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Les primates en captivité ont un régime alimentaire similaire à celui de l'homme, et ce n'est pas une bonne nouvelle
©Reuters

Humanisation du régime alimentaire

Le régime alimentaire imposé aux primates en captivité est assez similaire à celui de l'homme occidental : faible en fibres, et peu varié. En conséquence, leur flore intestinale est très similaire à la nôtre. Pas de quoi les rendre plus "humains", mais les exposer à des problèmes intestinaux parfois fatals.

Si vous êtes contre les zoos, voici de quoi renforcer encore un peu votre argumentation. On sait déjà que certains animaux vivent moins longtemps en captivité, comme l'éléphant ou l'orque. Et certains primates en captivité, comme le douc, sont sujets à de nombreux problèmes gastriques.

C'est sur ce dernier point que s'est penché Jonathan Clayton, scientifique vétérinaire à l'Université du Minnesota, rapporteThe Atlantic. Et sa conclusion est assez étonnante : la captivité des doucs et le régime alimentaire appauvri qui va avec ont contribué à affaiblir leur flore intestinale, ce qui leur cause de nombreux décès. Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS).

Flore intestinale appauvrie

Durant neuf mois, Clayton a recueilli les selles d'une soixantaine de doucs sauvages qui peuplent l'Asie du Sud-Est, puis les a comparées avec celles de leurs congénères captifs. L'objectif : savoir si le régime alimentaire avait une influence sur ces problèmes intestinaux dont sont victimes plusieurs de ces doucs en captivité.

Le résultat ne s'est pas fait attendre : les déjections de doucs en captivité témoignent d'une flore intestinale bien moins riche que celle de leurs congénères en liberté. Pour consolider ces résultats, Clayton a procédé de la même manière avec les selles de singes hurleurs à manteau, primates d'Amérique centrale. Et là encore, la flore microbienne semble moins variée et développée chez les bêtes en captivité. Pour cause : le régime alimentaire auquel ces deux espèces de primates sont soumises dans les zoos est assez éloigné de celui adopté naturellement en liberté. À l'image de l'homme occidental, leur régime en captivité est faible en fibres et peu varié. Or, les fibres sont essentielles au développement d'une flore intestinale solide.

Clayton n'a eu qu'à se renseigner sur l'alimentation des doucs en milieu naturel et en captivité pour se rendre compte du décalage. Un douc en liberté consomme plus d'une cinquantaine d'espèces de plantes, quand dans les zoos vietnamiens, seule une quinzaine de plantes sont mises à disposition des primates. Enfin, ne parlons même pas des zoos américains, où l'alimentation du primate ne se limite qu'à une seule plante. Pas étonnant que ces doucs aient l'estomac en bouillie. Il en est de même pour les humains : on sait ce qu'il se passe quand on ne fait que manger du melon en été. En revanche, Clayton a pu observer que certains doucs en "semi-liberté", qui avaient le choix de se nourrir comme ils le voulaient, ne présentaient pas ces problèmes de santé.

"Humanisation" du régime alimentaire

Le régime alimentaire a donc un rôle capital dans le bien-être d'une espèce. En 2013, l'anthropologue Katherine Amato avait remarqué que les singes hurleurs noirs dont l'écosystème se faisait dévaster par la déforestation étaient forcés de changer leurs habitudes alimentaires, ce qui conduisait aux mêmes symptômes que ceux dont souffrent les doucs.

Et cette "humanisation" du régime alimentaire des doucs peut également les exposer à un plus grand danger encore : les maladies des visiteurs de zoo. En raison d'une flore intestinale comparable à celle de l'homme, des bactéries telles que Prevotellaet Bacteroides(responsables d'abcès et d'infections) qui transitent habituellement d'homme à homme, se retrouvent dans les organismes des primates. Ce changement de régime alimentaire est semblable à celui qu'a adopté l'homme au cours des millénaires, en passant du chasseur-cueilleur à l'alimentation variée au citadin à la diète quelque peu limitée. Et on sait aujourd'hui que la manière dont nous composons nos plats est loin d'être exemplaire.

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