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François Hollande dans Libé : 
le changement, oui ! Mais lequel ?
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EDITORIAL

Libération publie ce mardi une tribune de deux pages de François Hollande intitulée : "Le changement c'est maintenant". Alain Renaudin partage le constat du candidat PS, mais déplore le manque de solutions.

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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Nous ne traversons pas uniquement une crise économique. Nous vivons une époque de transition, de changement, de remise en cause, et même davantage, de remise en question. Alors, appeler au changement, et même au rêve, est une bonne chose, mais c’est simplement une évidence, tout sauf un scoop. Le scoop serait de définir le contenu de ce rêve, de dessiner le modèle de l’autre rive, de mesurer la distance qui nous en sépare, d’en dessiner sa géographie.

Cette campagne présidentielle est aujourd’hui davantage basée sur un projet électoral (rejet de l’autre) que sur un véritable projet politique (adhésion). Ne pas dévoiler son projet sous prétexte de phase d’observation du camp d’en face relève aussi davantage du calcul électoral que de la conviction politique. Ce sont des solutions plus que de l’incantation qui sont attendues. Le désir d’avenir de la précédente candidate PS est devenu un désir d’incarnation de l’homme providentiel pour le candidat actuel.

François Hollande a raison de poser la question du changement comme le véritable enjeu, mais il le pose comme celui d’un changement d’homme, alors que c’est celui d’un changement de modèle, d’époque, de paradigme qui est attendu. Le rêve n’est pas d’avoir un rêve, c’est le contenu de ce rêve qui compte.

Cette quête de changement existe, mais c’est celle d’un nouveau paradigme. C’est aujourd’hui une quête qui a souvent des allures de quête du Graal, une sorte de voyage vers l’inconnu, de voyage à vue, de rêve, mais de rêve désenchanté. Cette nécessité ressentie de nouveau paradigme est anxiogène car si nous ne sommes qu’évolution, toujours en adaptation, pour la première fois sans doute depuis l’histoire des révolutions sociales, industrielles ou technologiques, cette prise de conscience de la nécessité d'un nouveau paradigme précède le nouveau paradigme lui-même. Dès lors, au lieu de post-rationnaliser telle ou telle mutation, on la désire avant de la vivre, ce qui n’est pas loin de l’idée d’attendre le Messie. D’ailleurs une des tendances de bon nombre d’enquêtes d’opinion est que « les solutions » viendront des innovations technologiques, du génie humain, de notre aptitude naturelle, presque animale, aux mutations. Cette attente est anxiogène car c’est une nécessité consciente qui crée une attente inassouvie, et qui le restera car il n’y aura pas nécessairement de « grand soir ».

Un changement souvent associé à la perte d’avantages acquis

Les changements sont d’autre part à la fois désirés et redoutés car lorsqu’ils s’appellent réformes ils signifient souvent remises en cause, qui elles même signifient souvent efforts ou pertes d’avantages acquis. C’est une autre composante, elle aussi nouvelle, de cette période de transition : il est difficile dans les temps actuels d’imaginer que celle-ci s’inscrive dans une dynamique de progrès, ou dit autrement de croissance et de richesse accrue. D’ailleurs on ne parle plus beaucoup d’approche « win-win » mais plutôt de « donnant-donnant » : la promesse dès lors n’est plus de gagner autant de part et d’autre, mais de perdre équitablement, tout un symbole. Nous rentrons dans une période comptable, de jeu à somme nulle, basé sur une croissance nulle lorsqu’elle n’est pas en récession. Trouver une alternative à la croissance revient à poser une équation assez iconoclaste tant c’est le seul moteur de notre modèle économique et social.

Mutation d’autant plus difficile qu’on la souhaiterait rapide. Nous ne supportons plus d’attendre. Si nous critiquons souvent le manque de vision de long terme, nous attendons aussi des résultats tout de suite, des réactions, de l’action immédiate. Nous souhaiterions alors un nouveau paradigme téléchargeable comme une appli sur son téléphone.

Enfin, nous attendons du leadership, en premier lieu politique, tout en le critiquant, en fondant des espoirs désabusés, cette campagne désenchantée en est l’illustration. Nous devons faire le deuil de l’Etat providence mais continuons à nous en remettre à lui à la première entrave sur la route. Le « système », que nous indiquons comme le bouc émissaire de nos difficultés, est quant à lui un ennemi virtuel, intangible, une Bastille imprenable, et le modèle économique, une dictature qui ne peut être renversée comme on déboulonne une statue.

Cette campagne présidentielle, si elle pêche par manque de vision, de solutions nouvelles, de projet politique, elle doit être un appel à projets, un ordre de mobilisation générale, pour un avenir non pas à suivre mais à co-créer. Nous sommes les hommes providentiels de ce nouveau paradigme. 

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