres disent tous la même chose. Et Copé a dit qu'ils disaient tous une même chose qu'ils auraient dû faire en 2007. On a deux candidats qui dénoncent cela, ce qui est assez inédit. Dans les élections nationales, la diversité des sensibilités est toujours assez importante. A la primaire de la gauche, les oppositions étaient plus fortes. Il y avait un candidat à la droite de la gauche, Valls, un à la gauche de la gauche, Montebourg, et une différence nette entre Hollande et Aubry. C'était plus proche entre Royale et Hollande. Dans l'ensemble, c'était plus hétéroclite. Dans ce débat à droite, il manque des positions non européistes telles que celles de Nicolas Dupont-Aignan, Henry Guaino ou Hervé Mariton. Cette primaire est idéologiquement petite et restreinte. Un peu, toutes choses égales par ailleurs, comme la primaire des Verts. D'où la possibilité d'une surprise. L'institut de sondage qui engage sa responsabilité sur la troisième place de Sarkozy prend un gros risque, à mon avis !

Une double bataille semble se dessiner, entre candidat forts (Juppé, Fillon et Sarkozy) et petits candidats certains de perdre (Le Maire, NKM, Poisson, Copé). A quelques jours du scrutin, qui semble l'avoir emporté à son échelle ?

Jean-Daniel Lévy : Quand on regarde ces enquêtes,  on voit que Bruno Le Maire a clairement perdu son pari. Au départ il était capable de titiller les favoris, ce à quoi il ne peut plus prétendre aujourd'hui.  A rebours de Nathalie Kosciusko-Morizet qui a réussi sa remontée. Elle est considérée comme un peu plus convaincante que Bruno Le Maire dans plusieurs sondages. Elle suit une dynamique positive.



François Fillon est celui qui a gagné le plus de points dans ce débat (même s'il faut bien avoir conscience que gagner un débat n'est jamais gagner une élection). Il a adressé hier des messages clairs à une partie de l'électorat catholique sur des thèmes qui pouvaient être sensibles. Ce qui est certain, c'est que Nicolas Sarkozy a également adressé un message fort sur la question de l'Europe et la France, parce que c'est en anti-Hollande qu'il se présentait.

Alain Juppé a été un peu plus actif, mais n'a pas marqué les esprits par ses propos alors qu'il était un peu aculé.

Quels ont été les mots forts de ce débat selon vous ? Qu'est ce que cela donne comme indication pour cette primaire ? Et pour la suite de la campagne présidentielle ?

Jean-Daniel Lévy : Le mot "fonctionnaire", très clairement, a été le mot de la soirée. François Fillon a eu cette capacité à voir la façon dont la droite est concernée par cette question. La droite est fâchée contre les fonctionnaires et il a su sentir cela. Le second moment, c'est celui pendant lequel il s'est emporté et s'en est pris à David Pujadas quant au déroulement spectaculaire du débat.

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