Marine Le Pen : un programme économique néfaste pour le niveau de vie des Français<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Nicolas Bouzou : " Le fait que les sondages donnent Marine Lepen potentiellement présente au second tour montre que presque tout reste à faire dans ce pays en matière de pédagogie économique."
Nicolas Bouzou : " Le fait que les sondages donnent Marine Lepen potentiellement présente au second tour montre que presque tout reste à faire dans ce pays en matière de pédagogie économique."
©

Écoscopie

Marine Le Pen a présenté jeudi le chiffrage de son programme économique. L'économiste Nicolas Bouzou analyse la pertinence des propositions formulées.

Nicolas Bouzou

Nicolas Bouzou

Nicolas Bouzou est économiste et essayiste, fondateur du cabinet de conseil Asterès. Il a publié en septembre 2015 Le Grand Refoulement : stop à la démission démocratique, chez Plon. Il enseigne à l'Université de Paris II Assas et est le fondateur du Cercle de Bélem qui regroupe des intellectuels progressistes et libéraux européens

Voir la bio »

Lire aussi l'interview de Marine Le Pen :
Marine Le Pen : comme l'UMP ou le PS,
"François Bayrou a soutenu toutes les politiques qui nous ont menés à la crise"


Le programme économique du Front national s’inscrit dans une tradition nationaliste, qui mêle étatisme et fermeture économique. Ce programme est pour l’essentiel cohérent, et c’est l’une des raisons qui explique qu’il soit susceptible de convaincre.

Comme je l’ai expliqué dans Le Chagrin des Classes Moyennes, l’articulation de la mondialisation et du progrès technique génère une immense vague de « destruction créatrice », qui fait naître tout à la fois de la croissance et des inégalités. La classe moyenne est en quelque sorte pour partie aspirée vers le haut, et pour partie aspirée vers le bas, même si le niveau de vie moyen continue, malgré les apparences, de progresser.

Face à cela, deux stratégies existent. La première - que je défends comme la plupart des économistes - souligne que les pouvoirs publics ne doivent pas freiner la mondialisation et l’innovation, mais plutôt permettre aux plus vulnérables d’en profiter. La démocratie, en s’orientant vers le centre-gauche ou vers le centre-droit, détermine les moyens à mettre en œuvre, qui vont du renforcement du rôle de la formation à la lutte contre les rentes anti-concurrentielles, en passant par la fiscalité. 

La deuxième stratégie, qui est celle du Front national - mais qui est aussi partagée par certaines personnalités de la gauche et de la droite classiques -, consiste à refuser la mondialisation et le progrès technique, par exemple en militant pour la réactivation des barrières douanières (le programme du FN évoque une « taxe à l’importation », pourtant interdite par le droit communautaire) ou en sortant de l’euro. Ces deux mesures reflétant d’une certaine façon une même préférence pour « l’autarcie économique ». Cette politique serait d’une certaine manière efficace pour protéger les classes moyennes, puisqu’elle supprime une source de creusement des inégalités, mais elle est surtout terriblement réactionnaire. Pour la résumer, elle ressoude peut-être le corps social, mais au prix d’une immense régression partagée, il est vrai, par tous. La politique de réduction de l’immigration prônée par le FN renforcerait cette régression, en ôtant à la France un élément de croissance à long terme.

Au passage, cette dépression renforcerait les pressions que la France subit sur ses finances publiques, ce qui rendrait certaines propositions de Marine Lepen non finançables. En particulier l’instauration d’un salaire parental qui, non seulement coûte cher, mais diminuerait en outre les recettes publiques en abaissant le taux d’emplois féminin.

Globalement, l’analyse économique montre que la mise en œuvre de ce programme déboucherait sur un affaiblissement structurel de la croissance - donc du niveau de vie moyen - et sur une intensification des problèmes de finances publiques. Enfin, et ce n’est peut-être pas le point le moins important, certaines mesures comme la sortie de l’euro n’ont jamais fait l’objet d’une étude coûts / avantages sérieuse. Il s’agirait d’un véritable saut dans l’inconnu.

Pour terminer sur une considération plus générale, le fait que les sondages donnent Marine Lepen potentiellement présente au second tour montre que presque tout reste à faire dans ce pays en matière de pédagogie économique.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !