Le calcul fait par Nicolas Sarkozy en ne donnant pas tout de suite de consigne de vote sur la loi El Khomri<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Contrairement à la déchéance de nationalité, pour laquelle il avait clairement appelé à voter, Nicolas Sarkozy n'a pas donné de consigne de vote concernant la loi El Khomri
Contrairement à la déchéance de nationalité, pour laquelle il avait clairement appelé à voter, Nicolas Sarkozy n'a pas donné de consigne de vote concernant la loi El Khomri
©Reuters

On fait quoi, chef ?

En ne prenant pas tout de suite position sur le projet de loi El Khomri, Nicolas Sarkozy parie sur l'enlisement et l'échec de François Hollande à réformer.

Michel  Urvoy

Michel Urvoy

Michel Urvoy est un éditorialiste politique, en poste chez Ouest France depuis 2007 et directeur de la rédaction du journal à Paris depuis 2009. 

Voir la bio »

Atlantico : Contrairement à la déchéance de nationalité, pour laquelle il avait clairement appelé à voter, Nicolas Sarkozy n'a pas donné de consigne de vote concernant la loi El Khomri (l'un de ses proches Luc Chatel la soutient même). Pour quelle raison selon vous ?

Michel Urvoy : Précisément parce qu’il s’est fait piéger par le projet déchéance dont la formulation a changé ! Il ne veut donc pas, et c’est logique, promettre de voter un projet dont il ignore la mouture finale. Il veut donc éviter de se mettre une nouvelle fois en porte-à-faux. Il y a une différence entre soutenir le texte, tel qu’il est aujourd’hui formulé, et voter le projet tel qu’il sera in fine rédigé. Accessoirement, en ne donnant pas de consigne, ça lui évite d’être désavoué par des parlementaires de sa famille. Mais je crois que la droite est assez unie sur cette position, à la fois favorable et prudente, personne ne sachant ce qu’il adviendra du projet dans les semaines qui viennent. Même si, sur tel ou tel aspect technique, il peut y avoir discussion.

Nicolas Sarkozy a déclaré que les lycéens et les étudiants étaient manipulés par des "conservateurs". Qui désigne-il ? Pourquoi les qualifie-t-il de cette manière, élevant ainsi Valls et Hollande au rang de courageux réformateurs ?

Le premier souci de Nicolas Sarkozy n’est pas de vanter la volonté réformatrice de François Hollande et Manuel Valls ! Il est de montrer qu’ils ont été élus sur un "mensonge" - il emploie régulièrement le terme – qui explique le sentiment de trahison des frondeurs et des électeurs déçus. Les "conservateurs", dans son esprit, sont évidemment ceux à gauche – syndicats étudiants, mouvement des jeunes socialistes (MJS), extrême-gauche, Front de Gauche, frondeurs – qui ont souvent voté Hollande au second tour, et qui empêchent de fluidifier le monde du travail et tentent de "gauchiser" la politique du Gouvernement. Il fait le pari que le Président et le Premier ministre échoueront, et qu’ils apparaîtront comme impuissants à réformer le pays. Et il en tire le constat que l’exécutif est prisonnier de forces qui ont cru qu’il mènerait une politique plus à gauche alors que sa vraie nature est sociale-démocrate, voire libérale. Tout le monde aura noté que la réforme du droit du travail ne ressemble pas vraiment à la tonalité du discours du Bourget !

Alors qu'il a jusqu'ici souhaité incarner une opposition radicale à la gauche même modérée, est-il en train de changer de cap ? Comment cherche-t-il à se positionner par rapport à ses concurrents de droite ? Tente-t-il de couper l'herbe sous le pied d'Alain Juppé qui a toujours refusé de faire de l'opposition systématique, quitte parfois à brouiller les clivages ?

Je crois que les choses sont plus simples.

Premièrement, Nicolas Sarkozy laisse la gauche se casser la figure toute seule. Il sera toujours temps de faire valoir qu’elle est disqualifiée pour réformer le pays. Il ne s’oppose pas à la réforme, mais à la méthode qui conduit à l’enlisement.

Deuxièmement, il ne peut pas soutenir un projet dont il ignore ce qu’il sera. Mais il ne peut s’opposer à un projet qui, tel qu’il est, fait partie de ce que réclame l’ensemble de la droite.

Troisièmement, ce n’est pas tellement là-dessus que Nicolas Sarkozy, s’il se présente à la primaire, fera campagne, mais sur des sujets qui clivent davantage, dans l’électorat interne au parti, vis-à-vis d’Alain Juppé ou de NKM : l’immigration, la sécurité, l’identité, plus mobilisatrices lorsqu’il s’agit de mobiliser le cœur de l’électorat sarkozyste. La question du droit du travail sera davantage un thème de la présidentielle que de la primaire. Pour moi, il n’y a donc pas de changement de cap, ni matière, sur ce sujet, à couper l’herbe sous le pied des compétiteurs de la primaire.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !