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Manuel Valls et François Bayrou se voient et se parlent régulièrement. Le maire de Pau n'a jamais caché sa proximité avec le Premier ministre. En 2014, il jugeait Valls "cohérent" et faisant montre "d'un certain courage".
Manuel Valls et François Bayrou se voient et se parlent régulièrement. Le maire de Pau n'a jamais caché sa proximité avec le Premier ministre. En 2014, il jugeait Valls "cohérent" et faisant montre "d'un certain courage".
©IROZ GAIZKA / AFP

Baiser de Judas

Manuel Valls, qui ne perd pas de vue sa candidature, cherche à amadouer le maire de Pau qui pourrait s'avérer très gênant pour le PS s'il était candidat. Dans le même temps, il conforte Nicolas Sarkozy dans ses propos. L'ancien président explique, en effet, depuis des jours, que le président du Modem a un programme de gauche et que son alliance avec Alain Juppé est contre-nature. En allant dans son sens Manuel Valls donne ainsi un coup de pouce à l'ancien président.

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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Mais quelle mouche a donc piqué Manuels Valls ? En pleine pré-campagne électorale, alors que les clivages se dessinent à nouveau clairement, que chacun rejoint son couloir respectif, le voici volant au secours de François Bayrou, violemment attaqué, depuis plusieurs jours, par l'entourage de Nicolas Sarkozy. Répondant à une question du président du groupe LR à l'Assemblée Nationale, Christian Jacob, le Premier ministre a lancé d'un ton virulent : "Dans ce moment-là, où le pays est toujours sous la menace du terrorisme, dans ce moment-là, où nous connaissons toujours un chômage de masse, dans ce moment-là où il y a tellement de doutes - tellement de doutes - sur la parole publique et le débat qui est train de se dérouler et les attaques par exemple à l'égard de François Bayrou ne rehaussent pas, me semble-t-il, le débat".

Certes, c'était une manière pour lui d'éviter la question gênante posée par le député de Seine-et-Marne qui soulignait son absence de solidarité envers François Hollande depuis la sortie du livre Un président ne devrait pas dire ça. Mais, en affichant ainsi, au cœur de l’Hémicycle, son soutien au maire de Pau, Manuel Valls ne poursuit-t-il pas un autre objectif ?

Manuel Valls et François Bayrou se voient et se parlent régulièrement. Le maire de Pau n'a jamais caché sa proximité avec le Premier ministre. En 2014, il jugeait Valls "cohérent" et faisant montre "d'un certain courage". Manuel Valls, disait-il, "a osé franchir des frontières, transgresser des tabous au moins dans les mots". Et de regretter que cette franchise "ne débouchera pas sur une révolution du PS". Récemment encore, il affirmait, à un petit groupe de journalistes : "avec lui on pourrait s'entendre". Sur le fond comme sur la forme.

Car si entre François Bayrou et Manuel Valls il n'y a pas un immense fossé idéologique, le locataire de Matignon a, aussi, toujours su "traiter" le président du Modem contrairement à François Hollande. Déjà en octobre 2014, il disait : "En 2012, nous avons commis l'erreur de ne pas tendre la main à François Bayrou. Peut-être l'aurait-il refusée, mais nous aurions dû le faire, alors qu'il avait appelé à voter pour François Hollande". Conviction qu'il répète après les régionales. Le soutien de Manuels Valls face au attaques sarkozistes n'a donc rien d'étonnant.

Mais, en cette période de flou total à gauche, où la candidature de Manuel Valls se fait de moins en moins improbable, le locataire de Matignon ne cherche-t-il pas, d'ores et déjà, des alliés de circonstance ? Chercherait-il, par cette proximité affichée, à organiser le rassemblement? En effet, si Nicolas Sarkozy était choisi comme chef de file de la droite pour l'élection présidentielle, François Bayrou serait évidement candidat. Ce qui s’avérerait aussi gênant pour Nicolas Sarkozy que pour le candidat du PS, quel qu’il soit, qui se verrait ainsi privé des voix centristes. Voilà pourquoi Manuel Valls commence à cajoler le maire de Pau même si son entourage s'en défend et affirme qu'il a surtout voulu : "montrer qu'il y avait aussi des dissensions à droite".

Une manœuvre qui a un double intérêt car, tout en donnant le sentiment de ménager François Bayrou, ce soutien, en plein hémicycle, renforce le sentiment qu'il existe une véritable proximité entre Modem et PS et que François Bayrou n'a, d'une certaine manière, pas le sang pur. Ce qui donne raison à Nicolas Sarkozy qui ne cesse, lui aussi, de souligner les points d'accord entre le centre et la gauche. L'ancien Chef de l’État expliquait ainsi sur France Info mercredi 2 novembre : François Bayrou "veut une nouvelle tranche de l'impôt sur le revenu, il veut l'augmenter. Il est contre l'interdiction du voile. Il veut le droit de vote pour les étrangers. Il ne veut pas la suppression du regroupement familial". En meeting à Marseille, il avait ajouté à cette liste la régularisation de tous les sans papiers.

Manuel Valls a donc fait d'une pierre deux coups : tout en se ménageant l'amitié de François Bayrou, il poursuit un objectif immédiat : aider Nicolas Sarkozy gagner la primaire de la droite. Ce qui est la seule chance pour le PS de l'emporter en 2017. Autant dire que le geste du Chef du gouvernement envers le Maire de Pau n'est rien d'autre... qu'un baiser de Judas.

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