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La marquise de Pompadour, maîtresse de Louis XV qui lui fit découvrir les plaisirs et les agréments d’une liaison bourgeoise
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Bonnes feuilles

Depuis le XVIIe siècle, le secret diplomatique a souvent été secret d'alcôves avec un s et "valise diplomatique" a rimé plus d'une fois avec "vanity-case": des nièces de Mazarin aux "gaullistes queutards", en passant par les maîtresses royales et les ambassadeurs-étalons, on a beaucoup couché (ou tenté de coucher) pour maintenir la grandeur de la France, et jamais la petite histoire n'a aussi bien expliqué la grande. Extrait de "Une histoire érotique de la diplomatie", de Nicolas Mietton, aux éditions Payot

Nicolas  Mietton

Nicolas Mietton

Nicolas Mietton, historien, est féru de Mémoires et autres Journaux. Il a notamment établi l'édition critique du Journal de Maurice Paléologue, qui fut ambassadeur de France en Russie, de 1914 à 1917. 

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La fin de la guerre de Succession de Pologne avait été une humiliation pour l’empereur Charles VI. Celui-ci, pauvre valétudinaire sans héritier mâle, se préoccupa de sa propre succession, qu’il régla selon une Pragmatique Sanction qui stipulait que la Bohême, la Hongrie et les domaines héréditaires de la Maison de Habsbourg reviendraient à sa fille Marie-Thérèse. Le mari de cette dernière, François de Lorraine, recevrait la couronne impériale.

Charles VI passa ses dernières années à faire valider cette disposition par les puissances européennes, mais il ne fallait pas être grand clerc pour deviner qu’elles renieraient leur parole à la première occasion. Ce qui arriva à la mort de l’empereur, à l’automne 1740 : les droits de Marie-Thérèse furent contestés par l’Électeur de Bavière et le roi de Prusse, Frédéric  II, qui se jeta sans attendre sur la Silésie.

Malgré les réticences de Louis XV et de Fleury, le cabinet de Versailles crut que se présentait là une occasion unique d’abaisser les Habsbourg –  adversaires séculaires de la France  – en leur arrachant la dignité impériale. Ainsi s’ouvrit la longue et décevante guerre de Succession d’Autriche (1740-1748), qui aboutit à une impasse. Fort logiquement, Louis XV en conclut que, l’ennemi principal étant désormais l’Angleterre, qui nous combattait sans relâche en Amérique et aux Indes, il fallait conserver la paix sur le continent et donc se réconcilier avec la Maison d’Autriche.

L’opinion publique ne comprit pas la nécessité de ce sensationnel renversement d’alliances, d’autant que l’instrument en fut la ravissante et très controversée marquise de Pompadour, nouvelle favorite du roi.

Après être resté fidèle à sa femme pendant sept ans – un record, si l’on songe à toutes les opportunités qui s’offrirent à lui –, Louis XV s’était lassé d’une épouse trop sage qui, de son côté, se plaignait de devoir « toujours coucher, toujours accoucher ». Se considérant désormais libre de forniquer, il prit successivement comme favorites les trois sœurs de Nesle. La dernière, la belle et altière Mme  de Châteauroux, qui faisait office de Principal ministre depuis la disparition du vieux Fleury, mourut en décembre  1744. La cour attendit impatiemment de voir à quelle heureuse élue le roi jetterait son mouchoir.

C’est à cette époque que Louis XV remarqua la jeune et jolie Mme d’Étiolles, qui se plaçait sur son passage lorsqu’il chassait dans la forêt de Sénart. Âgée de vingt-trois ans, dotée d’un teint éblouissant et d’yeux gris-vert ravissants, elle était « un morceau de roi » et guettait l’occasion, prête à forcer le destin. Son lointain cousin Binet, valet de chambre de Louis XV, ne cessait de vanter à celui-ci les mérites de sa parente. S

elon la petite histoire, le roi et Mme d’Étiolles échangèrent leur premier baiser lors d’un bal costumé, dans la Grande Galerie du château de Versailles, le 25 février 1745. La tradition a retenu qu’il était déguisé en if, tandis qu’elle portait un domino noir. La fête était donnée pour les noces du dauphin, qui épousait l’infante Marie-Thérèse-Raphaëlle, sœur de la pauvre Marie-Anne-Victoire, promise à Louis XV vingt ans plus tôt et renvoyée dans les conditions que l’on sait !

Le roi et la belle ambitieuse se revirent trois jours plus tard, à un autre bal, cette fois à l’Hôtel de Ville. Les choses allèrent ensuite très vite, et en juin une ordonnance royale prononça la séparation de Mme d’Étiolles d’avec son mari. Elle fut titrée marquise de Pompadour et présentée officiellement à la reine. Ceux qui croyaient à une passade se trompaient : cette maîtresse eut le génie de durer, « réveillant la curiosité et la bonne humeur du roi. Elle régna peu à peu sur sa vie privée. […] Avec elle, Louis  XV découvrit avec ravissement les plaisirs et les agréments d’une liaison bourgeoise », raconte Jean-Marie Rouart dans la biographie qu’il a consacrée à Bernis.

Dans son Journal, le duc de Luynes résume l’étonnement méprisant de la cour : « Si le fait était vrai, ce ne serait vraisemblablement qu’une galanterie et non pas une maîtresse. » Son origine roturière –  elle était née Jeanne-Antoinette Poisson, fille d’un père condamné pour malversation et d’une mère s’étant illustrée dans la galanterie – déchaîna la haine publique. Son patronyme excita surtout la verve des rimailleurs, qui chantèrent sur l’air de Tes beaux yeux, ma Nicole :

Autrefois de Versailles

Nous venait le bon goût.

Aujourd’hui la canaille

Règne et tient le haut bout.

Si la cour se ravale,

De quoi s’étonne-t-on ?

N’est-ce pas de la halle

Que nous vient le poisson ?

Ou encore, sur l’air des Trembleurs :

Les grands seigneurs s’avilissent,

Les financiers s’enrichissent,

Tous les Poissons s’agrandissent.

C’est le règne des vauriens

Une petite bourgeoise

Élevée à la grivoise,

Mesure tout à sa toise,

Fait de la cour un taudis

En tant que nouvelle favorite, on lui accorda un appartement à Versailles, mais elle ressentit l’urgente nécessité d’avoir à ses côtés un ami dont elle serait sûre, et qui la guiderait dans le monde de la cour, qu’elle connaissait mal. Elle en avait effectivement bien besoin, puisqu’elle employait des expressions qui sentaient la roture, n’ayant pas encore percé tous les secrets de la bienséance. Certes, ses lapsus amusaient Louis XV, mais cela ne pouvait durer si elle voulait garder sa place. En somme, il lui fallait un professeur de maintien efficace et de confiance.

Extrait de "Une histoire érotique de la diplomatie", de Nicolas Mietton, publié aux éditions Payot, novembre 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici

©Editions Payot & Rivages, 2016

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