Dompteur de Mélenchon ? Comment Arnaud Montebourg travaille à s'imposer comme le candidat unique à gauche<!-- --> | Atlantico.fr
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Arnaud Montebourg s'est lancé le pari (presque impossible) de rassembler toute la gauche derrière lui.
Arnaud Montebourg s'est lancé le pari (presque impossible) de rassembler toute la gauche derrière lui.
©JACQUES DEMARTHON / AFP

Stratégie

Capable de séduire l'aile gauche du PS, le candidat est aussi en discussion avec le PCF qui pourrait lui apporter son soutien. Jean-Luc Mélenchon, au coude à coude avec le candidat PS dans les sondages, n'est, en revanche, pas prêt à s'effacer.

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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Ils ont regardé les sondages, les ont épluchés, un à un, et ont senti qu'une porte s'entre-ouvrait. Ipsos en septembre, donnait, au second tour de la primaire socialiste, Arnaud Montebourg au coude à coude avec François Hollande et devant Manuel Valls avec 51% des intentions de vote. BVA en octobre ne disait pas autre chose, l'ancien ministre de l’Économie gagnerait la primaire avec 52% des voix si le locataire de l’Élysée se présentait face à lui et la perdrait de bien peu (49%) face à celui de Matignon. Une porte donc. Un peu lourde à pousser. Mais pas verrouillée.

Encore faut-il que la mobilisation soit large. Comme c'est le cas à droite, une primaire qui ne rassemblerait que quelques milliers d'électeurs favoriserait le candidat pro gouvernement. Or pour mobiliser, il faut donner un espoir au peuple de gauche. Lui prouver qu'il est possible de limiter la casse, voire même de l'emporter. Pour ce faire, un seul scénario s'impose : la gauche ne doit avoir qu'un seul candidat sur les rangs en avril. Un candidat qui aura réussi à mettre d'accord la droite du PS et la gauche du PC. Qui aura su faire une synthèse que François Hollande n'a pas réussie en 5 ans. Qui sera parvenu à torpiller les candidatures d'EELV, du PC et même celle de Jean-Luc Mélenchon.

Voilà le pari presque impossible que s'est lancé Arnaud Montebourg. "Ce travail de rassemblement, il va y consacrer une grande partie de son temps", explique le député du Gard Patrice Prat, l'un de ses soutiens. "La primaire nous impose un calendrier mitterrandien, complète François Kalfon. Nous devons d'abord rassembler notre camp". Comme, par exemple, "convaincre Christiane Taubira de nous rejoindre", détaille un autre proche qui affirme que les deux anciens ministres se sont vus à Avignon cet été et qu'un soutien n’est pas exclu en cas de décrochage de François Hollande. Arnaud Montebourg a aussi pour ambition de fédérer les frondeurs, d’où sa présence à la Rochelle pour leurs journées d'été. "Il y a des contacts entre nous, reconnaît aussi Benoit Hamon mais nous sommes en campagne, on ne va pas se faire des bisous tous les jours". Voilà pour la famille.

Mais Arnaud Montebourg à l'intention de rassembler au-delà. Des discussions ont commencé, affirme ses soutiens, avec Nicolas Hulot. Arnaud Montebourg a d'ailleurs changé d'avis sur le gaz de schiste. Des contacts avec le Parti communiste existent aussi. "Une partie importante des cadres du PC va venir voter Montebourg à la primaire", affirme l'un des soutiens de l'ancien ministre qui ajoute "de nombreux canaux nous disent que Pierre Laurent va nommer un candidat PC mais ne lancera pas la campagne avant d'avoir le résultat de notre primaire. Et si c'est Montebourg, il nous soutiendra".

"Nous avons des échanges avec Arnaud Montebourg mais aussi avec Benoit Hamon ou Christian Paul", confirme Olivier Dartigolles, le porte-parole du Parti communiste qui ajoute : "nous choisirons de présenter ou non un candidat avant la fin de l'année donc avant l'atterrissage de la primaire du PS mais, quel que soit notre choix, nous ne nous interdirons jamais de saisir toutes les opportunités qui nous permettraient d'avoir un candidat unique de la gauche pour éviter le fiasco".

Il se dit même convaincu que le peuple de gauche va exiger, de plus en plus fortement, une candidature unique à gauche lorsque la droite aura son candidat. "Lorsque les électeurs comprendrons que c'est le retour d'une droite dure, avec une vraie porosité avec le FN, qui va pratiquer des saignées dans la fonction publique, les électeurs vont nous dire : arrêtez vos conneries !" Et comme il l'a fait en 2012, le PCF se dit prêt à soutenir un candidat non communiste à condition, précise Olivier Dartigolles : "qu'il ne soit pas le représentant de la politique gouvernementale".

Le seul petit défaut de ce plan imparable se nomme Jean-Luc Mélenchon. Le leader de la France Insoumise n'a absolument pas l'intention de s'effacer devant qui que ce soit. Son porte-parole, Alexis Corbière le confirme : "le candidat unique c’est comme le monstre du Loch Ness, tout le monde en parle, tout le monde croit l'avoir vu mais il n'existe pas. Montebourg croit-il vraiment que les partisans de Macron vont se ranger derrière lui ?". Selon son expression : "C’est le rayon paralysant du PS qui dit au nom du 21 avril 2002 il faut se rassembler". Alexis Corbière reproche à l'ancien locataire de Bercy : "une certaine plasticité du discours. On ne l'a pas beaucoup entendu sur la loi travail, par exemple, et quand il dit : j'irai à Bruxelles pour casser la vaisselle, ça ne veut rien dire. C'est : mon ennemi c'est la faïence". Mais il ne ferme pas complètement la porte et reconnaît : "A chaque étape, il peut y avoir des discussions". De son côté, le PCF a envoyé une lettre à tous les candidats de gauche, pour tenter de trouver un point d'accord.

Mais seront-ils prêts, les uns et les autres, à faire les compromis nécessaires à un accord ? Benoit Hamon pose déjà des limites : "Je réfléchis beaucoup à la question du travail et là-dessus je ne suis pas d'accord avec Arnaud. Je pense que le travail va se raréfier, que l'on va produire plus avec moins de moyens et ça il faut le maîtriser en baissant le temps de travail. Or sur cette question Valls et Montebourg disent la même chose". Chez Arnaud Montebourg, on affirme, en revanche, que le discours économique du candidat pourrait être à même de séduire les électeurs communistes : "quand on dit qu'on a trop privilégié les gros groupes aux PME, qu'il faut plus de patriotisme économique, ça peut séduire le PC et même ceux qui ont déserté la gauche pour aller voter FN", estime Patrice Prat.

On l'a compris, la stratégie consiste à convaincre les électeurs qu'Arnaud Montebourg est le seul à pouvoir rassembler son camp, le seul donc à avoir une chance de l'emporter face à Alain Juppé ou Nicolas Sarkozy. Mais s'il réussit à unir la gauche du PS, parviendra-t-il à convaincre l'aile droite du parti ? Les vallsistes, les électeurs de Macron ? "Il y a des choses sur lesquelles il ne bougera pas : il ne bougera pas sur la critique de l'UE, sur la réindustrialisation. Mais pour le reste, il va évoluer durant la campagne, se rassure un soutien. On va peu à peu découvrir un mec pro business plus gaulliste que frondeur". Pas sûr que ce soit, cette fois, du goût du PC.

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