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Hongrie : "L’Europe court à sa perte si elle laisse l'un de ses membres bafouer ses valeurs"
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Orban mise au ban

Le Premier ministre conservateur hongrois, Viktor Orbán, devant le Parlement européen ce mercredi. Il défendra la position de son gouvernement jugée trop autoritaire et nationaliste par les autres membres de l'UE.

Paul Gradvohl

Paul Gradvohl

Paul Gradvohl est historien, spécialiste de l’Europe centrale contemporaine. Il est notamment responsable du Master Mention Langues et Cultures Étrangères de l'université de Nancy 2, et membre du CERCLE, le Centre de Recherche sur les Cultures et les Littératures Européennes, France - Europe centrale – Europe orientale.

Il est également un des initiateurs de la pétition S’engager pour la Hongrie, s’engager pour l’Europe et du groupe facebook qui lui est consacré.

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Les conservateurs hongrois "bon teint" (voir par exemple la Fondation Lajos Batthyány qui vient de produire une analyse en quatre pages sur les vertus de l’actuel gouvernement) expliquent, comme l’a fait dans Le Monde András Lánczi, que la politique actuelle du gouvernement Orbán s’explique par la nécessaire revanche contre l’internationalisme communisme, et l’enrichissement des élites issues du communisme.

L’affaire serait donc simple... Face aux puissances étrangères de l’argent et à celles du mal politique (nationales), il faut plonger le pays dans une profonde instabilité institutionnelle et juridique, tout en utilisant l’État national pour contrôler l’économie au nom du peuple. Le patriarcat orthodoxe de Moscou ne disait pas mieux (bien sûr sans évoquer la dimension anti-communiste) dans son communiqué du 3 janvier 2012, plein d’empathie pour le héros hongrois attaqué par les Occidentaux.

La création d’une classe moyenne nationale comme horizon absolu est donc ouvertement présentée comme le but ultime de la politique conservatrice, et pas seulement en Hongrie. Seulement voilà, dans ce pays comme dans d’autres en Europe, c’est la précarisation qui est la question sociale majeure, et la solidarité tant socio-économique que civique qui est l’enjeu premier.

Or, avec une taxation homogène à 16 % sur l'ensemble des revenus (riches et pauvres), avec des droits d'inscription prohibitifs pour conduire des études supérieures à partir de l’an prochain, avec la suppression de toute autonomie des médias publics (et des pressions accrues sur tous les autres), en quoi répond-on à ces défis majeurs ? En rien. La fameuse classe moyenne ne peut alors exister que sous forme de "clientèle politique", puisque les institutions sont déstabilisées. Quant à la population, elle est priée de vivre dans la peur des non-Hongrois, et se doit de faire allégeance au parti dirigeant. Pour l'exemple, Viktor Orbán n'a pas hésité à comparer (mars 2011) la ville de Bruxelles à Moscou, quand celle-ci imposait son système à la Hongrie.

Il est clair que la démocratie ne prendra son essor que si droite et gauche sont suffisamment éclairées pour interagir dans le respect, même en cas de fort désaccord, et que l’Europe court à sa perte si elle laisse un de ses membres bafouer ses institutions et ses valeurs.

Après les élargissements successifs et la mise en place de l'euro, la crise hongroise doit permettre à l’UE d'engager une dynamique nouvelle, celle du civisme européen. L’Europe vit en ce jour à Strasbourg son heure de vérité, et il est à espérer qu'Angela Merkel maintienne ses positions de lundi sur la Hongrie, et qu’aux tristes "ersatz de poujadisme" qui se font jour partout en Europe réponde une ferme volonté démocratique.

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