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Les secrets de la Nuit Debout se dévoilent peu à peu
©Reuters

Lutte fratricide

La Nuit Debout, grand mouvement de foule spontané exprimant la volonté et l’intérêt général ? C’est évidemment l’apparence que le mouvement voudrait se donner. Les révélations se multiplient toutefois sur la face cachée de ce qui apparaît de plus en plus comme une opération joliment téléguidée.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Le rôle bien connu de François Ruffin

François Ruffin est le réalisateur désormais bien connu du documentaire Merci Patron ! Il est aussi à l’origine du mouvement Nuit Debout, avec le journal Fakir et Frédéric Lordon.

"Le 23 février, on a donc organisé une rencontre publique à la Bourse du travail qu’on a baptisée : "Leur faire peur". L’idée, c’était de faire converger des luttes dispersées, qu’il s’agisse de celle contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, de celle des ouvriers de Goodyear, de celle des profs contre la réforme des collèges, etc. On avait convié des syndicalistes, des militants, des intellectuels… Dans la salle, il y avait près de mille personnes. En deuxième partie de soirée, après les interventions publiques, est venu le temps des interventions officieuses. Des tas de gens sont venus s’agglutiner autour de Loïc Canitrot, de la Compagnie Jolie Môme, de Johanna Silva de Fakir et de moi-même, avec une question : "et maintenant, on fait quoi ?""

Contrairement aux idées reçues, le mouvement n’est donc pas apparu spontanément le 31 mars, à l’issue d’une projection du film de Ruffin. L’idée de se servir d’une projection pour créer un mouvement d’émotion à l’occasion de la journée de manifestation du 31 mars contre la loi El-Khomri avait germé bien avant…

Le Front de Gauche aux avant-postes

Si l’intervention de Ruffin, appuyée par Lordon, le Savonarole de la révolution prolétarienne, commence à être bien connue, d’autres éléments plus diffus permettent de comprendre peu à peu que tous ceux qui s’intéressent à Nuit Debout sont loin d’être des loups solitaires. Par exemple, Nuit Debout n’explique pas clairement que la déclaration en préfecture du rassemblement place de la République est quotidiennement faite par une certaine Leila Chaïbi.

Curieusement, personne ne précise que l’intéressée était la porte-parole de Jean-Luc Mélenchon en 2012. La voici sur une vidéo de campagne à l’époque:

Bien joué, non ?

Les intermittents du spectacle en embuscade

Dans la foulée de ces interventions sous-jacentes, évaluées à un pôle d’une quinzaine d’organisateurs, on trouve par exemple un certain Iwan Lambert, intermittent du spectacle, qui se définit sur son site Internet comme "en lutte".

Iwan Lambert a notamment joué au Théâtre du Soleil, la scène d’Ariane Mnouchkine, constituée en SCOP, mais qui apprécie les généreuses subventions de l’Etat ou des collectivités locales. On peut détester le capitalisme et le système tout en profitant de ses bienfaits…

Iwan Lambert s’est illustré par des prises de position radicales sur la ligne à suivre dans Nuit Debout. Il est l’un des principaux adversaires de la tendance "molle" du mouvement.

Les "centristes" de Nuit Debout

Baki Youssoufou et Noémie Toledano sont les figures les mieux identifiées de la tendance "centriste" de Nuit Debout, celle qui privilégie la délibération au détriment de l’action. Ces deux inconnus ont fondé l’agence RAIZ, qui détient les noms de domaine de la Nuit Debout:

Baki Youssoufou n’est toutefois pas un total inconnu de la scène sociale. Il fut notamment président de la Confédération Etudiante, syndicat étudiant aujourd’hui disparu, mais qui se définissait comme réformiste. Si, à titre personnel, Youssoufou s’est défini comme "anarcho-syndicaliste",  son engagement l’avait conduit à renouveler le partenariat avec la CFDT.

Au passage, Youssoufou a beaucoup lutté contre la circulaire Guéant concernant les étudiants étrangers. Il n’est pas donc un inconnu non plus pour le Ministère de l’Intérieur. La Préfecture de Police a donc dû être relativement rassurée en apprenant que cet élément localisé dans son paysage avait déposé les noms de domaine.

Lutte fratricide au sein du Mouvement

Entre les gauchistes révolutionnaires pilotés par le Front de Gauche et animés par Lordon et Ruffin d’un côté, et les centristes réformistes qui adorent délibérer, la cohabitation risque fort d’être éphémère. Les coups de force auxquels nous assistons en ce moment le montrent. Les gauchistes veulent du sang, de la sueur et des larmes, quand une majorité préfère une logique beaucoup plus pacifique et consensuelle.

Le défilé du 1er mai devrait constituer un bon test sur le rapport de force interne au mouvement – en coulisse, bien sûr, puisque, selon un discours officiel de moins en moins tenable, la Nuit Debout n’est noyautée par personne. 

Cet article a initialement été publié sur le blog d'Eric Verhaeghe

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