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Incapable de maîtriser vos colères ? Voici les conseils d’un expert pour éviter de finir par en mourir (ou en souffrir trop)
©Allociné

On se calme

Savoir contrôler des accès de colère trop fréquents est plus important qu'on ne le pense. Outre le fait qu'ils sont désagréables pour votre entourage, ils expriment un mal-être psychologique plus profond et peuvent à la longue s'avérer très dangereux pour la santé ; dans les deux heures qui suivent une crise, le risque d'infarctus du myocarde est multiplié par cinq et le risque de rupture d'anévrisme cérébral par six.

Christophe Julia

Christophe Julia

Chrisophe Julia est psychologue clinicien diplômé de l'université de Paris 8 - IED. Il est spécialisé dans l'apprentissage de la gestion difficile des émotions (peur, colère, anxiété, perte de confiance…). Il est formé à l'hypnose éricksonienne à l'institut Milton Erickson d'Avignon, à la thérapie systémique et stratégique ou thérapie brève de Palo Alto à l'Institut Gregory Bateson de Liège.

Il est également Docteur en Sciences Economiques de l'Université de Montpellier.

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Atlantico : Selon un sondage NHS survey, 1 personne sur 10 n'arriverait pas à contrôler sa colère. Existe-t-il des personnes naturellement plus colériques que d'autres ?

Christophe Julia : Pour répondre à cette question, il faut d'abord comprendre qu'il existe deux formes de colère. La colère "saine" et la colère pathologique.

Une crise de colère est "saine" si elle est ponctuelle et courte.

Elle explose en général au bout d'une succession d'événements désagréables ou stressants, à propos d'un fait qui peut paraitre sans importance, mais qui constitue "la goutte qui fait déborder le vase". Par exemple, lorsque l'on a eu une journée de travail particulièrement stressante, que l'on tombe dans des embouteillages inhabituels en rentrant chez soi à cause d'un accident, et qu'on s’aperçoit au moment de préparer à diner que le frigo est vide car on a oublié ou pas eu le temps d'aller faire des courses, la colère explose à propos du frigo vide, alors que la véritable origine de la colère est la journée de travail particulièrement stressante.

Les émotions comme la colère font partie de notre équipement génétique, elles ont un rôle indispensable pour l’adaptation à l’environnement et pour la survie de l’espèce. Il est donc sain de l'exprimer de temps à autres. Certaines colères ont des effets bénéfiques. Celles, par exemple, qui font comprendre à un partenaire qu’il dépasse les bornes. Des colères permettent d’enrayer un processus de ressentiment ou de désinvestissement affectif. D’autres servent à faire respecter des normes sociales ou à se faire entendre avant que la situation ne dégénère.

Une fois la crise de colère passée, l'individu reprend rapidement la maîtrise de ses émotions.

La colère devient pathologique quand les crises sont trop fréquentes, trop violentes et qu'elles durent trop longtemps.

Cela signifie que l'individu exprime un mal-être plus profond, issu de son histoire personnelle ou de son environnement direct. Il n'existe donc pas de personnes au caractère plus colérique que d'autres. Ce sont des personnes qui souffrent plus que les autres, et qui expriment cette souffrance à travers des crises de colères à répétion, souvent très violentes et qui ont beaucoup de mal à passer.

Pourquoi certains ne parviennent-ils pas à se maîtriser quand tant d'autres y arrivent ?

Dans le cas de la colère "saine", sa maitrise dépend du degré d'inhibition de chacun. L'inhibition est un mécanisme psychologique qui réprime les émotions.

Comme je le précisais plus haut, il est sain d'exprimer sa colère de temps en temps, car une inhibition émotionnelle prolongée est aussi une mauvaise manière de faire face aux difficultés. Elle entraine des effets négatifs, tant du point de vue psychologique que somatique. La colère est, comme toute autre émotion, une énergie. Si nous sommes une personne trop inhibée, nous devons donc fournir un effort continu pour contenir cette énergie, ce qui contribue à créer un stress dans l’organisme. Et ce stress, s’il devient chronique, affaiblit les défenses immunitaires du corps et ouvre la porte aux maladies les plus diverses.

Lorsque la colère devient pathologique, les individus n'arrivent pas à la contrôler car c'est le seul moyen psychologique que leur cerveau a trouvé pour exprimer une souffrance. C'est une réaction mécanique, non maitrisable.

Quelles peuvent être les différentes sources de colère chez un individu ? Certaines sont-elles plus difficiles à identifier que d'autres ?

Les sources de colère chez un individu peuvent être environnementales (les relations familiales, un imprévu, du stress), ou psychologiques, dans le sens où les expressions de la colère peuvent être dues à des événements qui ont eu lieu dans la vie d'un individu, dont il souffre encore au moment présent. C'est cette dernière source de colère qui est la plus difficile à identifier, car elle n'est pas concrète, et nécessite un travail sur soi-même pour la faire disparaitre.

Se mettre trop souvent en colère est-il risqué pour la santé ?

Encore une fois, la colère est l'expression d'une énergie. Donc pendant un moment de colère, les muscles et les articulations se tendent (ou sont garrottés), le sang circule moins vite, l’équilibre des systèmes nerveux, hormonal et cardiovasculaire est altéré ; la pression artérielle augmente de la même façon que la fréquence cardiaque et l’hormone testostérone ; l’activité cérébrale est altérée (surtout les lobes temporaux et frontaux) et la bile est produite en excès, ce qui la fait apparaitre dans des parties du corps où elle ne devrait pas être.

Dans les deux heures qui suivent un accès de colère, le risque d'infarctus du myocarde est multiplié par cinq et le risque de rupture d'anévrisme cérébral par six.

Les crises de colère à répétition peuvent aussi engendrer des phases de dépression (qui succèdent à une très grosse décharge d'énergie), donc également des pulsions suicidaires.

De quels moyens dispose-t-on pour mieux contrôler sa colère actuellement ?

Si la colère est "saine", il faut, comme dit plus haut, ne pas chercher à la contrôler et la laisser s'exprimer de temps en temps.

Pour vaincre une colère pathologique, il existe la thérapie systémique et stratégique, ou thérapie brève de Palo Alto, ainsi que l'hypnose ericksonienne.

L’hypnose ericksonienne est à la fois une approche, une technique pour l’opérateur et un état particulier de conscience pour la personne qui en bénéficie. Pour l’opérateur, c’est une approche de communication valorisante et relaxante qui permet de susciter les processus naturels de guérison de la personne ; elle est une technique qui permet à la fois d’établir un diagnostic et un parcours thérapeutique. Pour la personne, elle est un état de conscience particulier qui apporte détente bienfaisante, mobilisation et réunification de ses propres ressources physiques et psychiques.

La thérapie brève de Palo Alto envisage les troubles "psychologiques" ou "psycho-somatiques" comme des réactions singulières -le plus souvent inconscientes- de la personne à des relations répétitives défectueuses et/ou "toxiques" ; que ce soit au niveau familial, professionnel et/ou au niveau social. Il s'agit d'un mode particulier d'adaptation de l'individu à des structures relationnelles "pathologiques". Elle se démarque de la théorie freudienne entraînant des thérapies longues et souvent inefficaces, il s'agit ici de collaborer avec les "patients" en travaillant sur leurs interactions avec leur environnement (et avec eux-mêmes). L'approche est pragmatique. Elle est centrée sur les difficultés d'aujourd'hui en abordant le problème actuel, concret, dans le contexte interactif du patient. Elle est focalisée sur l'obtention rapide de résultats concrets et durables. Le trouble, ou comportement irrationnel, est considéré comme le fruit de l’adaptation de la personne à un contexte donné qui est de fait "pathologique". La résolution du trouble sera le fruit du nouvel ajustement de la personne vis-à-vis de ce contexte particulier pour lui éviter d’être atteinte par celui-ci.L'approche est systémique. Elle s'appuie sur une approche globale et sur les interactions des personnes en difficulté. Ainsi, les difficultés seront d'autant plus rapidement résolues que les proches -si elles sont volontaires- participent à la mise en place de la résolution du problème.

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