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Lorsque Zlatan Ibrahimovic s’endort à Hong-Kong en pleine promo du foot français, la LFP ferme les yeux et le PSG n'est pas inquiété...
©REUTERS/Gonzalo Fuentes

Bonnes feuilles

La personnalité du Suédois a parfois contrarié son talent. Sur le terrain, Ibrahimovic peut être un magicien ; en dehors, il sait devenir méprisant. Professionnel, il déteste la contradiction et la critique, et cela peut parfois devenir crispant pour son club. Extrait de "Ibra grandeur nature - Enquête sur le véritable Zlatan Ibrahimovic", de Damien Degorre et Arnaud Hermant, aux éditions du Moment 1/2

Damien Degorre

Damien Degorre

Damien Degorre, 38 ans, est grand reporter à L'Equipe depuis 2001. Il suit le PSG depuis 2004 et l'équipe de France depuis 2007. Il a couvert les Coupes du monde 2010 et 2014 et les championnats d’Europe 2008 et 2012. Co-auteur de La grande histoire du PSG il a également écrit d'autres ouvrages sur le football. Il est également consultant régulier de "L’Équipe du Soir" sur L'Equipe 21.

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Arnaud Hermant

Arnaud Hermant

Arnaud Hermant, 41 ans, est grand reporter à L'Equipe depuis novembre 2015. Il a apssé près de quatorze ans au Parisien, où il était le leader de la cellule PSG. Il suit le PSG depuis 2002 et a également couvert la Coupe du monde 2006 et les championnats d’Europe 2008 et 2012 aux côtés de l’Équipe de France. Il participe régulièrement à des émissions sur Europe 1, France Bleu IDF et iTélé. Il est également l'auteur de PSG Confidentiel et co-auteur du livre Le PSG, le Qatar et l’Argent aux éditions du Moment.

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En cette fin juillet 2014, le PSG part à la conquête de l’Est, de l’Asie du Sud-est, plus précisément, où il va séjourner pendant huit jours. Les joueurs partagent leur temps entre l’ancienne colonie britannique passée sous pavillon chinois en juillet 1997 et Pékin, la capitale chinoise, où ils doivent disputer le Trophée des champions contre Guingamp. 

En attendant la rencontre du soir, Ibra a été réquisitionné le mardi matin, comme la quasi-totalité de l’effectif, pour diverses opérations marketing. Nicolas Douchez, Clément Chantôme et Marquinhos, par exemple, grimpent jusqu’au Peak, le plus haut sommet de l’île, d’où l’on profite d’un panorama somptueux sur Hong Kong. Javier Pastore, Jean-Kevin Augustin et Jean-Christophe Bahebeck ont droit à une séance de Taï-chi alors que Presnel Kimpembe, Gregory van der Wiel et Hervin Ongenda s’essayent à des cours de cuisine à l’hôtel. 

Avec Serge Aurier, fraîchement arrivé au club en provenance de Toulouse, et son grand ami Zoumana Camara, Ibra part un peu avant 10 heures pour une balade en ville, conclue par une sortie en jonque, le bateau traditionnel en Asie. Les trois Parisiens, escortés de leurs agents de sécurité, foulent l’avenue des stars locales le long de la baie, sans que leur présence ne déclenche de réaction particulière parmi les badauds. Ils s’arrêtent quelques instants devant la statue de Bruce Lee, acteur-réalisateur spécialiste d’arts martiaux, mondialement connu, et décédé d’un œdème cérébral à Hong-Kong en 1973. Ibra, grand fan de sports de combat, ne peut être que sensible à Bruce Lee… Mais le Suédois ne se montre pas d’excellente humeur, ce matin-là. Le car qui transporte le trio est bloqué dans une rue fermée pour cause de travaux. Il faut faire demi-tour et prendre un autre itinéraire. À la descente, Ibra est énervé. Il éructe à l’endroit d’un membre du staff administratif parisien : "C’est mal organisé et je ne comprends pas pourquoi !". 

Forcément, lorsque survient l’heure de la sortie en mer, le Suédois ne s’est pas calmé. Pourtant, cela doit être le clou de la journée. Le responsable du marketing parisien pense monter là une belle séquence avec celui qui est devenu le meilleur ambassadeur du club depuis le départ de David Beckham, quelques semaines plus tôt. Quelle plus belle photo que celle de Zlatan Ibrahimovic prenant la pose dans une embarcation traditionnelle ? Pour vendre la marque PSG à des sociétés de la région, c’est le cliché parfait. Alors que la jonque se divise en deux espaces, l’un au grand air, l’autre fermé, Ibra et ses deux partenaires s’installent dans la partie close. Les vigiles ferment les portes de façon machinale et autoritaire. Le reste de la délégation est maintenu à l’extérieur et, visiblement, il est préférable de ne pas trop s’approcher du Suédois et de ses acolytes. 

Écouteurs dans les oreilles, le grand attaquant s’assoit. Et s’endort. Les quelques médias conviés, dont L’Équipe et Le Parisien, ont l’interdiction de filmer le spectacle, pourtant assez improbable. La scène est surréaliste. De photos, il n’y en aura donc pas. Jamais. Ce n’est pas ce qui était prévu. Les échanges entre les organisateurs de la tournée du PSG dans la région et les responsables parisiens trahissent une réelle incompréhension et même un certain malaise. Aucune négociation n’est possible. On ne dérange pas le roi Ibra, encore moins lorsqu’il dort. La balade fluviale vire au fiasco. Dix minutes à peine après le départ, la jonque accoste aux pieds de l’hôtel de la délégation. Encore tout ensommeillé, Zlatan débarque les yeux mi-clos, sans un mot ni un regard. Yann Guérin, l’attaché de presse du club, prend soin de demander aux deux journalistes français de ne pas évoquer cette histoire et surtout de ne pas révéler qu’Ibra a piqué un somme lors d’une opération marketing importante. En tout cas, celle-ci était attendue par le PSG en raison de l’identité de l’un des joueurs sollicités afin de représenter le club pour l’occasion. Les choses auraient dû en rester là. Oui mais, parce qu’il y a un mais, quelques jours plus tard, alors que le PSG a rejoint Pékin pour le Trophée des champions, Le Parisien affirme que cette opération a eu des répercussions non négligeables. Doux euphémisme.

Si Zlatan s’est endormi, ce n’est pas de sa faute. D’ailleurs, ce n’est jamais de sa faute, c’est un postulat. Il se considère comme la victime d’une organisation défaillante et ne le supporte pas. Furieux, le Suédois passe une soufflante aux responsables marketing du club présents à Hong-Kong, avec des mots et un ton cassant qui ne souffrent aucun débat. Surtout, il a appelé en personne le président Nasser Al-Khelaïfi, en vacances aux États-Unis, pour se plaindre et lui dire que, désormais, il ne participerait plus jamais à aucune action commerciale du club. Une position à laquelle il s’est tenu jusqu’à la fin de son contrat en juin 2016. Il aurait par exemple dû être la figure principale de la publicité pour Nivea qui passe en boucle sur les écrans, au milieu de certains coéquipiers du PSG, mais il n’y apparaît même pas. Dans la foulée du coup de fil de sa vedette, le boss qatarien a, lui aussi, répercuté le message aux équipes dirigées par Frédéric Longuépée, le directeur général adjoint en charge du développement commercial, présent en Asie. Le patron est allé dans le sens de son attaquant. On ne touche pas à sa star. On la bichonne, on la cajole, on la caresse dans le sens d’un poil qui a tendance à se hérisser facilement. Éprouvé par le décalage horaire et le travail physique effectué sous une chaleur accablante, le meilleur joueur de l’histoire du football suédois ne comprend pas comment on a pu prévoir un tel programme le jour d’un match, même amical, même contre une équipe de faible qualité. On retrouve là son sens aigu du professionnalisme. Ibra est fâché. Très fâché.

C’est donc à Pékin que l’affaire de la balade en jonque prend une nouvelle dimension, au-delà de la sphère interne au PSG. L’histoire commence à circuler. La Ligue de football professionnel, co-organisatrice du Trophée des champions avec un prestataire chinois, la société UVS, est informée du dossier. Pour ses opérations de promotion avec les autorités chinoises et les sponsors locaux, dont une eau minérale, Tibet Spring, la LFP comptait sur la présence de Zlatan. Ce ne sera pas possible. Le PSG se voit contraint d’avancer quelques explications hasardeuses afin de justifier ce forfait commercial fort regrettable. 

Extrait de "Ibra grandeur nature - Enquête sur le véritable Zlatan Ibrahimovic", de Damien Degorre et Arnaud Hermant, publié aux éditions du Moment. Pour acheter ce livre, cliquez ici

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