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Rencontre avec Philippe de Villiers au Puy-du-Fou : quand Emmanuel Macron transcende les clivages au point de s'y perdre
©RTL

Ministre recherche boussole

Après ses déclarations vantant la monarchie et son hommage appuyé à Jeanne d'Arc, en se rendant au Puy-du-Fou à l'invitation de Philippe de Villiers, le ministre de l’Économie brouille encore un peu plus son image. Au risque de se mette à dos ses soutiens ?

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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Le locataire de Bercy adore ça, jouer à saute-mouton au-dessus des clivages politiques, des lignes de fractures entre droite et gauche. Donner le tournis aux politologues les plus avertis avant de jurer, la main sur le cœur, qu'il n'a rien fait. En se rendant aujourd'hui au Puy-du-Fou, Emmanuel Macron va, une fois de plus, faire bouillir le cerveau des observateurs politiques. Que signifie ce déplacement ? Qu'entend-il lancer comme message ?

Bien sûr, Bercy a assuré, hier, que le ministre faisait juste son job : "Il va aller à la rencontre d'entreprises en Charente-Maritime et en Vendée pendant deux jours. Son passage au Puy-du-Fou vise à valoriser la réussite de ce parc, dans un contexte de fréquentation touristique en berne après les attentats". Un déplacement comme un autre à l'invitation de Philippe de Villiers ? Comment croire que le locataire de Bercy n'a pas d'autres sollicitations tout aussi symboliques ?

D'autant que ce déplacement s'inscrit dans un contexte particulier. En juillet 2015, lors d'une interview accordée à Le 1 Hebdo, Emmanuel Macron explique : "Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu". Nostalgique de la monarchie, Emmanuel Macron ? Au PS, on balaie l'hypothèse en levant les yeux au ciel.

Pourtant, le vibrionnant ministre de l’Économie en remet une couche quelques mois plus tard. A l’invitation du maire Les Républicains de la ville, Olivier Carré, Emmanuel Macron accepte de présider, le 8 mai, la traditionnelle cérémonie des fêtes en l’honneur de Jeanne d’Arc à Orléans. Il y rend un hommage appuyé à la pucelle devenue pourtant l'un des symboles chers au cœur de l’extrême-droite française. "Comme une flèche (...) sa trajectoire est nette, Jeanne fend le système, elle brusque l'injustice qui devait l'enfermer" puis "Jeanne se fraye un chemin jusqu'au roi, c'est une femme mais elle prend la tête d'un groupe armé et s'oppose aux chefs de guerre (...) Elle était un rêve fou, elle s'impose comme une évidence". Jeanne "est dans cette France déchirée, coupée en deux, agitée par une guerre sans fin qui l'oppose au royaume d'Angleterre. Elle a su rassembler la France pour la défendre, dans un mouvement que rien n'imposait. Tant d'autres s'étaient habitués à cette guerre qu'ils avaient toujours connu. Elle a rassemblé des soldats de toutes origines. Et alors même que la France n'y croyait pas, se divisait contre elle-même, elle a eu l'intuition de son unité, de son rassemblement".

Cette visite au Puy-du-Fou, qui vient de racheter pour 377 000 euros l'anneau de Jeanne d'Arc, semble donc bien s'inscrire dans un parcours logique et assumé. Emmanuel Macron veut casser les clivages : il ne se veut ni de droite ni de gauche et le prouve en récupérant ces icônes très marquées à droite au risque de hérisser - encore un peu plus - l'électorat traditionnel du Parti socialiste. Mais au-delà de la symbolique, quelle part de conviction Emmanuel Macron met-il dans ces hommages ? Ses proches, hier, refusaient de répondre. Reste que l'opération électorale semble bien acrobatique. Difficile de croire que l'homme réussisse ainsi à séduire un électorat très à droite. Le risque, en revanche, de se mettre à dos ses soutiens attachés à la République et à ses symboles est grand.

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