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40 ans d’Ethic : mais au fait, Sophie de Menthon, qu’est-ce qui a changé chez les patrons pendant ce temps-là ?
©Pixabay

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Depuis 40 ans, le mouvement Ethic, créé par Yvon Gattaz en 1976, a permis de modifier la perception de l’entreprise et du patron et cette transformation est absolument fondamentale pour bâtir une économie de confiance. Sa présidente revient sur le rôle et les enjeux de ce mouvement à l'influence décisive pour le développement de l'entreprenariat en France.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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Atlantico : Votre mouvement fête ses 40 années d’existence, quel changement avez-vous constaté? 

Sophie de Menthon : À sa fondation l'acronyme d'ETHIC signifiait "  Entreprises à Taille Humaine, Industrielles et Commerciales". Lorsque j’ai été élue à sa tête, il y a 20 ans, j’ai modifié l'intitulé pour "Entreprises à Taille Humaine, Indépendante et de Croissance "afin d’axer le mouvement sur la liberté d’entreprendre et l’éthique comme facteurs de croissance. Le Mouvement ETHIC a toujours été à l’avant garde des relations sociales dans les entreprises " il n'est de richesses que d'hommes" c'est notre conviction. Jamais subventionné ni financé par des aides publiques, ETHIC est un mouvement libre et indépendant qui est une photographie de l’ensemble des entreprises françaises : des grosses sociétés du CAC 40 aux TPE, en passant par des ETI et PME et même un auto-entrepreneur. 17 fédérations adhèrent également à notre mouvement.

Avec un management plus horizontal où le créateur d’une société est un salarié comme les autres, la rôle des patrons a-t-il évolué? 

On est finalement passé en 40 ans du paternalisme à des relations entrepreneuriales fermement syndiquées. Les syndicats dits « maison » qui mettaient de l'huile dans les rouages du dialogue social ont été remplacés par des syndicats plus politisés, dans la lutte des classes, virulents et misant toujours sur le rapport de force. Les acquis sociaux conquis depuis 40 ans se sont accompagnés, me semble-t-il, d'un durcissement des relations humaines qui n'a rien apporté. Le patron d’hier, surtout les patrons de PME, faisait en quelque sorte de la RSE sans le savoir, il se sentait impliqué, engagé humainement dans son entreprise et  par ses salariés. Aujourd’hui, avec un code du travail, de plus en plus lourd, la normalisation excessive a cadenassé la spontanéité des chefs d’entreprise. La France a peut être gagné les 35h mais elle a perdu en dynamisme, en bien être et en croissance. A-t-on gagné au change ? Nous avons changé de monde, les patrons aussi en même temps que leurs salariés... Il faut s'adapter et ETHIC est un mouvement très réactif qui s'adapte au jour le jour, comme ses membres.

Comment Ethic accompagne-t-il les entreprises ?

ETHIC est à la fois un "SOS adhérent" un porte parole, un lobbyiste, un défenseur des droits, une antenne de réflexion... L’instantanéité médiatique, les nouvelles technologies, la mondialisation des échanges... tout ce contexte fait que le temps de l’entreprise n’est pas celui de l’Etat (le processus législatif pour faire passer une loi prend plusieurs mois) et contrairement aux syndicats patronaux qui mènent des négociations sans fin, ETHIC bénéficie d’une souplesse et d’une réactivité qui lui permettent d’interagir plus rapidement et facilement aux enjeux qui se posent pour les entrepreneurs.

Quel rôle a joué ETHIC pour faire évoluer la perception du monde de l’entreprise ?

Notre mouvement a beaucoup gagné en notoriété et en influence parce que nous avons eu des intuitions qui se sont révélées justes, nous réagissons en temps réel et avec bon sens. Lorsque j’ai lancé l’opération « J’aime ma boîte » il y a treize ans, j’y ai associé le mouvement ETHIC. À l’époque, l'idée était étrange. "Les entreprises ne sont pas faites pour être aimées" m’avait rétorqué Ernest-Antoine Seillière, l’ex-président du MEDEF. Contrairement à cette idée reçue et au discours médiatique qui se repaît de salariés exploités et en « burn out », plus de 75 % d'entre eux aiment leur entreprise... Et depuis 13 ans que le baromètre existe ! ETHIC a contribué à faire changer la perception de l’entreprise et cette transformation est absolument fondamentale pour bâtir une économie de confiance, solide. Il reste encore beaucoup à faire de ce côté là. Il faut non seulement que les entrepreneurs puissent avoir confiance, mais aussi et surtout que les politiques leurs fassent confiance. Qu'on libère l'entreprise, qu'on cesse de l'espionner, de l'encadrer et de la contraindre inutilement. Trop vouloir "protéger" fragilise. 

La RSE n’est-elle pas secondaire aujourd'hui par rapport à l’enjeu de la relance de la productivité des entreprises, dont les gains permettent d’investir et d’innover ? 

La RSE est le nerf de la guerre économique c’est même un facteur de rentabilité et de productivité. La réussite d’une société dépend également du bien-être de ses employés, du bonheur de ses fournisseurs, de ses partenaires...  Il est indispensable de créer de bonnes conditions de travail afin de permettre la satisfaction individuelle de chaque salarié qui doit à la fin de sa journée se sentir fier de ce qu’il a fait. Le travail doit être suffisamment qualitatif quel qu'il soit, pour alimenter l’estime de soi et l’estime des autres. Plus un employé est valorisé, plus il se sent impliqué dans son travail et a envie de mieux faire. Une entreprise ne progresse que si ses salariés progressent et pas uniquement en terme de technicité. La RSE concerne aussi l’écologie et les entreprises par leurs activités contribuent aux émissions de Co2 , aussi doivent elles être des acteurs de la lutte contre le réchauffement climatique. Au moment de la COP21, nous avons lancé la "charte du geste écolo dans son entreprise". Chaque salarié peut ainsi se comporter en citoyen responsable de l’environnement, comme il le fait chez lui : trier ses déchets, proposer des ampoules à basse consommation, etc. En terme de RSE, il ne faut pas laisser les politiques s'approprier et réglementer les avancées, cesser d'imposer des dictats qui nuisent à l'initiative et au développement. Les entreprises libérées de carcans juridiques sont capables de faire mieux que la loi !

Quel avenir pour ETHIC en 2016 ? Quels sont les combats qui restent encore à mener ?

L'avenir d'ETHIC sera dicté par l'environnement réglementaire, économique et social qui est un combat permanent. Il faut libérer l'entreprise, faire de la pédagogie au quotidien, prendre la parole dans les médias pour nos membres qui n'osent pas ... Il faut militer pour un équilibre toujours précaire en matière de rémunérations . Revaloriser le travail, redonner de la puissance à la liberté individuelle ... Mon rêve : que plus jamais personne dans une entreprise ne se sente pas responsable ! Enfin, notre grand chantier est de convaincre les Français de la nécessaire réforme de l'Etat à travers les valeurs de liberté, équité et responsabilité

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