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Quand la tension monte : là où en sont les catholiques et l'islam en France
©Reuters

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Le meurtre du père Jacques Hamel dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray par deux djihadistes a réactivé la crainte de tensions communautaires en France entre musulmans et catholiques, d'autant plus qu'une part importante de ces derniers fait déjà preuve d'une certaine défiance vis-à-vis de l'islam.

Philippe Bilger

Philippe Bilger

Philippe Bilger est président de l'Institut de la parole. Il a exercé pendant plus de vingt ans la fonction d'avocat général à la Cour d'assises de Paris, et est aujourd'hui magistrat honoraire. Il a été amené à requérir dans des grandes affaires qui ont défrayé la chronique judiciaire et politique (Le Pen, Duverger-Pétain, René Bousquet, Bob Denard, le gang des Barbares, Hélène Castel, etc.), mais aussi dans les grands scandales financiers des années 1990 (affaire Carrefour du développement, Pasqua). Il est l'auteur de La France en miettes (éditions Fayard), Ordre et Désordre (éditions Le Passeur, 2015). En 2017, il a publié La parole, rien qu'elle et Moi, Emmanuel Macron, je me dis que..., tous les deux aux Editions Le Cerf.

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Le meurtre du père Jacques Hamel dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray a constitué un véritable choc dans la population et a fortiori chez les catholiques. Si les plus hautes autorités de l’Eglise et les représentants du culte musulman ont fait front commun face à la barbarie et ont appelé à communier dans un message de paix, cette nouvelle attaque djihadiste visant très symboliquement un prêtre dans son église a réactivé la crainte de tensions communautaires et de représailles de la part de catholiques vis-à-vis de musulmans. Cet acte terroriste intervient en effet dans un contexte déjà très chargé, marqué par une défiance d’une part importante de la population catholique vis-à-vis de l’islam. 

1- Une crispation croissante des catholiques pratiquants vis-à-vis de l’islam…

Différents indicateurs témoignent en effet ces dernières années d’un raidissement vis-à-vis de l’islam, encore plus prononcé parmi les catholiques pratiquants que dans l’ensemble de la population. Cela se manifeste à la fois pour ce qui est de la menace que ferait peser la présence d’une communauté musulmane sur l’identité de notre pays, mais plus encore en ce qui concerne l’influence et la visibilité de l’islam en France. Tout se passe comme si les catholiques pratiquants, qui se sentent démographiquement en déclin et qui, avec le débat puis l’adoption du mariage pour tous, ont pris encore davantage conscience que par le passé du fait qu’ils étaient désormais largement minoritaires dans la société française d’aujourd’hui, ressentaient de plus en plus en mal la visibilité accrue de l’islam dans l’espace public. A leurs yeux, le dynamisme dont ferait preuve l’islam viendrait ainsi concurrencer un catholicisme beaucoup plus anciennement installé mais aujourd’hui en perte de vitesse. 

Qu’il s’agisse de la levée de boucliers suite à la recommandation de l’Association des Maires de France de ne plus installer de crèches de Noël dans les mairies afin de respecter à la lettre le principe de laïcité ou du succès de la pétition lancée par Valeurs Actuelles pour refuser que des églises ne soient converties en mosquées, suggestion très maladroite du recteur de la grande mosquée de Paris Dalil Boubakeur, car symbolisant principalement l’effacement du catholicisme au profit d’un islam dynamique, on constate que toute une partie de la France catholique se mobilise très rapidement sur ce type de sujets « identitaires ». On retrouve dans les enquêtes d’opinion de nombreux signes de cette crispation croissante, qui se polarise notamment sur les attributs symbolisant cette visibilité accrue de l’islam dans le paysage.

Entre octobre 2012 et avril dernier, l’opposition à la construction de mosquées est ainsi devenue largement majoritaire parmi les catholiques pratiquants et a progressé de 15 points, contre une hausse de 9 points dans l’ensemble de la population. Dans le même mouvement, l’opposition au port du voile ou du foulard  islamique dans les écoles publiques, qui ne ralliait que 54% des catholiques pratiquants (une partie d’entre eux voyant peut être à l’époque cette interdiction comme un signe d’une trop rigide laïcité de l’école républicaine dont les catholiques auraient souffert par le passé) est désormais partagée par 67% d’entre eux, soit une progression de 13 points en 4 ans alors que ce score demeurait parfaitement stable dans l’ensemble de la population. 

2- …et une réticence à l’accueil de migrants musulmans 

Cette crispation vis-à-vis du développement de l’islam, mais aussi l’inquiétude face à la menace terroriste, sont à l’origine du trouble profond qu’a créé la crise des migrants parmi les catholiques français. Un sondage Ifop pour Pèlerin réalisé en septembre 2015[1] montrait que si 58% des catholiques pratiquants approuvaient la demande du Pape selon laquelle chaque paroisse d’Europe devait accueillir une famille de migrants, 31% la désapprouvaient et 11% y étaient indifférents, cette position d’indifférence voire d’opposition étant assez rare chez des pratiquants lorsqu’il s’agit de la parole papale. Le fait que ces migrants soient musulmans a sans doute joué sur la réticence d’une partie des catholiques français à pratiquer la charité chrétienne. On se souvient que plusieurs maires de droite avaient signifié qu’ils étaient prêts à accueillir des migrants dans leur ville mais uniquement des chrétiens. Et dans le même ordre d’idées, on rappellera qu’en août 2014, après la prise de Mossoul par l’Etat islamique, 76% des catholiques pratiquants étaient favorables à ce que la France accueille des chrétiens d’Orient[2], alors que cette proportion n’était plus que de 48% en septembre 2015 lorsqu’il s’agissait des migrants, très majoritairement musulmans.

Comme on peut le voir dans le tableau suivant, cette adhésion molle à l’accueil de migrants parmi les catholiques pratiquants allait encore s’éroder, puisqu’en mars 2016, ils n’étaient plus que 38% à se dire favorables soit une baisse de 10 points en six mois, alors que le recul n’était que de 4 points dans l’ensemble de la population.


[1] Sondage réalisé par internet du 16 au 21 septembre 2015 auprès d’un échantillon national représentatif de 2997 personnes.

[2] Sondage Ifop pour Le Figaro réalisé par internet de 30 juillet au 1er août 2014 auprès d’un échantillon national représentatif de 1002 personnes. 

Pour contrer cette nette tendance baissière, il fallut le déplacement du Pape à Lesbos. A la suite de ce voyage papal très médiatisé, l’adhésion à l’accueil progressa ainsi de 4 points dans l’ensemble de la population mais cette hausse atteignit 16 points (de 38 à 54%) parmi les catholiques pratiquants[1]. Le geste symbolique fort du Pape François de ramener avec lui au Vatican 12 migrants musulmans a manifestement provoqué une prise de conscience parmi des catholiques pratiquants partagés entre charité chrétienne et peur face au terrorisme ou au développement dynamique de l’islam en France. Le geste du Pape n’eut en revanche quasiment aucun impact auprès des catholiques non pratiquants (l’adhésion passant de 35 à 37% parmi eux) chez qui le devoir de miséricorde ne contrebalance pas l’inquiétude sécuritaire et identitaire.

Cette inquiétude sécuritaire et identitaire des catholiques, et notamment des non pratiquants beaucoup moins sensibles au message papal, se mesure également à la différence d’attitude selon qu’il s’agisse des migrants en général (de fait très majoritairement musulmans) ou des chrétiens d’Orient. Une semaine après l’enquête pour La Vie précédemment citée, l’Ifop reposa exactement la même question mais en remplaçant le terme « migrants » par « chrétiens d’Orient »[2]. A l’instar que ce que nous avions constaté en comparant les chiffres obtenus à l’été 2014 au moment de la chute de Mossoul, ville à forte population chrétienne, et en septembre 2015, au pic de la crise des migrants, les résultats obtenus ne furent pas du tout les mêmes. 62% des Français étaient favorables à l’accueil de chrétiens d’Orient soit 16 points de plus qu’une semaine plus tôt que pour ce qui est de l’accueil des migrants en général. 


[1] Sondage Ifop pour La Vie réalisé par internet du 22  au 26 avril 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 2934 personnes.

[2] Sondage Ifop pour Atlantico réalisé par internet du 30 avril au 4 mai 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 1667 personnes.

Alors que, comme le montre le tableau ci-dessus, les sans religion et les « autres religions » (musulmans, protestants, juifs…) ne faisaient pas de différence entre les deux types de population à accueillir, l’écart était significatif (13 points) parmi les catholiques pratiquants et allait jusqu’à atteindre 29 points auprès des catholiques non pratiquants. Chez ces « catholiques culturels », la propension à l’accueil s’inverse donc totalement en fonction de la population en question. Deux tiers des non-pratiquants sont opposés à l’accueil de migrants en général quand deux tiers de ces catholiques non-pratiquants sont favorables à l’accueil des chrétiens d’Orient.    

3-Une poussée du FN dans l’électorat catholique lors des régionales...

Dans ce contexte particulier, l’idée du péril islamiste, qui était déjà présente de manière plus ou moins sous-jacente depuis plusieurs années dans toute une partie de la France catholique, a gagné en puissance et s’est considérablement renforcée avec les attentats de janvier puis ceux de novembre 2015. Plus précisément, on peut penser que cette inquiétude sécuritaire et identitaire d’une partie des catholiques face à l’islam a été exacerbée à l’automne 2015 par la conjonction de la crise des migrants et des attaques terroristes, ce qui s’est traduit par une hausse du vote frontiste dans cet électorat.

Alors que les catholiques pratiquants se caractérisaient jusqu’à présent comme étant une des catégories les plus réfractaires au vote FN, le premier tour des régionales a, en effet, été marqué par un phénomène de rattrapage parmi cette population. Entre le premier tour des élections départementales en mars 2015 et le premier tour des régionales, le vote Front National y est ainsi passé de 16% à 25% soit une progression de 9 points[1].


[1] Sondage Ifop pour Pèlerin réalisé par internet le 6 décembre 2015 auprès d’un échantillon national représentatif de 2904 personnes inscrites sur les listes électorales.

Cette forte progression du Front National parmi les catholiques (et notamment les pratiquants) est d’autant plus marquante que, dans le même temps, ce vote refluait de 2 points dans la population se déclarant sans confession. Il y a donc des causes ou des facteurs spécifiques qui ont joué sur une frange des catholiques et pas dans le reste de la population. L’inquiétude croissante d’une partie des catholiques concernant la montée en puissance de l’islam, perçu comme menaçant ou concurrençant un catholicisme en déclin, que nous avons exposée précédemment, constitue la toile de fond de cette droitisation et de ce durcissement identitaire. Et si le mouvement de la Manif pour tous ne s’est pas réinvesti sur ces enjeux à l’issue du débat sur le mariage homosexuel, on peut penser qu’il a contribué à mettre sous tension toute une partie du monde catholique qui a pris conscience de la nécessité de se mobiliser pour défendre ses convictions et ses valeurs.

Dans ce cadre, les multiples signaux adressés par Marion Maréchal Le Pen aux catholiques durant la campagne des élections régionales ont sans doute rencontré un écho. Elle se rendit ainsi le 29 août 2015 aux universités chrétiennes organisées au pied du massif de la Sainte-Baume par le diocèse de Toulon. Cette invitation, qui constituait une première, fut controversée mais permit à la benjamine de la famille Le Pen d’afficher sa proximité avec le monde catholique. Ressentant le trouble d’une partie des milieux catholiques face à l’islam, la candidate frontiste en Paca multiplia les propos sur cette question, sommant les musulmans de s’assimiler. Elle déclara ainsi le 1er décembre lors d’un meeting à Toulon : « Nous ne sommes pas une terre d'Islam, et si des Français peuvent être de confession musulmane, c'est à la condition seulement de se plier aux mœurs et au mode de vie que l'influence grecque, romaine, et seize siècles de chrétienté ont façonné », avant d’ajouter :  « chez nous, on ne vit pas en djellaba, on ne vit pas en voile intégral et on n'impose pas des mosquées cathédrales. »

4- …mais en Ile-de-France, l’électorat de la Manif pour Tous a plutôt voté pour la liste de Valérie Pécresse[1]


[1] Un certain nombre d’éléments de cette partie sont issus de « Régionales en Ile-de-France : les ressorts d’une élection jouée d’avance », note rédigée par J. Fourquet et S. Manternach pour la Fondation Jean Jaurès.

Lors des européennes de mai 2014, des listes « Force vie » se présentèrent dans certaines régions. Ces listes, qui se voulaient le débouché électoral de la grande mobilisation contre la loi Taubira sur le mariage pour tous, visaient cet électorat catholique. D’après un sondage Ifop pour La Croix[1] cet objectif fut loin d’être atteint puisque ces listes obtinrent moins de 1% des voix au plan national, ce score montant à 5% parmi les catholiques pratiquants et 9% dans le segment étroit des catholiques pratiquants réguliers. 

En Ile-de-France, où les milieux catholiques conservateurs de l’ouest francilien avaient joué un rôle important dans le mouvement de la Manif pour Tous, Christine Boutin conduisit la liste « Force vie ». Cette liste recueillit 33 800 voix soit 1,1% des suffrages sur l’ensemble de la région. Un an plus tard, lors des régionales, dans un combat électoral qui s’annonçait serrer, Valérie Pécresse, élue de cet ouest francilien, était désireuse de pratiquer l’union de la droite et du centre la plus large possible et d’en rassembler les différentes chapelles. C’est dans ce cadre que six personnalités appartenant à la mouvance de la Manif pour Tous intégrèrent ses listes. Dans un contexte de raidissement identitaire de larges pans du monde catholique, la question était alors de savoir si cette partie minoritaire de l’électorat catholique qui avait voté pour la liste « Force vie » un an plus tôt allait voter pour Valérie Pécresse ou si elle allait opter pour des offres plus à droite comme le FN ou Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan.

