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Le début du Gaokao, le plus grand examen au monde, qui terrifie des millions de Chinois
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Hello University

L'examen est un véritable rite de passage aux yeux des Chinois, quoiqu'il soit critiqué pour l'inégalité qu'il crée et couvre sous le nom de "méritocratie".

En Chine, un seul examen détermine l'entrée de plusieurs millions d'adolescents à l'université, et l'établissement qui les accueillera. Nommé gaokao, il est passé cette année par près de 10 000 000 de jeunes Chinois, diplômés du secondaire, du 7 au 9 juin.

Pendant ces trois jours, la Chine ralentit. Le rituel, formalisé depuis les années 50 mais qui prend sa source dans les examens impériaux d'anciennes dynasties, est suivi par tous les parents – et les commerçants.

En effet, les résultats sont déterminants pour l'avenir des élèves. Le Chinois qui échoue est généralement promis à une succession d'emplois peu qualifiés, et encourt la déception de sa famille. Par conséquent, la BBC raconte que les parents mettent tout en œuvre pour que les bonnes conditions de révision soient réunies.

Les nounous du gaokao

Toute préparation aux concours est une course. Alors pour maximiser le temps disponible à l'étude, des services se sont mis en place pour libérer les jeunes Chinois de tout souci matériel : ainsi, on peut recruter une nounou spécialisée pour s'occuper du linge et de la cuisine. Et pour faire d'une pierre deux coups, ces nounous sont souvent des étudiants à peine plus âgés qu'eux, qui peuvent prodiguer conseils et explications. Un journal donne l'exemple d'un étudiant de médecine qui demande l'équivalent de $45 de l'heure pour accompagner celui dont les parents auraient les moyens.

Mais dans ces heures-là, tous les parents ont les moyens. Les chambres d'hôtels à proximité des centres d'examens s'arrachent à prix d'or, surtout celles qui, ayant le sens des affaires, proposent des services premiums de tranquillité assurée. Les compagnies de taxis mettent à disposition des pilotes expérimentés qui garantissent d'éviter les bouchons, moyennant finance. D'autres, par solidarité nationale, emmènent gratuitement les élèves.

L'école de la vie

Les sacrifices de court-terme sont courants, en Chine, quand les bénéfices espérés sont immenses. Ainsi, le célèbre centre de révision de Maotanchang propose un an de préparation intense à $16 000, et attire jusqu'à 20 000 personnes par an – quatre fois la population locale. Les téléphones y sont interdits, les ordinateurs portables également ; les dortoirs ont été conçus sans prise électrique. Les sources d'amusement ont été quasiment toutes ôtées de la ville par le gouvernement local. Quant à savoir si ce sont les enfants ou les parents qui insistent pour y avoir une place, la question reste ouverte.

Le jour des examens, des foules très nombreuses accompagneront les bus des candidats et les acclameront, dans l'espoir de leur porter chance. En attendant, les adolescents gèrent le stress faisant voler leurs manuels – ou en éventrant des pastèques.

Vous avez dit méritocratie ?

Le gaokao ressemble, vu d'ici, à du bachotage de grande ampleur. Il est pourtant assez soutenu par la génération des parents, qui se plaignent seulement du coût qui explose et du manque d'autonomie des candidats à subvenir à leurs besoins. Ils avancent également l'argument principal : l'examen peut être remporté par n'importe qui, riche ou pauvre.

La conclusion semble hâtive. La volonté ne fait pas tout. Il est évident que les élèves des lycées urbains sont mieux préparés que ceux des campagnes (où habitent 8 à 900 millions de Chinois). A l'échelle nationale, la norme de taille des classes est de 50 élèves, et dans les régions plus reculées il n'est pas rare de voir des classes de 80, voire 100 élèves. En 1990, les adolescents ruraux étaient 7% à finir le lycée, et ils dépassent aujourd'hui un petit 30%.

Mais même en ville, les obstacles restent relativement insurmontables pour ceux qui veulent intégrer un grand lycée : en termes de frais d'inscription, ou de corruption pure et simple.

Pour rester juste, le sociologue Liu Sida déclare qu'effectivement, à son institution dans les années 50, le gaokao a été un important facteur de mobilité sociale. Mais aujourd'hui, l'accroissement des inégalités de revenus condamne le gaokao à favoriser la sclérose de la société. Le gouvernement joue un rôle néfaste en instituant des quotas par province : les élèves locaux ont droit à plusieurs milliers de places dans une université donnée, quand ceux qui viennent de loin se battent pour vingt à trente d'entre elles.

Enfin, chaque Chinois possède une carte de résident, le hukou, qu'il reçoit à la naissance. Une carte urbaine vous donne des droits que ne donne pas la carte rurale : la politique démographique, l'accès au logement, aux soins médicaux, à l'école, aux tickets de rationnement alimentaire, la priorité à l'emploi, voire le mariage. Par conséquent, même un jeune prodige issu d'une province reculée ne pourra pas s'installer très facilement dans une grande université pékinoise.

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