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Crise en vue : qu'à cela ne tienne, François Hollande ne remanie que pour sa propre candidature
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Petits calculs politiques

Patrons et syndicats sont découragés. Avec ce remaniement, le président a préféré les petits bricolages plutôt que la constitution d’un gouvernement de combat contre la crise.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le Premier ministre Manuel Valls a invité aujourd’hui, patrons et syndicats pour faire avec eux un bilan d'étape du CICE : le fameux pacte de compétitivité qui avait marqué le début d’un changement de politique économique. Tout ce beau monde va se retrouver un peu désabusé, parce que rien dans les décisions récentes du président de la République montre qu’il véritablement le projet de s‘attaquer à la situation économique.

Depuis le premier janvier, la direction du Trésor et les grands laboratoires d'analyse économiques ont prévenu les services du gouvernement des menaces que la crise financière internationale faisait peser sur les perspectives de croissance en Europe. L’Europe va être impactée dans son activité, les banques européennes vont souffrir et certains pays du sud (l’Espagne), risquent de se retrouver dans un état proche de celui de la Grèce avec cette fois-ci des conséquences systémiques beaucoup plus lourdes.

A priori, Matignon et Bercy se sont sincèrement inquiétés et aurait pris la décision de participer activement à la prochaine réunion du G7 pour réclamer une coordination internationale afin d’éviter si possible une guerre des monnaies qui aurait sur l’Europe des effets désastreux … Mais à l’Elysée, on est resté le nez sur la cuisine politique.

Alors que les milieux patronaux et les syndicats demandaient à ce que le remaniement du gouvernement débouche sur la formation d'une équipe de combat très cohérente, le président de la République a donné le spectacle d’un aimable bricolage politicien qui ne peut pas accoucher d’une ligne politique très forte. Trop de flou, trop d'incertitudes.

Les milieux d’affaires considèrent que ce nouveau gouvernement ne règle aucun des trois problèmes qui paralysent complètement l'action de l'exécutif.

Premier problème, la ligne politique. On ne sait toujours pas quelle est la stratégie de politique économique de la France. Hormis quelques déclarations d’intention, qui ne viennent d'ailleurs pas de l'Elysée, la France n’a aucunement l'intention de s’engager dans un effort de rigueur dans la gestion. On ne connaît pas ses projets face à la nouvelle économie, ni face à l’Europe. En bref, la gouvernance française en reste à défendre les rentes de situations, et des petits privilèges corporatistes. Elle va continuer d'ignorer les contraintes de la concurrence internationale, le rôle du risque, et du progrès technologique.

Pour Manuel Valls, ce remaniement est un échec, et même une humiliation.  Ses recommandations n’ont pas été entendues. La nomination d’Emmanuel Cosse au logement est une insulte aux professionnels du logement qui se remettent à peine du traumatisme infligé par Cécile Duflot qui a détruit la politique du logement.

La nomination de Jean-Vincent Placé est sympathique (il voulait tellement être ministre) mais ne dit rien de très intéressant sur la réforme de l’Etat dont il aura la charge. Or de cette réforme de l'Etat dépend la compétitive de l’administration et par conséquent de la maison France. Plus d’efficacité pour moins de dépenses publique. Placé n’est pas magicien.

Le retour de Jean Marc Ayrault n'indique rien sur la politique étrangère. Avec une question : que la politique étrangère défende les valeurs de la France, c’est bien, mais sera-t-elle, enfin capable de défendre les intérêts de la maison France ? Et notamment les intérêts économiques, Jean-Marc Ayrault est surtout entré au gouvernement parce qu’il menaçait de rejoindre les frondeurs de la gauche. Il n’a rien d'un voyageur de commerce que, sont souvent les ministres des affaires étrangères modernes.

Deuxième problème, le cas Macron. Emmanuel Macron n’a rien obtenu. Ni périmètre plus grand, ni engagement de faire passer des reformes de dopages de l'économie française. Le ministre français le plus populaire va se retrouver en totale liberté. Aucune raison qu’il arrête de faire la pédagogie de la modernité et de l’efficacité. Au contraire. François Hollande est resté sourd à ses demandes d'élargissement de compétence ; ce n’est pas lui qui défendra la loi qui aurait dû s'appeler Macron 2, il est probable qu’on ne reprendra pas la loi sur le travail le dimanche. Emmanuel Macron a toutes les raisons d’être vexé. Le président de la République ne l’a même pas remercié pour avoir été là quand il s’est agi de prendre de l'oxygène à Manuel Valls.

Très logiquement, il n’a aucune raison de ne pas se mettre à son compte si la politique continue de la passionner comme c’est probable. Macron a donc deux solutions. La première, se rapprocher de Valls et l'aider dans son entreprise de modernisation. Difficile parce que Valls va se méfier. La deuxième solution est de parier sur l’impossibilité qu’aurait François Hollande à se représenter et se lancer dans l’aventure présidentielle. Dans ce cas, il va se retrouver très vite à challenger Manuel Valls. François Hollande est assez formidable. Il avait un technicien hyper compètent, il a réussi à le transformer en politicien.

Troisième problème, le cas de la gauche de la gauche. Le remaniement a explosé le mouvement des écologistes et Cécile Duflot, Jean Luc Mélenchon n’est pas en super forme, mais les députés frondeurs restent frondeurs et députes. Plus graves, la gauche de la gauche va se mobiliser pour les présidentielles autour d'Arnaud Montebourg, ou Christine Taubira. Le résultat de cette effervescence, c’est qu’elle va brouiller à nouveau tous les débats parlementaires et paralyser une fois de plus l’action législative. Le gouvernement a peu de temps pour faire passer des reformes qu’on attend, il va avoir encore moins de liberté d’action.

L’addition de tous ces problèmes est d’autant plus grave que la situation économique n’a aucune raison technique de s’améliorer. La crise boursière va plomber à nouveau tous les ressorts de la reprise. Les milieux économiques sont plutôt découragés. Faut dire que le président est de plus en plus décourageant.   

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