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Cet incroyable talent d'économiste qui permet à Thomas Piketty de conclure que l'Europe sombre dans l'islamophobie
©Reuters/Charles Platiau

Continent vieux et moississant

L'enfer est pavé de bonnes intentions. Et l'auteur du "Capital au XXIème siècle" s'y connait en maniement de pavés.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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L'économie, c'est intéressant. Mais s'y intéresser sans cesse peut tourner à une triste, et ruineuse pour le moral, monotonie. C'est pourquoi Thomas Piketty a, pendant quelques instants, délaissé les chemins austères qu'il parcourt depuis toujours pour arpenter les sentiers, sans doute plus frais et plus neufs, tracés par un prophète qu'il est interdit de caricaturer. "L'Europe devient-elle islamophobe ?" : tel est en effet le titre du texte qu'il vient de publier dans Le Monde. Le point d'interrogation est là pour la forme : Piketty juge que l'Europe est déjà farouchement hostile à l'islam et il s'en inquiète.

L'économiste s'appuie sur des chiffres et des statistiques apparemment irréfutables. On ne les réfutera donc pas. Des enquêtes fouillées montrent, selon lui, qu'il est beaucoup plus facile de trouver un travail qualifié quand on s'appelle Michel plutôt que Mohamed. C'est l'évidence même. Il fait appel aussi à d'autres chiffres pour dénoncer l'islamophobie européenne : il y a, dit-il, sur notre continent environ 25 millions de musulmans et seul un pourcentage infinitésimal d'entre eux s'engage dans le djihad. Bien-sûr. Mais comme Piketty est un adepte de la méthode comparative, il ne nous en voudra pas de comparer.

Dans l'Allemagne d'Hitler, très peu d'Allemands avaient rejoint le rang des SS. Ils étaient encore moins nombreux à faire partie des Ensatzgruppen chargés de l'extermination des Juifs. Mais il se trouve que tous les SS et que tous les tueurs des Ensatzgruppen étaient allemands ! Il a sans doute échappé à l'auteur du "Capital au XXIème siècle" que tous les assassins djihadistes sont musulmans. Elémentaire mon cher Piketty ! Ce qui explique quand même un peu, sans en justifier les éventuels excès, l'islamophobie qui le navre.

Dans le même ordre d'idées, il devrait aussi s'intéresser, avec statistiques à l'appui, sur le nombre de Michel dans les rangs des assassins de Daesh. Sur le nombre de Michel parmi les milliers de jeunes Européens qui partent égorger en Irak et en Syrie…Il pourrait aussi relever les prénoms des membres de Boko Haram, des terroristes islamistes au Maghreb et en Afrique noire…Regarder également combien de Michel figuraient parmi les assassins de l'équipe de Charlie Hebdo, parmi les tueurs du Bataclan…

Les statistiques, quand on les utilise comme Piketty, n'ont pas d'âme et bien peu de rapport avec la vérité. C'est pas de chance pour les Mohamed (je reprends ce prénom car il est mis en avant par Piketty) qui n'ont fait aucun mal. Juste pas de chance…Pour autant ça ne fait pas de ceux qui leur préfèrent les Michel des monstres racistes, ni des islamophobes haineux. Quand on est aveugle et sourd, quand on ne cherche pas à comprendre, quand on a que de l'aigreur et du ressentiment, on écrit comme Piketty.

De toute façon, il est convaincu, ou fait semblant de l'être, que le salut de l'Europe passe par l'arrivée de nombreux Mohamed : 25 millions ce n'est pas assez ! C'est pourquoi il a salué avec émotion le "courage" d'Angela Merkel qui a ouvert les portes de l'Allemagne, et donc de l'Europe, à plus d'un million de migrants. Un million de migrants avec une sous-représentation flagrante des Michel.

Refuser cet apport, c'est pour lui courir le risque prochain d'une "Europe moisie et vieillissante". Rien de tel que des migrants pour administrer à notre continent fatigué une cure de jouvence. Car bien sûr Michel est vieux et impotent. 

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