Voter par adhésion à un candidat ou pour en éliminer un : une victoire surprise de N. Sarkozy pourrait-elle résulter de l’écart entre participation auto-déclarée dans les sondages et participation réelle ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Il n’est pas exclu qu’une mobilisation différentielle des électorats des différents candidats permette à N. Sarkozy d’être en tête de la primaire, en particulier à l’issue du premier tour.
Il n’est pas exclu qu’une mobilisation différentielle des électorats des différents candidats permette à N. Sarkozy d’être en tête de la primaire, en particulier à l’issue du premier tour.
©Valery HACHE / AFP

Surprise sur prise

Alain Juppé est quasi systématiquement donné gagnant de la primaire de la droite et du centre. Pour autant, ce scrutin repose sur la capacité des candidats à mobiliser leur électorat... or il n'est pas impossible que la participation ait été surestimée.

Sylvain Brouard

Sylvain Brouard

Sylvain Brouard est chargé de recherche de la Fondation nationale des sciences politiques au Cevipof.

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Sondage après sondage, Alain Juppé arrive en tête au premier tour de la primaire de la droite et du centre puis gagnant au second tour de celle-ci. Ces résultats s’appuient sur l’auto-déclaration de la probabilité (entre 0 et 10) de participer à la primaire, que tous les instituts de sondage présentent comme surestimée. Dans quelle mesure une victoire surprise de N. Sarkozy pourrait-elle résulter de l’écart entre participation auto-déclarée et participation réelle ? Pour tenter de répondre à cette question, à partir de l’enquête électorale menée par le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) et réalisée par Ipsos-Sopra Steria, les résultats de la primaire vont être simulés en fonction des logiques qui peuvent déterminer la participation à celle-ci. 


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Pour appréhender les effets de la variation potentielle de la participation à la primaire, la première hypothèse est que la probabilité de participer à la primaire dépend en premier lieu de l’intensité du soutien dont bénéficient les différents candidats. Si l’on considère que, parmi les répondants dont la probabilité de participer à la primaire est maximale, seuls les répondants appréciant beaucoup chacun des candidats participent à celles-ci, la participation s’élève à 4,5%. A. Juppé recueille 30,1% des intentions de vote au premier tour alors que N. Sarkozy atteint 37,9 % de celles-ci. Si l’on élargit la part des électeurs de la primaire concernés (en incluant ceux dont la probabilité déclarée de participer à la primaire est sous le niveau maximum), l’ancien président reste dans tous les cas en tête au premier tour avec une différence minimale de 6 points pour une participation de 7,5% (Graphique 1). Par conséquent, si la participation à la primaire devait concerner exclusivement ceux qui apprécient beaucoup les candidats en compétition, l’ex-président de la République a plus de 99% de chances de précéder A. Juppé, au premier tour, compte tenu l’écart entre les deux candidats, de la taille de l’échantillon et de l’erreur probable d’échantillonnage. Au second tour (Graphique 2), A. Juppé serait aussi systématiquement battu par N. Sarkozy avec un score entre 52 et 54 % (et plus de 98% de chances de victoire). 


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Néanmoins, il est plausible qu’une logique inverse soit également à l’œuvre : la participation à la primaire peut aussi dépendre de l’intensité de la défiance dont pâtissent les différents candidats. Dans l’hypothèse où les répondants appréciant le moins chacun les candidats participent également à la primaire, le niveau de participation atteint, au minimum, 6% et N. Sarkozy apparaît comme le principal perdant avec entre 30 et 33% des intentions de vote aux premier tour, selon le niveau de participation, contre autour de 35% pour A. Juppé. N. Sarkozy ne conserve au mieux qu’une chance sur 3 d’être en tête au premier tour (dans l’hypothèse d’une participation de 6%). En revanche il est systématiquement devancé par A. Juppé au second tour, avec moins de 5% de chances de l’emporter.

Par conséquent, il n’est pas exclu qu’une mobilisation différentielle des électorats des différents candidats permette à N. Sarkozy d’être en tête de la primaire, en particulier à l’issue du premier tour. Toutefois, ces simulations soulignent aussi que l’issue de la primaire sera déterminée par la part respective, dans la participation, des logiques d’adhésion aux candidats ou de rejet de ceux-ci. 

Les jeux ne sont donc pas faits. En outre les sondages d’intentions de vote présidentielles présentent historiquement, en France, un écart moyen de prédiction compris entre 4,5 points (200 jours avant l’élection) et 1,5 points (le jour même de l’élection) et ce malgré des échantillons consistants et une expérience avérée ayant permis de calibrer les méthodologies. Or, il n’en est pas de même pour les primaires en France où la seule expérience passée concernait le Parti socialiste et où le nombre de personnes interrogées est souvent faible. En outre, même aux Etats-Unis où les primaires sont une institution, Nate Silver a mis en évidence que la moyenne des erreurs des sondages pour ce type d’élection représente le double de celle constatée pour les élections présidentielles, déjà loin d’être anodine comme l’a spectaculairement montré l’élection de D. Trump, et est particulièrement élevée : autour de 8 points pour les seuls sondages ayant eu lieu dans les 3 semaines précédant le vote. Prudence donc !

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