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 “Chiens sac à main” : cette nouvelle tendance qui fait exploser le trafic de chiots en Europe
©Flickr

Les 101 chihuahuas

Les chiots sont devenus un accessoire recherché. Les trafiquants l'ont bien compris et s'en frottent les mains

​Anne-Claire Chauvancy

​Anne-Claire Chauvancy

Anne-Claire Chauvancy est responsable de la protection animale pour la Fondation Assistance aux animaux.
 
Créée en 1931, et reconnue d'utilité publique en 1989, la Fondation assistance aux animaux est la première fondation de protection animale en France et a fait de la lutte contre toute souffrance animale sa mission première. Elle recueille chaque année dans ses refuges plusieurs milliers d'animaux maltraités ou abandonnés.
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Atlantico: Les chiots sont l'objet d'un trafic très juteux du crime organisé en Europe. Pourquoi le jeune chien, plus que les autres espèces, est-il victime de ces trafics?

Anne-Claire ChauvancyLe trafic animal est la troisième source d'économie souterraine mondiale. C’est, par conséquent, un commerce extrêmement important. Les chiens sont victimes de ces crimes organisés parce qu’ils ne sont pas une espèce protégée. Ils sont aussi plus faciles à transporter, à dissimuler et, par conséquent, moins facilement contrôlés.

Ajoutez à cela qu’en Europe, les animaux de compagnie sont très demandés. Et le chien est à la troisième place de l’animal le plus recherché. En France, nous comptons 60 millions d’animaux de compagnie et le chien gagne la place du préféré. Il faut aussi savoir que le trafic naît des modes. En ce moment, la tendance est au chien "sac à main". C’est à dire le petit chien qui se porte comme un sac à main. Ces effets de mode créent des demandes importantes et soudaines auxquelles le marché ne peut pas répondre rapidement. Ainsi, le chiot est la poule aux œufs d’or du crime organisé. Sans ces effets de mode contestables, il y aurait moins de trafic.

Quelles sont les nouvelles méthodes des trafiquants pour importer et vendre leurs "marchandises"?

Depuis l'ouverture des frontières européennes, il y a un marché opaque qui s'est développé avec les pays de l'Est, caractérisé par une production massive qui transite en général par la Belgique. On a vu apparaître des fermes-usines dans ces pays. Des élevages intensifs dans lesquels les animaux reproducteurs sont stockés pour reproduire, et les chiots revendus en gros. Les éleveurs peuvent être considérés comme des grossistes de chiots.

Ensuite, les revendeurs - appelons-les comme cela - qui ont acquis au prix de gros un certain nombre de chiots de différentes races les revendent aux particuliers, en publiant notamment des annonces en ligne. Les annonces en ligne sont très peu contrôlées, voire pas du tout. En plus, il y a une telle demande pour les petits chiens de race qu’il suffit de les vendre un peu moins cher que le prix du marché pour trouver facilement preneur.

Le fait que les trafiquants créent de faux papiers au chiot n’est pas nouveau, mais aujourd’hui, ils vont jusqu'à faire croire qu'un certain chien est la mère des petits, pour donner l’impression d’un élevage traditionnel. Alors pour s'assurer du lien entre la "mère" et le petit, il faut demander à voir les papiers du petit et de la mère car le revendeur ne pense pas toujours à truquer les papiers de la mère. Si jamais le "stock" n’est pas écoulé, les prix sont baissés et vendus au premier venu. Sinon, les pauvres bêtes peuvent être gardées pour la reproduction, ou tout simplement éliminées.

Arrive-t-il souvent que les futurs propriétaires se portent acquéreur d'un chiot en toute conscience de l'illégalité de leur acte, ou ne savent-ils généralement pas qu'il s'agit d'un chiot volé?

Généralement, quand il y a un doute, les particuliers ne veulent pas trop savoir ce qu'il y a derrière. Ils ferment les yeux. Malgré tout, si on peut se procurer un chiot chiwawa à 600 euros, alors que ça coûte le double, il faut se poser la question de l’origine de l’animal. Le prix peut-être un indice. Les gens, en général, préfèrent se tourner vers une vitrine officielle. En effet, les chiens issus des trafics comportent de nombreux désavantages. Ils n'ont pas de papiers, ou de faux papiers. Ils sont retirés trop jeunes de leurs parents et ne seront pas équilibrés. Ils vivent dans des situations insalubres et traumatisantes, sont transportés dans des conditions abominables. Il est très fréquent que les animaux soient malades à l'achat, voire qu'ils décèdent dans les jours qui suivent.

Notre association est souvent amenée à saisir des chiots issus de trafics, des chiens de race à la mode : des chiwawas, des bouledogues etc. Dans notre dernière saisie, les chiens venaient d'un particulier qui, de fil en aiguille, comprenant que le business était lucratif, a créé sa ferme-usine. Les chiens ont été retrouvés dans un état déplorable. Ils étaient dans des cages de transport, qui constituaient leur habitat et n’en sortaient jamais. Je vous épargne les détails, mais les cages n’étaient jamais lavées…

Concrètement, comment reconnaitre un chiot issu d'un trafic et un chiot issu d'un élevage régulier?

La différence entre le chien issu d'un élevage régulier et celui issu d'un élevage de trafic n'est pas visible sur le chiot, quand il est tout jeune. Si les acheteurs vont chez un éleveur, ils doivent à tout prix regarder les parents du chien, la fratrie. Parce que si le chiot vient véritablement de cet élevage, il doit encore être entouré de la mère et d’autres chiots de la portée. Il faut aussi vérifier que l'animal n'ait pas l'air plus jeune que l'âge annoncé sur les papiers. En effet, il est interdit de vendre un animal de moins de 8 semaines. Il faut également demander à faire le tour du propriétaire : si on se retrouve dans une situation où l'on voit plusieurs chiots de plusieurs races et pas d'adultes, on peut se poser la question de leurs origines. Autre indication très concrète : vérifier que le passeport du chien est français et que sa puce commence par 250, l'identifiant français. Si les animaux viennent des pays de l'Est, la puce commence par 900, ou 600 pour la Russie.

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