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Arnaud Montebourg, le retour, c'est bientôt (et ça se prépare maintenant)
©Reuters

Objectif 2017

Remise de prix aux jeunes entrepreneurs français, demande à Taubira de ne pas cautionner la déchéance de nationalité ou encore utilisation de la formule de "Sarkhollandisme", les indices sont maigres mais suffisants pour y voir un retour en politique d'Arnaud Montebourg dans les prochaines semaines. Pour 2017, il y croit.

Maud Guillaumin

Maud Guillaumin

Journaliste à Europe 1, BFM, ITélé, Maud Guillaumin suit pour le service politique de France-Soir la campagne présidentielle de 2007. Chroniqueuse politique sur France 5 dans l’émission Revu et Corrigé de Paul Amar, puis présentatrice du JT sur LCP, elle réalise également des documentaires : « Les Docs du Dimanche », « Les hommes de l’Élysée » sur les grands conseillers de la Ve République et « C’était la Génération Mitterrand » transposé de son livre Les Enfants de Mitterrand (Editions Denoël, janvier 2010). Elle écrit également dans la revue littéraire Schnock. Elle est l'auteur de "Le Vicomte" aux éditions du Moment (2015).

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Atlantico : Plusieurs indices semblent indiquer qu'Arnaud Montebourg est en train de préparer son retour. Doit-on s'attendre à un comeback politique ? Est-ce lui ou davantage ses conseillers qui le souhaitent ?

Maud Guillaumin : Il est évident que ses conseillers lui préparent le terrain. Ils n'ont d'ailleurs jamais lâché l'affaire lorsque Montebourg a quitté le gouvernement. Ils expliquaient qu'ils étaient déçus que tout s'arrête aussi vite, même s'ils reconnaissaient qu'il y avait une discordance très nette entre ce que voulaient Hollande et Valls et les idées d'Arnaud Montebourg. Il était donc logique au final selon eux qu'il présente sa démission. Mais ils espéraient par ailleurs que derrière cette nouvelle carrière d'entrepreneur, il demeurait toujours l'envie de l'homme politique.

C'est vrai qu'Arnaud Montebourg s'est moins exprimé pendant un certain temps. Il a pris à cœur son nouveau travail d'entrepreneur. Mais aujourd'hui, avec en toile de fond l'idée d'une grande primaire à gauche, il semble clair que c'est le moment de repasser à l'attaque. Vous l'aurez remarqué, ce n'est pas lui qui la demande, il surfe simplement sur la vague de cette consultation populaire qui pourrait l'aider à terme à le remettre en selle politiquement.

Quels sont ces indices qui font penser à un retour proche ? Ce retour sera-t-il radical ou lent ?

Il s'avère que lui-même a toujours poussé pour que de telles primaires aient lieu même s'il ne s'est pas déclaré publiquement ces dernières semaines sur ce sujet. Evidemment, il estime qu'il a encore sa carte à jouer si elles ont effectivement lieu. Mais je pense qu'on assiste à un retour pas à pas. Il veut faire des apparitions au compte-goutte. Il a d'abord envoyé des cartes postales régulièrement pour montrer qu'il était toujours présent. Sa présence répétée auprès de Yánis Varoufákis allait aussi en ce sens. Même s'il ne veut pas non plus en être trop proche. Il ne sera d'ailleurs pas à ses côtés pour le lancement de son parti européen cette semaine. C'est la preuve qu'il veut faire attention à son positionnement. Et en tant qu'ancien ministre de l'Economie, il s'est taillé une forme d'autorité naturelle qu'il ne veut pas gâcher en s'unissant trop fortement de Yánis Varoufákis.

En quoi Arnaud Montebourg semble de plus en plus vouloir revenir sur le devant de la scène politique ?

Arnaud Montebourg continue son action mise en place durant son passage au ministère de l'Economie. C'est le cas de son rendez-vous annuel avec les jeunes entrepreneurs, à savoir le concours des Babybrand, lancé par Montebourg à l'époque où il était encore ministre. Il est donc dans une certaine continuité afin de montrer qu'en réalité, il est toujours dans la même démarche et qu'il n'a pas changé. Il défend toujours le made in France, cette forme de patriotisme économique.

Il s'est par ailleurs positionné contre la déchéance de nationalité, ce qui lui a permis de reprendre la parole. Il s'agit en l'occurrence de "petites" prises de position. Arnaud Montebourg ne convoque pas la presse. Il passe plus volontiers par Twitter. Il montre ainsi qu'il n'a pas raccroché les gants. Et il est vrai qu'il y a une réflexion politique qui guide d'une certaine façon son action derrière ces déclarations.

Il s'oppose d'ailleurs, et il va de plus en plus le faire, à Emmanuel Macron. Il veut montrer qu'il y a deux façons d'être ministre de l'Economie : la sienne et donc celle de Macron, plus libérale, notamment avec l'instauration du travail le dimanche. Il y a une légère différence politique de fond mais qui finalement, au lieu de les opposer, les rassemble. Macron a toujours dit qu'il n'était pas un politicien alors que Montebourg joue sur cette ambiguïté en ayant toujours un pied au PS et l'autre en dehors. Au final, c'est une certaine forme de défense et de protection qu'ils ont en commun.

Si Arnaud Montebourg ne monte pas dès aujourd'hui au front (de la politique) n'est-ce pas par peur ?

Je pense qu'il préfère ne pas trop s'avancer pour le moment au cas où ces primaires n'ont pas lieu – ce qui est un risque qui est loin d'être négligeable. Comme on est encore dans l'incertitude, il ne veut pas trop se prononcer. Il n'a d'ailleurs pas signé la pétition réclamant une primaire à gauche.  Néanmoins, un grand nombre de sondages montre qu'il est toujours dans la course. Il est devant François Hollande et Benoit Hamon. Il a encore un coup à jouer même s'il reste derrière Manuel Valls. Quoiqu'il en soit ces sondages prouvent que les Français ne l'ont pas oublié.


Quelle serait la stratégie payante pour lui en vue de 2017 ? N'est-ce pas trop tôt pour jouer sa carte dès la prochaine présidentielle ?

Il a les mêmes cartes en main qu'Emmanuel Macron. Celles d'agir en concertation avec la société civile. En tant qu'entrepreneur, il a montré qu'il était allé prendre le pouls dans le but d'agir. Je pense que c'est ce que les Français attendent. Il ne faut plus faire de la politique dans les cercles très restreints des seuls ministères. Encore une fois, il va pouvoir mettre en avant son expérience en tant que ministre de l'Economie et sa volonté d'imposer ses idées de gauche. Sa défense de Florange en est un exemple frappant. Et il aura à cœur de montrer qu'à la différence d'Emmanuel Macron, on peut redresser la France sans avoir à détruire les acquis sociaux bâtis depuis plusieurs décennies.

Va-t-il tenter sa chance dès 2017 ?

Si les primaires de gauche ont bien lieu, je pense qu'il va tenter sa chance. Cela m'étonnerait grandement qu'il ne tente pas de rebondir et de capitaliser sur son score de 17% obtenu en 2012. Celui-ci lui avait permis de surprendre tout le monde en se haussant à la 3ème place des précédentes primaires. Il a encore des partisans et il a cette force de conviction. Je pense que Montebourg reprendrait avec détermination son tour de France pour convaincre directement les Français comme il l'a déjà fait précédemment. Il a vraiment ça dans le sang. Dans l'idée, il veut poursuivre l'aventure de la gauche. Selon lui, elle n'est pas morte. Montebourg estime cependant qu'elle a été mal appliquée et c'est ainsi qu'il explique sa démission du gouvernent. A mon avis, il réécrira l'histoire avec sa vision des choses. Et il se positionnera dans les jours et les mois à venir en faveur d'une primaire à gauche.  

La question du chômage est aussi à prendre en compte dans cette équation. S'il n'a pas baissé, Montebourg expliquera sans doute que compte tenu de cet échec il faudra un nouveau candidat pour la gauche, un candidat qui défende des valeurs de gauche, celles-là mêmes qui n'auront pas été appliquées au cours du quinquennat Hollande.

Quels sont les arguments qu'Arnaud Montebourg peut mettre en avant pour rassembler la gauche puis les Français dans le cas d'une candidature à l'élection présidentielle ?

La bonne nouvelle pour lui serait que Manuel Valls décroche. Dans ce cas, il aurait la possibilité de jouer en même temps sa carte d'homme de gauche tout en se recentrant sur certaines questions. Il pourrait à ce moment-là montrer qu'en tant que ministre de l'Economie, il avait réussi à travailler avec des chefs d'entreprise et notamment des grands patrons. Cela mettrait en avant le fait qu'il sait s'adapter au monde d'aujourd'hui et à l'économie libérale.

Il pourra aussi insister sur son expérience et sa formation en école de commerce. Il est allé se frotter à ce qu'est l'économie contemporaine, ce qui lui a permis de mieux la comprendre qu'auparavant. C'est un gage aussi pour prouver qu'il sera capable d'écouter la gauche de la gauche tout en répondant aux problèmes des économies mondiales d'aujourd'hui.          

Quelle serait son point faible dans cette démarche de retour politique ?

Le point négatif c'est qu'il incarnera en partie le gouvernent qu'il a finalement quitté mais auquel il a aussi participé. Donc cet enjeu risque d'être difficile à gérer. Le fait d'avoir été dans ce gouvernement ne sera-t-il pas un caillou dans sa chaussure pour se présenter devant les Français ? Ce sera sans doute la plus grande difficulté que risque de devoir affronter Montebourg. En 2012, il avait cette image de candidat neuf. Là, il ne l'aura plus. C'est un élément extrêmement important à prendre en compte. Il n'aura plus cet élan naturel d'outsider. 

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