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Alerte à la baisse sur les sondages Juppé : pourquoi son entourage ne s'inquiète pas (mais prépare quand même la contre-attaque)
©Reuters

Tombé de haut

Alors que les sondages avaient fait d'Alain Juppé le champion de son camp, le maire de Bordeaux assiste à l'érosion de sa popularité dans la majorité des enquêtes d'opinion réalisées auprès des électeurs et des sympathisants de la droite.

Guillaume Tabard

Guillaume Tabard

Guillaume Tabard est rédacteur en chef et éditorialiste au Figaro. 

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Bruno Jeudy

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy est rédacteur en chef Politique et Économie chez Paris Match. Spécialiste de la droite, il est notamment le co-auteur du livre Le Coup monté, avec Carole Barjon.

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Atlantico : Selon les chiffres de plusieurs enquêtes d'opinion​, Alain Juppé​ assiste lentement à l'érosion de s​a popularité depuis le début de cette année 2016. Ainsi, d'après le dernier sondage IFOP, il aurait perdu 7 points tandis que d'après Odoxa, il aurait été doublé par Nicolas Sarkozy auprès des sympathisants de droite. ​Bien qu'Alain Juppé reste en avance sur ses concurrents, le clan Juppé est-il à l'œuvre pour renverser la tendance en cours ? De quelle manière ? S'agit-il d'un réel ​motif d'inquiétude ?

Guillaume Tabard : De manière générale, la stratégie que s'est fixée le clan Juppé et à laquelle ils semblent vouloir se tenir, est de ne modifier ni le tempo de la campagne, ni son angle. Alain Juppé et ses proches savent depuis le début qu'il finirait par descendre de son Olympe en matière de sondage. Ils s'attendaient et se préparaient à ce recul, qui est en partie naturel et nécessaire car il recule notamment dans l'électorat de gauche. A mesure que l'on se rapproche de la campagne en tant que telle, une re-bipolarisation de la campagne s'installe et lui fait perdre une partie de sa popularité à gauche : c'est normal et utile, puisque sa popularité n'est plus artificiellement entretenue par les électeurs de gauche. Bien sûr, il baisse fortement à droite également dans les derniers baromètres. C'est lié à la tonalité de la séquence : attentats, chienlit, etc, qui donne davantage de force au discours de Nicolas Sarkozy qu'à celui d'Alain Juppé. C'est quelque chose dont l'équipe de Juppé est consciente, puisqu'ils ont même prévu une offensive sur le terrain de l'identité, prévue à la rentrée. Alain Juppé doit donner un grand discours sur la France et l'identité nationale (à sa manière, il ne va évidemment pas faire du Nicolas Sarkozy dans le texte). Il veut s'emparer de cette thématique, mais le discours n'est pas prévu avant septembre : il tient à ne pas donner le sentiment que son programme apparaisse uniquement en réaction à l'actualité immédiate. Il veut éviter de donner le sentiment de la fébrilité, l'impression que sous-prétexte que les sondages s'emballent, il doive faire une embardée, donner un grand coup de volant pour corriger le tir ou s'adapter aux attentes. En un sens, il fait le pari de la continuité de la campagne, pour que plus tard dans la primaire, on puisse reconnaître sa stabilité – par rapport à Nicolas Sarkozy –, sa fiabilité et sa capacité à ne pas varier selon les circonstances.

Bruno Jeudy : Il apparait clair que la côte d'Alain Juppé s'effrite de manière plus ou moins importante suivant les enquêtes et le type de sondage. En termes de popularité, Alain Juppé perd du terrain d'abord auprès des sympathisants de gauche, ce qui n'est pas particulièrement grave, surtout quand tous les candidats de droite sont dans la même situation, en raison de leurs programmes libéraux. À droite aussi, Alain Juppé chute et c'est là le plus inquiétant pour lui. Il le doit essentiellement, il me semble, à la période de crise sociale que traverse le pays. Le sentiment que la chienlit s'est installée dans les rues de France inquiète l'électorat de droite et Nicolas Sarkozy l'a sans doute senti le premier lorsqu'il est allé au 20h de TF1 il y a un peu plus d'un mois où il l'a justement dénoncé, ainsi que l'affaiblissement de l'autorité de l'État.  Sa côte remonte depuis et petit à petit il comble son retard vis-à-vis d'Alain Juppé, point par point. Sans pour autant le rattraper.

Dans les sondages, il faut distinguer les sondages de popularité où Alain Juppé perd un peu de terrain et ceux d'intentions de votes… Que ce soit à la primaire ou à la présidentielle, il reste largement en tête.

Pour autant, peut-on vraiment dire de l'ancien Premier ministre qu'il est fragilisé ? Quels sont aujourd'hui les risques qui pèsent le plus sur Alain Juppé ?

​Bruno Jeudy : C'est un avertissement pour Alain Juppé. Il devait logiquement baisser dans les sondages car il part de très haut. Rappelons que dans le baromètre IFOP des personnalités politiques, il culminait à 70% à la fin de l'année 2015 et a perdu une dizaine de points en 6 mois. C'est la logique qui s'applique aux personnalités politiques passant de personnalité politique à candidat à la présidentielle.

N'en reste pas moins que c'est un avertissement : s'il perd des bonnes opinions à gauche, il en perd aussi à droite. Ce qui est évidemment plus embêtant dans la perspective de la primaire, qui est d'abord celle des électeurs de droite et du centre. Si Alain Juppé doit logiquement baisser dans les sondages, ce n'est pas grave de baisser à gauche… C'est autrement plus ennuyeux de baisser à droite. Encore une fois, il s'agit d'un avertissement. Cela veut dire qu'il va devoir sortir de sa réserve, descendre de son piédestal. On a jamais vu un candidat gagner une présidentielle sans faire campagne.

Cette position de favori n'est-elle pas en soi un inconvénient ? ​La situation actuelle peut-elle obliger le candidat à sortir de son cadre ? 

Bruno Jeudy : Il est rare, dans l'histoire politique française, que ceux désignés comme les favoris un an avant l'élection présidentielle l'emportent le jour J. Néanmoins, cela existe. À la suite de la chute de Dominique Strauss-Kahn, François Hollande a gagné la tête des sondages, en juin 2011. C'était le cas tant pour les sondages de la primaire que pour ceux de la présidentielle et il n'a plus quitté la tête ensuite. Cette "règle" subit donc aussi des exceptions.

Pour autant la primaire de la droite et du centre est différente de celle menée par les socialistes en 2011. D'abord, parce que certaines variables restent inconnues : on a assez peu de recul sur le nombre de votants par exemple. Ensuite, parce qu'elle met aux prises un ex-président de la République et deux anciens Premier ministres, ce qui rend ce combat inédit et en même temps plein d'incertitudes par rapport à la primaire PS 2011, où les candidats étaient moins expérimentés.

Je pense que cette primaire connaîtra une intensité dont le comble devrait arriver autour du mois d'octobre. Cette primaire, en outre, sera beaucoup plus médiatisée. N'oublions pas qu'il y aura 3 débats avant le premier tour, dont 2 retransmis en prime time sur les grandes chaines télévisées. Cela donnera à cette primaire un côté film à grand spectacle, presque feuilleton et créera une vraie incertitude autour de cette primaire, toujours aussi ouverte.

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