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La France désarmée face à une nouvelle crise financière : cette gauche élue pour être l’ennemie de la finance et qui s’est surtout fait le relais du lobby bancaire
©REUTERS/Leonhard Foeger

Merci la vie !

Lors de son discours du Bourget, le candidat Hollande a déclaré vouloir réguler la finance et le secteur bancaire. Pourtant, votée en 2012, la réforme bancaire a semblé bien vide au regard de l'intention affichée... Et certaines personnalités au pouvoir ont pu à l'époque jouer la courroie de transmission des banques françaises.

Marc Endeweld

Marc Endeweld

Marc Endeweld est journaliste indépendant, ancien grand reporter à Marianne. Il a publié plusieurs ouvrages dont "Le grand Manipulateur" (Stock, 2019) et L'ambigu Monsieur Macron (Flammarion, 2015).

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Atlantico : Lors de son discours emblématique du Bourget, le candidat Hollande a marqué l'esprit par son intention de réguler le secteur bancaire et financier. Pourtant, sa loi bancaire a été qualifié de réforme de structure à minima. Quel a été le poids du lobby bancaire dans son allègement ? Emmanuel Macron, montré du doigt comme étant le représentant de la finance à l'Elysée, y a-t-il été pour quelque chose ?

Marc Endeweld : Beaucoup de critiques, notamment de la part des frondeurs ont été portée à l'égard d'Emmanuel Macron. Pour eux, l'actuel ministre de l'Economie représente la grande finance du fait de son passage marqué à la banque Rothschild… Bien éloigné de l'idée que l'on pourrait se faire d'un représentant politique de gauche. Mais cela demeure une question d'image. Emmanuel Macron était effectivement un banquier d'affaire. Au sein de celle-ci, son rôle consistait à être un intermédiaire financier entre de grands groupes internationaux pour effectuer plusieurs types de missions : fusions, acquisitions, réorganisation d'entreprise etc. Emmanuel Macron n'a doncpas travaillé en lien avec les salles de marché où se déroulent les opérations de spéculation financière. Reste que les "deals" entre grandes entreprises, sur lesquels il a pu travailler, n'étaient souvent pas neutres, sur un plan social, pour les salariés de ces dernières... Emmanuel Macron, en tant que haut-fonctionnaire, est issu de l'Inspection générale des Finances (IGF) : un grand corps prestigieux et rattaché à Bercy, dont la mission est de contrôler les finances de l'Etat. Ce réseau est très puissant dans l'économie française et il a de multiples connexions avec les entreprises du CAC40. Par exemple, beaucoup d'anciens de l'IGF se retrouvent par la suite dans différents exécutifs des grands groupes français, ou poursuivent dans la fonction publique et se retrouvent aux manettes de la vie politique du pays. Lorsqu'il était secrétaire adjoint à l'Elysée, si la gauche du PS, mais aussi le comité Roosevelt chargé d'observer l'application des promesses du candidat Hollande sur la question de la régulation du secteur bancaire (Lire aussi : Tous aux abris face à la crise qui vient ? Pourquoi le "plus jamais ça" de l'après-désastre financier de 2008 s'est transformé en mini-réformes préventives), ont visé Emmanuel Macron, les faits sont en réalité plus complexes :

D'une part, et c'est ce que je dis dans le livre, dans les mois qui ont précédé l'élection présidentielle de 2012, Emmanuel Macron a écrit deux articles sous le pseudo "Eric Suleiman" dans un livre intitulé "80 propositions qui ne coutent pas 80 milliards" sous la direction de Patrick Weil. Il y évoque la politique économique du pays. Et dans l'un d'eux, il propose une séparation particulièrement stricte des activités financières des banques françaises, c’est-à-dire en allant plus loin que les promesses prises par son mentor qu'il soutenait déjà… Au moment de la conception de la loi bancaire, les banques universelles - la Société générale, BNP Paribas ou encore le Crédit agricole - ont d'abord actionné le cabinet de Pierre Moscovisci - et ce de manière insistante - mais également le lobby de l'IGF. Comme je le rappelle dans le livre, un auteur, Christian Salmon raconte un épisode où plusieurs mois après la décision de voter une loi a minimatout le monde s'en félicitait : Pierre Moscovisci, Michel Sapin, ainsi que des grands représentants des banques universelles. C'est la grande expression du lobby de l'IGF, celle qui a davantage pesé que la courroie de transmission représentée par Emmanuel Macron à l'Elysée. On pourrait dire qu'Emmanuel Macron fait partie de ce lobby. Mais le plus offensif contre cette loi, en reprenant les éléments de langage de la Société Générale et de la BNP Paribas a été Moscovici. Il a d'ailleurs multiplié les déclarations en faveur d'une loi a minima à l'automne 2012, ce qui n'a pas échappé à François Hollande. Au final, comme Emmanuel Macron n'est pas un technicien lambda et a un sens politique avec une certaine ambition, il sait qu'il doit bien se garder d'être offensif pour éviter les critiques. S'il n'a pas été un relais actif de l'IGF, il n'a pas agi contre ce lobby. Comme souvent, Emmanuel Macron ne transforme pas le rapport de force mais à l'image de son mentor, François Hollande, il le considère dans un premier temps et se place au mieux du barycentre politique.

Marc Endeweld est l'auteur de L'ambigu Monsieur Macron paru en novembre 2015 aux éditions Flammarion

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