Afrique, Chine et maintenant Inde, la diplomatie russe multiplie les alliances… de circonstances <!-- --> | Atlantico.fr
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Le président russe Vladimir Poutine a rencontré le Premier ministre indien Narendra Modi au Kremlin, le décembre.
Le président russe Vladimir Poutine a rencontré le Premier ministre indien Narendra Modi au Kremlin, le décembre.
©Capture d'écran

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Face aux sanctions internationales depuis l'annexion de la Crimée et dans le contexte du conflit syrien, la Russie développe une stratégie d'alliances de revers. C'est dans ce cadre qu'a eu lieu la dernière visite du Premier ministre indien à Moscou, lui-même à la recherche de partenaires alternatifs.

Cyrille Bret

Cyrille Bret

Cyrille Bret enseigne à Sciences Po Paris.

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Atlantico : Le Premier ministre indien a effectué dernièrement une visite en Russie. Quel bilan faire de cette visite ?

Cyrille Bret : L'objet de cette visite est d'essayer de relancer le partenariat stratégique privilégié - qui a maintenant environ une décennie - en lui donnant un nouvel élan dans les domaines classiques de coopération entre l'Inde et la Russie, à savoir l'armement et les équipements de sécurité et de défense, le secteur nucléaire et le secteur énergétique avec les hydrocarbures.

Ces accords commerciaux traduisent-ils un rapprochement stratégique plus global et surtout pérenne entre les deux pays ? Y a-t-il des nuances à apporter à ce rapprochement ?

L'Inde s'inscrit dans plusieurs partenariats stratégiques qui sont concurrents les uns des autres, et notamment avec les Etats-Unis. Le rapprochement va être assez limité pour les deux pays car les intérêts stratégiques de ceux-ci ne sont pas aussi alignés que cela a pu l'être par le passé. A mon avis, la relance va être cantonnée à des grands contrats structurants : l'Inde a besoin de fournitures alternatives et la Russie a besoin de débouchés eux aussi alternatifs au monde occidental.

Que représente l'Inde pour un pays comme la Russie ? Un simple partenaire commercial ? Un allié potentiel ? Un vassal ?

Ce n'est aucun des trois. Dans la région, l'Inde est l'allié traditionnel face à l'axe Chine-Pakistan. Il y a une espèce de double alliance croisée. Pour faire face à la Chine, l'Inde a besoin de l'appui militaire de la Russie. Pour se protéger de l'Inde, le Pakistan a besoin du soutien de la Chine.

Dans l'état actuel, les instances de coopération entre l'Inde et la Chine sont multiples, mais assez souples.

Pour la Russie comme pour l'Inde, ce partenariat stratégique consiste simplement dans la recherche de partenaires alternatifs à ceux qui sont immédiatement au contact des deux.

Où en étaient les relations russo-indiennes jusque-là ?

Les relations russo-indiennes étaient plutôt à un point bas. Depuis des années, l'Inde et la Russie - qui sont quand même des puissances économiques importantes – ont des valeurs de commerce international qui sont relativement modestes.

L'Inde est certes le premier client en termes d'armement de la Russie. Cela représente plus de 20% des débouchés de l'armement russe. Mais par rapport au poids dans la balance commerciale, c'est assez limité. Il s'agit d'ordres de grandeur très différents du commerce avec la Chine et du commerce avec l'Union européenne.

Les perspectives ne laissent pas entrevoir un dynamisme particulièrement vigoureux. L'Inde est engagée dans une politique régionale dans laquelle la Russie n'a pas une place centrale, hormis pour les approvisionnements militaires.

Ces accords commerciaux russo-indiens arrivent après le renforcement des liens de la Russie avec la Chine et avec le continent africain. Qu'est-ce que cela dit de la stratégie russe sur la scène internationale ? On a l'impression que rien ne résiste à Vladimir Poutine...

Rien ne résiste à Vladimir Poutine sauf le cours général des hydrocarbures, sauf l'inflation, etc. La politique extérieure de Vladimir Poutine est faite de beaucoup de communication internationale - et elle est bien faite -, mais elle ne doit pas masquer les difficultés.

Le partenariat avec la Chine est un partenariat très déséquilibré : les Chinois ont obtenu en mars dernier un prix très bas pour leurs approvisionnements de gaz et ont fait porter une large partie des investissements nécessaires en gazoducs sur les pouvoirs russes. Dans sa relation avec la Chine, la Russie est donc plutôt en position de faiblesse.

En Afrique, c'est un challenger face aux anciennes puissances coloniales européennes, les Américains et les Chinois qui sont présents depuis très longtemps

Quant à l'Inde, sa relation privilégiée avec les Etats-Unis est bien plus importante que sa relation avec la Russie.

La stratégie internationale des autorités russes consiste donc actuellement à essayer de trouver des alliances de revers. Mais on ne peut pas dire qu'elles déploient des alliances extrêmement solides ni en Inde, ni ailleurs.

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