Viande de terroir, bière d’abbaye, béret basque... quand la vente sur internet ouvre un marché global à l’artisanat local <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Viande de terroir, bière d’abbaye, béret basque... quand la vente sur internet ouvre un marché global à l’artisanat local
©Reuters

Travail manuel, le retour

Les mutations numériques en cours bouleversent beaucoup de "petits" métiers qui se transforment, prennent leur essor, et se digitalisent à marche forcée. Ainsi, beaucoup d'artisans tirent leur épingle du jeu en proposant leurs produits locaux, leurs créations, sur des sites dédiés.

Eric Coder

Eric Coder

Eric Coder est journaliste.

Voir la bio »

Tout le monde sait que les nouvelles technologies transforment le monde du travail et l'activité économique. Mais peu de gens se rendent compte qu'elles peuvent avoir un impact sur des métiers que l'on imagine très éloignés des problématiques technologiques : ceux de l'artisanat.

Des artisans qui tirent leur épingle du jeu grâce au numérique

Justine Conquet, responsable marketing de la maison Conquet et de son site spécialisé dans les viandes de l'Aubrac et de l'Aveyron explique de sa voix aux accents du pays : "Nous avons créé notre site il y a plus de dix ans et nous l'avons remodelé, remis au goût du jour, en 2012. Nous avions trois boutiques à Laguiole et aux alentours, l'une d'elle a fermé et du coup Internet la remplace." La vente en ligne a donc permis de remplacer la perte de l'activité de vente au détail, qui elle reste les deux pieds bien ancrés dans le terroir. "Acheter des produits locaux est entré dans les mœurs : nous avons 100 à 150 commandes par mois pour un panier moyen de 75 euros, poursuit Justine Conquet. C'est une clientèle fidèle que l'on croise souvent sur différents salons en France. Le choc culturel a été pour les transporteurs qui ont, au début, un peu halluciné à l'idée que nos produits du terroir puissent se retrouver aux quatre coins de l'hexagone", sourit-elle.

Dans ces initiatives numériques, le clergé n'est pas en reste. Pour Olivier de Silans, chargé du développement de l'Association de l'artisanat monastique, la vocation du site dont il s'occupe est "d'apporter des ressources à quelques 100 monastères cloîtrés (bénédictins, carmélites,…) pour qu'ils puissent investir dans leur développement, avec l'achat de nouveaux tracteurs, de réfrigérateurs, etc. "Nous possédons six magasins, de Paris à Toulouse mais le site Internet nous permet de rajeunir notre cible, dit-il, car il n'y a pas de cannibalisation entre nos boutiques et le site. En 2015, Internet représente 10 à 15 % de notre chiffre d'affaires. Nos clients sont soit des personnes très engagées spirituellement soit à la recherche de produits de très bonne qualité". Le site propose une grande gamme de produits, comme des tisanes, des bières trappistes, des chartreuses, ou encore des soins pour le corps.

Moins spirituelle et plus prosaïque est la démarche de Jean-Michel Beyssac, patron de la chapellerie Beyssac à Limoges, mais qui demeure similaire. "Je suis chapelier de métier et je possède un magasin à Limoges. Il y a 5 ou 6 ans, j'ai décidé de créer mon site internet. Au départ, cela m'a offert une publicité locale puis les choses se sont accélérées lorsque je suis passé au référencement payant sur Google", indique-t-il. "Il faut être en 1ère page, parce qu'on perd près de la moitié des ventes si on est relégué en seconde page. En effectuant cette démarche payante, j'ai eu un achat en 20 minutes, alors qu'il ne se passait rien auparavant. Aujourd'hui, les bérets basques représentent 10 à 12 % des achats. En boutique j'en vendais 2 à 3 par jour, maintenant j'en vends 10 à 20 par jour dans le monde entier : Etats-Unis, Australie, Europe, Japon, etc. Bientôt, je vais étendre mon site à tous le magasin et référencer 200 à 300 chapeaux".

Comment le numérique booste l'artisanat

L'artisanat sur Internet a donc le vent en poupe. "Peu de chiffres existent sur ce secteur car cela regroupe de multiples professions, des métiers de bouche aux métiers d'art", explique Audrey Harris, PDG de Soubis, un espace en ligne dédié aux artisans-créateurs des secteurs de l'accessoire, de l'ameublement et de l'habillement. Au 1er janvier 2013, l’artisanat comptait 1 100 000 entreprises qui ont généré 105 milliards d’euros de valeur ajoutée. Les créations d’entreprises artisanales se sont élevées à 173 000 en 2013, réparties à parts presque égales entre auto-entrepreneurs et entreprises classiques, selon la direction générale des entreprises (DGE) au ministère de l’Économie, de l’industrie et du numérique.

Pour Audrey Harris, la valorisation des métiers manuels est radicalement en marche : "L'intérêt des jeunes, leur appétence pour ces métiers, est devenu beaucoup plus fort qu'il y a dix ans. En outre, ils sont de plus en plus issus de familles CSP+." Un indicateur solide qui permet de mesurer l'ancrage dans la société française de ces métiers que l'on a longtemps dénigré.

Un autre aspect important de cette numérisation de l'artisanat réside dans la modification des usages. "On assiste à un désenclavement, cela permet à ces entreprises qui étaient inaccessibles de devenir accessibles au grand public", analyse Audrey Harris. Et d'ajouter : "Les innovations digitales permettent aux artisans d'élargir leurs gammes d'outils et de devenir concurrentiels".

Le e-commerce est donc devenu une opportunité pour nombre de magasins de centre-ville ou de petits producteurs nichés à la campagne, et cette tendance remet le vent en poupe à l'artisanat.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !