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Continuer à vivre malgré tout : les clefs pour se reconstruire après avoir vécu des attentats
©REUTERS/Pascal Rossignol

Bonnes feuilles

Après les attentats de novembre 2015, chacun de nous a compris qu'il pouvait désormais être une cible et que ses proches pouvaient l'être aussi. Cette nouvelle guerre n'est plus uniquement réservée aux professionnels ou "aux autres". Alors comment continuer à vivre normalement, sans se laisser envahir par la peur tout en étant conscient du danger ? C'est ce qu'explique Sylvie Tenenbaum, à l'aide de conseils concrets, d'exercices pratiques et de nombreux témoignages de spécialistes et de patients. Un livre pour continuer à vivre et espérer malgré tout. Extrait de "Apprendre à vivre avec les attentats" de Sylvie Tenenbaum, aux éditions Albin Michel (2/2).

Sylvie  Tenenbaum

Sylvie Tenenbaum

Sylvie Tenenbaum est psychothérapeute depuis 25 ans. Certifiée en PNL, analyse transactionnelle, hypnose éricksonienne, elle intervient aussi dans le traitement du stress post-traumatique (EMDR).

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Vivre envers et malgré tout 

Vivre avec une menace terroriste, qui demande d’avoir davantage de vigilance et de prévoyance, c’est apprendre à vivre malgré tout. Ces événements horribles ont aussi pour effet de nous faire aimer la vie : c’est ce qu’il y a de plus précieux.

« À l’angle des rues Bichat et Alibert se trouvent le Carillon et le Petit Cambodge. Quinze personnes y ont trouvé la mort le 13 novembre. Ce dimanche, des dizaines de riverains se sont rassemblés pour hisser des fanions qu’ils ont confectionnés eux- mêmes. “Tous les jours, on passe devant un tombeau. Il fallait que l’on rende l’endroit  plus coloré”, souffle Muriel, une mère de trois enfants qui habite à deux pas de là, rue du Buisson-Saint- Louis. “Pour les enfants, c’est important. Il y a deux victimes parmi les parents d’élèves de l’école de ma fille. Pour eux aussi, il fallait leur montrer que la vie doit reprendre ses droits.” Monique, habitante de la rue Bichat “depuis une quarantaine d’années”, a préparé durant une demi- journée cette banderole jaune et violette qui s’étend au- dessus du carrefour

Continuer à vivre, c’est refuser de jouer le jeu des terroristes : ne leur donnons pas le pouvoir – et la satisfaction – de nous anéantir psychologiquement ! Une scène de la pièce de théâtre Sur une île (écrite par Camille de Toledo à la suite du massacre d’Utøya en Norvège en 2011) a été jouée le 15 janvier 2016 à Toulouse pour montrer – démontrer – qu’« après le deuil, les souvenirs, la douleur. » de la séparation, la reprise d’une vie normale puis, enfin, la réflexion » sont possibles. Ce qui a été meurtri, c’est une façon de vivre quand on est jeune, le vendredi soir, à Paris. Il ne s’agit pas de valeurs idéologiques ou religieuses, mais d’une réalité de la vie quotidienne. Ces attentats ont été à l’origine d’une véritable solidarité pour préserver une forme de liberté.

Panser les blessures ne sera pas chose facile mais devant tant de marques de solidarité, de compassion et d’empathie, il est impossible de perdre l’espoir. Les cours de soins d’urgence, de premiers secours, ne désemplissent pas, la Croix-Rouge et les sapeurs- pompiers sont débordés. Les participants du cours que j’ai suivi ont TOUS donné comme motivation : « une participation citoyenne à ce qui se passe, pouvoir être utile » ! Alors oui, la menace terroriste est là : nous avons à l’intégrer dans notre réalité. Et personne ne peut ignorer l’enrôlement par Daech de nombreux jeunes (jeunes fi lles – dont on sait l’usage grâce à des témoignages de quelques- unes qui ont réussi à s’enfuir, et jeunes gens). Boris Cyrulnik fait le parallèle avec le nazisme : « Méfions- nous des épidémies psychiques ! [...] L’historien américain Christopher Browning montre comment ces “hommes ordinaires“, dont 25 % seulement avaient leur carte au parti nazi en 1933, sont presque tous devenus des tueurs en l’espace de dix ans. »

Vivre avec un traumatisme est possible à plusieurs conditions :

– accepter de prendre conscience de sa peur, il n’y a aucune honte à avoir peur. Je dis souvent à mes patients que la véritable force est justement d’accepter sa vulnérabilité ;

– accepter d’en parler à son entourage et à ceux qui peuvent aider à la traiter : médecins, thérapeutes, associations. Le moyen le plus sûr pour adoucir tristesse, abattement, angoisse et peurs est la parole : mettre des mots, dire ce que l’on ressent à une personne (ou plusieurs) – ce qui est impossible au cours d’une crise de panique. Exprimer ses émotions fait passer ce que l’on ressent dans la sphère du mental : c’est une mise à distance indispensable ;

– accepter de s’adonner à des activités agréables sans culpabiliser : ruminer des idées noires ne fera de bien à personne, n’aidera pas l’entourage, tout au contraire ; pratiquer des activités artistiques, manuelles, des jeux (seul(e) ou avec d’autres), écouter de la musique (évitons les requiem), des chansons en chantant ou fredonnant en même temps, se lever pour danser (seul(e) ou avec d’autres), lire ce qui détend, se promener dans des endroits agréables (la nature est apaisante).

Extrait de Apprendre à vivre avec les attentats de Sylvie Tenenbaum, publié aux éditions Albin Michel.

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