Après les cadeaux électoraux imposés par l’Elysée, les ministères menacés d’un coup de rabot de 2 milliards d’euros : quand Matignon fait les mêmes erreurs de gestion qu’un ménage pauvre<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Après les cadeaux électoraux imposés par l’Elysée, les ministères menacés d’un coup de rabot de 2 milliards d’euros : quand Matignon fait les mêmes erreurs de gestion qu’un ménage pauvre
©Reuters

Gestion à la petite semaine

Après avoir débloqué plusieurs milliards depuis le début d'année, Matignon aurait demandé aux ministères de diminuer leurs dépenses pour atteindre les objectifs en matière de déficits. Une politique budgétaire qui ne sera pas sans conséquence, en l'absence d'une politique restrictive réfléchie.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

Voir la bio »

Atlantico : Selon une information des Echos, Bercy aurait récemment envoyé des lettres de "cadrage" aux ministères pour leur demander un nouvel effort, afin de remplir l'objectif de baisse des déficits de 2.7%. A quels "rabotages" les différents ministères pourront-ils procéder ?

Pierre-François GouiffèsLe ministère du Budget a la redoutable tâche de positionner pour la première fois du quinquennat le déficit sous la barre des 3% - ce qui serait une première en dix ans mais très loin de l’objectif initial du quinquennat d’un équilibre budgétaire en 2017 -, d’intégrer les dépenses nouvelles évoquées au fil de l’eau par le Président de la République sans mettre en chantier de nouvelles réformes de fond puisque nous sommes à moins d’un an de l’élection présidentielle.

De cet ensemble de contraintes voire d’incompatibilités ne peut ressortir que le contenu évoqué des lettres de cadrage des budgets ministériels, élément classique de la procédure budgétaire avec une application assez explicite du principe du rabot pour tous les départements ministériels non prioritaires (secteur régalien et éducation) concernant soit les dépenses de fonctionnement et de personnel (réduction des effectifs et stabilisation de la masse salariale) via un discours productiviste, soit les dépenses d’intervention et notamment la stabilisation des dépenses sociales (1,75 % de hausse pour les dépenses d’assurance maladie par exemple).

Depuis le début de l'année 2016, le gouvernement a débloqué de nombreux budgets pour revaloriser les salaires des fonctionnaires, augmenter les effectifs dans l'Education nationale... Cette gestion des budgets, qui consiste à dépenser plus que prévu pour ensuite "raboter" sans réel discernement est-elle vraiment raisonnable ? Peut-on craindre que les choix de restrictions de dépenses aient de mauvaises conséquences, car non-intégrées dans une véritable stratégie de réduction des déficits ?

Le débat actuel sur les lettres plafonds budgétaires fait suite à plusieurs mois et semaines au cours desquels la communication politique de l’exécutif mettrait plutôt en exergue une « relâche budgétaire » du fait d’annonces telles la formation de 500 000 demandeurs d’emploi, la revalorisation du point d'indice des fonctionnaires, l'accord sur la rémunération et les carrières dans la fonction publique, les dépenses nouvelles régaliennes liées au nouveau contexte sécuritaire…

En face il y a le regard permanent porté par les partenaires français de la zone euro et de la Commission sur la situation des déficits et de la dette française, sans oublier des prélèvements obligatoires record : la Commission prévoit pour 2016 que la France dépasse le Danemark et devienne le pays de l’Union Européenne ayant le niveau de prélèvements obligatoires le plus élevé.

Face à ces injonctions contradictoires et en fin de cycle électoral, il ne reste plus qu’à répartir sur tous les secteurs non prioritaires la contrainte globale via la méthode du rabot. Il s’agit donc de tenter d’expédier les affaires courantes budgétaires tout en essayant de préserver un minimum de crédibilité pour la France tout en respectant les annonces déjà faites…

Les dépenses d'investissements par exemple sont au plus bas depuis 1955 en France. En 2015, ils ont encore baissé de 3,8% par rapport à 2014. Selon une étude Natixis pourtant, les investissements publics en France sont des moteurs potentiellement très puissants de l'économie nationale, et à un coût dérisoire à moyen terme. Quelles seraient les sources d'économies plus judicieuses selon vous ?

Il y a de fait quatre grands blocs de dépenses des administrations publiques : les dépenses de fonctionnement et notamment les dépenses de personnel, les prestations sociales, les dépenses d’investissement et enfin la charge d’intérêt sur la dette.

Les deux seuls blocs de dépenses qui ont baissé depuis 2012 sont les charges d’intérêt (la baisse inédite des taux d’intérêt compense l’augmentation du stock de dette qui tutoie désormais les 100 % du PIB) et les dépenses d’investissement, du fait notamment de la baisse des dotations aux collectivités territoriales qui représentent traditionnellement les deux tiers de l’investissement public civil et qui ont à court terme bien davantage ajusté leurs investissements que leurs dépenses de fonctionnement et leurs effectifs…

C’est clairement dans le champ des dépenses de fonctionnement et des prestations sociales qu’existent la masse majeure des dépenses (plus de 90% du total) et donc le potentiel majeur d’économie mais ces dépenses continuent à progresser depuis 2012. De tels ajustements passent par une réforme de l’Etat providence, le fait d’assumer des réformes de productivité et de redéfinir ce dont l’Etat s’occupe et ce dont il ne s’occupe plus ce qui renvoie également à la place que l’Etat doit prendre dans la société.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !