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Gennevilliers, Bussy-Saint-Georges : les faits divers sont-ils de droite ?
©Reuters

Petit agacement médiologique

Conforter, activement ou par omission, les préjugés de ses lecteurs, ce n'est pas faire de l'information.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Je ne veux pas en tirer une théorie générale parce que c'est probablement trop anecdotique, au sens où il faudrait prendre le temps de faire cette constatation sur une durée plus longue et avec davantage d'exemples, mais je suis intrigué par la manière dont certains médias évitent soigneusement d'évoquer les faits divers qui ne servent pas leur choix narratif global (voire le desservent).

Les affaires du tabassage de Gennevilliers (une ado qui portait une jupe est agressée par la version locale des pasdarans iraniens) et du serrurier de Bussy-Saint-Georges (trois jeunes montent un guet-apens contre un type parce qu'ils le croyaient juif et l'envoient à l'hosto) sont ainsi rapportées dans la plupart des médias estampillés "de droite" ou nominalement politiquement "neutres" (la PQR, les radios et télés d'information continue), mais ne méritent même pas une mention ou une simple reprise de dépêche AFP factuelle dans Libé, L'Obs, L'Huma, Mediapart ou Le Monde – à l'heure où j'écris ces lignes s'entend.

A lire aussi sur notre site : "Rouée de coups à cause de sa jupe ! Mais tout va bien : personne ne lui a dit "mets ton voile salope !""

On pourrait imaginer que c'est parce que ces journaux ne rapportent généralement pas de faits divers banals, mais ce n'est évidemment pas le cas. A fortiori lorsque lesdits faits divers semblent s'inscrire dans un contexte plus vaste et légitimement sujet à débat (le contrôle moral et vestimentaire désormais exercé sur les habitants de nombreux quartiers, la dimension quasi culturelle de l'antisémitisme dont font preuve certains jeunes...).

Assurément, le reproche pourrait probablement être retourné, et le constat d'un black-out sur les informations desservant le storytelling des médias "de droite" établi à l'occasion. Et peut-être suis-je moi-même inconsciemment "partisan" dans mes observations, ayant tendance à repérer tel "biais" plutôt que tel autre.

Mais, et ce n'est pas un biais pour le coup, plutôt une conclusion logique, la défiance croissante à l'égard de la presse serait sans doute tempérée par une plus grande volonté des rédactions d'affronter le réel et de faire réfléchir au lieu de conforter, activement ou par omission, les préjugés de leurs lecteurs. Et ça vaut pour tout le monde.

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EDIT / Tout vient à point à qui sait attendre : Libé vient tout juste de mettre un papier en ligne sur Gennevilliers. Il est intéressant parce que, plus qu'une relation tardive des faits, il est construit comme une mise en perspective laborieuse de l'événement et une alerte sur le danger d'une récupération par les usual suspects : on ne saurait pas exactement ce qui s'est passé, l'auteure de l'agression n'aurait pas porté les premiers coups, ces crapules de Collard (FN) et Copé (LR) auraient même twitté quelque chose sur le sujet...

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