Compte-tenu du poids quantitatif très réduit de cet électorat, l’analyse à partir de sondages auprès d’échantillons de 1000 personnes n’est pas appropriée pour observer vers qui ces électeurs tant convoités se sont tournés. Nous avons donc eu recours à une autre approche consistant à « zoomer » sur les bureaux de vote dans lesquels la liste « Force vie » avait obtenu des résultats significatifs aux européennes. Cette liste dépassa les 8% dans six bureaux versaillais, dans trois bureaux du Chesnay, dans trois à Rambouillet et dans des bureaux isolés à Saint-Germain-en-Laye, Triel-sur-Seine ou bien encore à Marly-le-Roi[2]. Après avoir identifié toutes les communes où cette liste avait enregistré un résultat significatif dans au moins un bureau de vote, nous avons calculé sur l’ensemble de ces communes comment avaient évolué les rapports de forces électoraux entre les européennes et le premier tour des régionales en fonction de l’audience de « Force vie ».


[1] Sondage Ifop pour La Croix réalisé par internet le 25 mai 2014 auprès d’un échantillon national représentatif de 3373 personnes inscrites sur les listes électorales.

[2] On notera que lors de l’élection législative partielle organisée à la suite des régionales dans la circonscription de Valérie Pécresse, un candidat se revendiquant de la Manif pour Tous obtiendra près de 10% au premier tour.

Les enseignements du tableau ci-dessus sont assez clairs. On constate ainsi que plus la liste de Christine Boutin avait performé en 2014 et plus la participation a reculé aux régionales, ce qui indique qu’une frange de cet électorat ne s’est pas retrouvée dans l’offre politique existante et a donc opté pour l’abstention. Mais tel n’a pas été le cas de tous. Les corrélations très positives du score de Force vie avec la progression de la liste Pécresse (par rapport au total Droite + Centre des européennes) et avec celle de Debout la France montrent en effet que ces deux listes ont su capter une part importante de ces voix et viennent valider rétrospectivement l’affirmation de Valérie Pécresse qui avait déclaré : « J’ai besoin des voix du Parti Chrétien-Démocrate pour contrer Dupont-Aignan ». On constate en revanche à la lecture de ces chiffres que le Front National n’a apparemment pas été en capacité de séduire l’électorat « Manif pour Tous » qui a été davantage sensible à l’union à droite prônée par Valérie Pécresse et au vote Dupont-Aignan, pour ceux qui se reconnaissent dans l’idée d’une « droite hors des murs » chère à Patrick Buisson. 

5- Un durcissement de l’opinion de catholiques pratiquants au lendemain de l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray

Si Valérie Pécresse est donc parvenue en Ile-de-France à empêcher le basculement de la mouvance catholique tendance Manif pour Tous vers le FN, elle a dû pour cela donner des gages à cet électorat et durcir son discours. Tout cela s’inscrit dans un mouvement plus vaste de droitisation de l’électorat catholique que nous avons décrit précédemment et dont la progression du vote frontiste aux dernières élections régionales, d’une part, et l’hostilité croissante à la manifestation de la présence de l’islam dans l’espace public, d’autre part, constituent les symptômes.

Dans ce climat déjà très tendu, l’égorgement du prêtre Jacques Hamel par deux jeunes djihadistes dans une église de Saint-Etienne-du-Rouvray le 26 juillet dernier allait encore accroître l’inquiétude et durcir les positions. Au lendemain de cet attentat, la sécurité et la lutte contre le terrorisme apparaissent ainsi comme la priorité numéro un des Français avec 58% de citations, loin devant le chômage qui ne recueille que 17% de citations, mais cette focalisation sur l’enjeu sécuritaire est encore plus spectaculaire parmi les catholiques pratiquants avec 68% de réponses sur l’item « la sécurité et la lutte contre le terrorisme », contre 12% sur « la lutte contre le chômage »[1].  Dans le même ordre d’idées, l’adhésion à l’internement préventif des individus fichés « S » qui atteint pas moins de 74% dans l’ensemble de la population est encore davantage plébiscité auprès des catholiques pratiquants, avec 84% de réponses plutôt favorables.

A la suite des attentats de janvier 2015, les catholiques pratiquants, à l’instar de l’ensemble de la population française, étaient pour les deux tiers d’entre eux environ dans le refus de l’amalgame. Fait marquant et qui viendrait plutôt invalider l’hypothèse de la multiplication d’actes de représailles aveugles contre des musulmans, au lendemain des attaques de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray, ce rapport de force n’a pas varié dans l’ensemble de la population française. Cependant, et comme le montre le graphique suivant, cette stabilité n’est pas du tout de mise parmi les catholiques pratiquants.


[1] Sondage Ifop pour Atlantico réalisé par internet du 27 au 29 juillet 2016 auprès d’un échantillon national représentatif de 1012 personnes

En un an et demi, et à la suite de multiples attaques, dont la dernière en date visait spécifiquement un représentant et des fidèles de l’Eglise, la proportion des catholiques pratiquants refusant l’amalgame entre les musulmans et les islamistes radicaux a reflué de 15 points quand, dans le même temps, la proportion de ceux qui considèrent l’islam comme une menace passait de 33% à 45%, cette opinion faisant désormais quasiment jeu égal avec le refus de l’amalgame chez les catholiques pratiquants. Les témoignages rapportés par la presse au lendemain de l’attaque de Saint-Etienne-du-Rouvray démontrent bien le caractère extrêmement partagé des catholiques sur cette question éminemment sensible. Ainsi, si Irène, jeune paroissienne venue assister à la messe en la mémoire du prêtre Jacques Hamel, célébrée dans le cathédrale de Rouen, considérait la présence de musulmans à cette cérémonie comme « un geste très noble de la part des musulmans qui renforce [sa] propre foi », tel n’était pas l’avis de Catherine, paroissienne plus âgée déclarant sans fard à propos des musulmans « c’est viscéral, je ne les aime pas » et qu’ « en tuant un prêtre, c’est comme s’ils avaient tué un membre de ma famille, et ça je ne peux pas le pardonner !»[1]. Les propos du père André Cabes, recteur des sanctuaires de Lourdes, traduisent également cette ambivalence : « La réaction des fidèles est partagée entre la prière et la colère »[2].     

En un an et demi, et à la suite de multiples attaques, dont la dernière en date visait spécifiquement un représentant et des fidèles de l’Eglise, la proportion des catholiques pratiquants refusant l’amalgame entre les musulmans et les islamistes radicaux a reflué de 15 points quand, dans le même temps, la proportion de ceux qui considèrent l’islam comme une menace passait de 33% à 45%, cette opinion faisant désormais quasiment jeu égal avec le refus de l’amalgame chez les catholiques pratiquants. Les témoignages rapportés par la presse au lendemain de l’attaque de Saint-Etienne-du-Rouvray démontrent bien le caractère extrêmement partagé des catholiques sur cette question éminemment sensible. Ainsi, si Irène, jeune paroissienne venue assister à la messe en la mémoire du prêtre Jacques Hamel, célébrée dans le cathédrale de Rouen, considérait la présence de musulmans à cette cérémonie comme « un geste très noble de la part des musulmans qui renforce [sa] propre foi », tel n’était pas l’avis de Catherine, paroissienne plus âgée déclarant sans fard à propos des musulmans « c’est viscéral, je ne les aime pas » et qu’ « en tuant un prêtre, c’est comme s’ils avaient tué un membre de ma famille, et ça je ne peux pas le pardonner !»[1]. Les propos du père André Cabes, recteur des sanctuaires de Lourdes, traduisent également cette ambivalence : « La réaction des fidèles est partagée entre la prière et la colère »[2].     

Cette colère n’a pas échappé à Marion Maréchal-Le Pen qui, une nouvelle fois, a tenté de s’ériger en porte-drapeau de la tendance dure du catholicisme français. La députée du Vaucluse déclarait ainsi dans Le Figaro du 28 juillet : « Si les minorités chrétiennes sont persécutées, notamment en Libye été en Syrie, on voit malheureusement les prémices de cette violence aujourd’hui en France. Il est donc important que les chrétiens aient conscience, y compris dans le cadre de la doctrine de l’Eglise, que la légitime défense est saine et souhaitable. » Aymeric Chauprade, ancien conseiller de Marine Le Pen, allait lui encore un cran plus loin dans la thématique de l’affrontement religieux en twittant : « De très nombreux chrétiens sont prêts au combat en France. Dont moi. »[3]



[1]  In « A Rouen, une messe pour communier face à la barbarie » in Le Monde 02/08/2016

[2] In « Bouleversée, l’Eglise de France partagée entre colère et prière » in Le Figaro 27/07/2016

[3]  Cité in « Politique : le piège du clivage communautaire » in Libération 27/09/2016

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