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TVA sociale : le coup de poker de Nicolas Sarkozy
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Objectif 2012

Le timing souhaité pour la mise en place de la TVA sociale divise jusque dans les rangs de la majorité, certains allant jusqu'à suggérer d'attendre l'après-élections. Nicolas Sarkozy, qui en a fait l'une des clés de sa réélection, attendra-t-il comme on le lui demande dans ses rangs ?

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Et si la TVA sociale, dite TVA anti-délocalisation, était à la majorité ce que la création de soixante mille postes d’enseignants est au parti socialiste ? La comparaison peut sembler hasardeuse, mais les deux sujets jettent le trouble dans leur camp et risquent de plomber leur candidat respectif. Nicolas Sarkozy n’a pas (encore) eu besoin de recadrer ses troupes, comme François Hollande a dû le faire après la polémique interne au PS : le projet de TVA sociale, aussi baptisée réforme du financement de la protection sociale, n’est pas complètement formalisé.

Dans les allées du pouvoir, ceux qui approuvent globalement le principe de cette réforme destinée à créer un "choc de compétitivité" se montrent plus que dubitatifs sur le calendrier de sa mise en œuvre. Nicolas Sarkozy et ses proches voudraient que les choses aillent vite, que la réforme soit votée avant la suspension des travaux parlementaires reportée à début mars. Avec un allègement des charges salariales des entreprises, et un transfert partiel de celles-ci notamment sur la TVA, le chef de l’Etat est convaincu de détenir l’arme fatale contre le chômage. Mais les élus de son camp n’en sont pas aussi sûrs. Ils ont encore en mémoire les sièges perdus de 2007 à cause de cette idée. Et la formule de Lionnel Luca, le député UMP des Alpes-Maritimes, membre de la Droite populaire, fait florès : "Chaque point de TVA de plus sera un point de moins pour les députés de l’UMP aux législatives de juin", a-t-il déclaré. Et pour cause : qui dit augmentation de la TVA, pense hausse des prix. Une perspective inenvisageable pour des élus de la majorité, également en campagne pour leur réélection. Le mécanisme que Nicolas Sarkozy va proposer dans quelques jours sera sans doute plus complexe que ce simple système de vases communicants, mais la manœuvre s’annonce délicate, car difficile a expliquer à l’opinion.

C’est sans doute la raison pour laquelle le président de la République s’est montré prudent, se contentant d’annoncer des mesures quasi immédiates pour l’emploi (financement du chômage partiel pour éviter les licenciements et effort pour la formation) et s’en tenant aux principes pour ne pas donner l’impression de brusquer les leaders syndicaux qui ne veulent pas entendre parler de cette réforme. Tout en invoquant la nécessité de mettre en place des mesures fortes pour remédier à la "situation extrêmement préoccupante de l’emploi", il s’est plié au rituel des sommets sociaux, qui pour être crédibles doivent forcément durer longtemps, ce qui fut le cas (la réunion a duré plus de quatre heures).

Pour prolonger cet esprit de concertation, ou du moins en donner l’impression, François Fillon a été chargé de consulter les parlementaires, appelés à voter en faveur de cette réforme. Beaucoup de députés UMP sont bien moins pressés que le chef de l’Etat, même s’ils ne sont pas hostiles à une réforme du financement de la protection sociale. Des voix s’élèvent contre toute précipitation ; d’autres proposent une solution médiane : voter rapidement la réforme et étaler sa mise en œuvre dans le temps ! Pourquoi ne pas attendre le lendemain des élections, va jusqu’à suggérer le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale Christian Jacob, qui se dit favorable au projet ? Cela permettrait à Nicolas Sarkozy de la faire appliquer sitôt réélu ; sous entendu, en cas d’échec, elle serait de toute façon remise en cause par son successeur. Le chef de l’Etat, qui sera lui aussi en campagne dans quelques semaines, est-il prêt à entendre ces arguments ? C’est tout son dilemme : en perte de vitesse dans les sondages, il espère opérer un redressement et gagner grâce à l’adoption de mesures fortes, fussent-elles impopulaires dans un premier temps (comme l’a été la réforme des retraites), mais indispensables pour le bien du pays d’après lui. Seul contre tous.

Des plaidoyers de campagne pour remplacer la pédagogie, alors que ses adversaires politiques pilonneront le projet et que ses amis le soutiendront du bout des lèvres ? Le pari est des plus risqués. Mais c’est apparemment le défi que s’est lancé Nicolas Sarkozy.

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