Megaupload fermé aux États-Unis, un site de jeu en ligne bloqué en France : la guerre du web s'intensifie<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
High-tech
Megaupload fermé aux États-Unis, un site de jeu en ligne bloqué en France : la guerre du web s'intensifie
©

Cyber-espace

La justice tente de d'encadrer les pratiques sur Internet mais se heurte à la résistance des internautes qui tentent régulièrement de contourner les mesures législatives.

Antoine Chéron

Antoine Chéron

Antoine Chéron est avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC, fondateur du cabinet ACBM.

Son site : www.acbm-avocats.com

Voir la bio »

Quelques jours seulement après la publication du décret n°2011-2122 du 30 décembre 2011, le Président du Tribunal de Grande Instance de Paris a ordonné en référé, pour la première fois, aux Fournisseurs d’Accès Internet (FAI) français le blocage d’un site de jeu en ligne par DNS.

L'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) a mis tous les moyens en œuvre pour que l’accès au site ROMECASINO ayant l’URL www.romecasino.com soit rendu inaccessible du fait qu’il ne possède pas d’agrément lui permettant d’offrir un service de jeu de hasard en ligne en France. Ainsi, après avoir en vain mis en demeure l’hébergeur du site (iWEB) de supprimer le site, l’ARJEL a été contraint de saisir les tribunaux pour demander d’enjoindre aux FAI de le bloquer par le nom de domaine.

Le magistrat saisi de la demande de l’ARJEL ne pouvait statuer sur l’affaire tant que le décret d’application de la loi du 12 mai 2010 n’était pas publié, or ce fut chose faite le 1er janvier 2012, soit en cours de délibéré. A l’évidence, il y a tout lieu de penser que le législateur s’est hâté de fournir aux juges les moyens légaux pour qu’il puisse statuer dans des litiges liant, par exemple, des sites illégaux de pari en ligne. D’ailleurs, ni l’Autorité de Régulation des communications Electroniques et des Postes (l’ARCEP), ni la Commission Européenne, ni le Conseil National Numérique (CNN) n’ont été consultés.

Sfr, Orange, Darty, Auchan, et autres FAI ont donc 15 jours pour bloquer le site litigieux et ce pendant une durée de 8 mois. En effet, le principe de proportionnalité et l’application du droit à la liberté de communication au public en ligne ne permet pas un blocage ad vitam eternam.

En outre, l’ordonnance précise que l’injonction concerne indifféremment les opérateurs de services en lignes (type Auchan, Darty) et les opérateurs de réseaux (Sfr, Orange) car ni la loi du 12 mai 2010 ni la celle du 21 juin 2004 ne fait de distinction entre les deux. Ainsi, indépendamment du degré de contrôle qu’ont les FAI sur le réseau internet, ils devront tout mettre en œuvre pour bloquer ou rendre inaccessible les sites faisant l’objet de mesures d’interdiction.

Alors que la machine de guerre française contre les jeux de hasard non autorisés donne ses premiers résultats, celle du gouvernement américain, qui a en ligne de mire les sites de téléchargement illégaux, se heurte à la contestation virulente des acteurs du web.

En effet, le 18 janvier Wikipedia, Google, Mozilla, WordPress et quelques autres ont fermé leur site ou, à tout le moins, manifesté leur opposition aux projets de loi « Stop Online Piracy Act » (SOPA) et « Protect IP Act » (PIPA) en lecture à la Chambre des Représentants pour le premier, et au Sénat pour le second. Ces deux textes visent à renforcer la lutte contre le piratage notamment en permettant le blocage par les FAI d’un site signalé par le gouvernement comme illicite, et à mettre en place un blocage a priori des sites qui semblent contrefaire le droit de la propriété intellectuelle.

La réaction des acteurs de la toile démontre que la frontière entre la lutte contre les sites illégaux sur Internet et l’atteinte à la liberté d’expression et de communication sur Internet est ténue. En effet, le blocage est légitime si le caractère illicite du site litigieux est avéré, or la question de l’existence et des modalités d’un tel contrôle n’est pas résolue. En tout état de cause, il est manifeste que les utilisateurs d’Internet auront peu ou prou toujours la faculté de contourner ces mesures.

D’ailleurs, il est fréquent, lorsqu’un site Internet est bloqué par des mesures d’interdiction, que le propriétaire dudit site modifie l’adresse de celui-ci (URL) pour continuer à diffuser ses contenus sur Internet. De même, les internautes ont eux aussi des outils pour contourner les mesures de blocage. Ainsi les internautes, qui fréquentent les sites de jeux en ligne interdits, utilisent fréquemment d’autres résolveurs que ceux fournis par leurs FAI, comme par exemple ceux de Google, OpenDNS ou Telecomix pour y accéder. 

En tous les cas, les opposants aux mesures coercitives sur Internet dénoncent ces tentatives d’aseptisation de l’Internet et de restriction de la liberté d’expression, valeur caractérisant l’Internet aujourd'hui. Ils révoquent les prétendus faux-semblants de lutte contre les Pirates du Net. D’ailleurs, il va convenir d’observer les réactions des opposants aux récentes mesures américaines de fermeture du site de téléchargement MegaUpload opérée par saisie des noms de domaines MegaUload et MegaVideo en date du 19 janvier 2012.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !