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Lancement du recrutement exceptionnel dans la police : pourquoi les forces de l’ordre ont besoin de bien plus que de bras supplémentaires
©Reuters

Peut mieux faire

La campagne de "recrutement exceptionnel" de la police nationale a été mise en place le mardi 22 décembre. Elle vise à permettre le recrutement rapide d'environ 2000 hommes pour assurer diverses missions de sécurité partout en France. Un bon début, mais qui ne suffira pas.

Alexis Théas

Alexis Théas est haut fonctionnaire. Il s'exprime ici sous un pseudonyme.

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Atlantico : Ce mardi 22 décembre, la direction générale de la police nationale a mis en place une campagne pour un recrutement exceptionnel. L'objectif est simple : recruter rapidement 2000 nouveaux gardiens de la paix. Dans quelle mesure cette création de postes est-elle nécessaire ? Quels sont, concrètement, les besoins en matière de police (hommes et compétences) aujourd'hui ?

Alexis Théas : Les problèmes de sécurité que rencontre la France ne tiennent pas spécialement au nombre de policier. Notre pays vient au troisième rang en Europe pour le nombre de policiers pour 100 000 habitants: 300, à peu près, derrière l'Espagne et l'Italie mais à peu près à égalité avec l'Allemagne et le Royaume-Uni. En soi l'augmentation du nombre de policier peut permettre d'améliorer la sécurité sur des lieu précis ou la surveillance sera renforcée, mais ce n'est pas du tout une solution globale sur la sécurité en générale. Le niveau général des effectifs est suffisant. On a besoin d'une police motivée, à la fois capable de respect vis à vis des citoyens  et de fermeté dans le maintien de l'ordre. La police n'a pas pour mission de copiner avec la population, mais de représenter l'Etat et l'autorité de la loi.

Au-delà du simple nombre d'hommes, de leur formation, la véritable nécessité n'est-elle pas ailleurs ? Jusqu'où la question de la sécurité peut-elle se poser uniquement en termes de recrutement, de matériel, etc ? Que faudrait-il faire pour améliorer la sécurité en France ?

Ce qui est essentiel, c'est que le policier soit respecté. Vous pouvez multiplier leur nombre par cent, si les policiers se font insulter et tabasser impunément dans les quartiers sensibles, ils ne serviront strictement à rien. Or, aujourd'hui, 10% des effectifs de police sont blessés en région parisienne. Les policiers sont l'objet d'agression quotidiennes dans certaines cités. Ils se plaignent de ne pas être suffisamment protégés par la justice. Il est absolument impératif que les agressions contre les policiers fassent l'objet des sanctions les plus sévères, de la première insulte au meutre. Il est essentiel de sanctuariser, sacraliser l'autorité du policier. En contrepartie, celui-ci doit être évidemment irréprochable dans son comportement en se montrant d'une parfaite impartialité dans ses interventions et irréprochable dans la manière dont il traite les citoyens. Les recrutements, le matériel ne sont pas l'essentiel, même s'ils comptent pour le moral de la police. Quant à la sécurité en général, c'est un sujet qui dépasse la seule réponse policière : en amont c'est une question qui touche à la politique de la ville, éviter les contentrations de population en difficulté sociale, à la sitution de l'emploi, le désoeuvrement favorisant à délinquance, à l'éducation des parents, à la structure familiale, au parcours scolaires. Le climat général est décisif: la réhabilitation des valeurs, de l'autorité, du respect des biens et de la personne d'autrui.  

Jusqu'où les initiatives gouvernementales correspondent à cet objectif ?

Le gouvernement se déclare attaché à la sécurité au quotidien, ce qui n'a pas toujours été le cas de la gauche française. Jadis elle fustigeait le "sentiment d'insécurité" et considérait comme réactionnaire la politique sécuritaire. Tout cela a bien changé... Cependant, le gouvernement ne donne pas le sentiment de vouloir donner l'exemple du respect de l'ordre et de l'autorité. La manière dont il a laissé se développer une zone de non droit dans le calaisis, dite la jungle, où s'accumulent les migrants en situation irrégulière, ou la façon dont il a laissé faire le blocage de l'autoroute A1 par des gens du voyage est un très mauvais exemple.  De même, les chiffres de l'insécurité, qui était rendus publics tous les mois par la précédente majorité ont disparu de la comunication gouvernementale: où en sont les cambriologes, les agressions contre les personnes, les vols à main armée , etc. Plus personne n'en sait rien. Mais ce n'est pas en cassant le thermomètre qu'on règle les problèmes.

Au vu de ces objectifs pour revoir la sécurité en France et l'améliorer, quand pourra-t-on être prêts ? D'abord en matière d'effectifs, mais aussi du point de vue du droit ?

Il me semble que l'essentiel est de donner un geste politique fort en faveur de la sécurité des Français. L'aggravation des peines n'est pas forcément la solution. Déjà, 100 000 peines ne sont jamais appliquées. Avec la contrainte pénale, une personne peut être condamnée à cinq ans de prison sans être incarcérée. Il faut mettre fin à ces phénomènes invraisemblables qui ont favorisé la hausse de la délinquance. Le principe est de mettre fin au sentiment d'impunité. Toute peine de prison doit être effectuée, même de courte durée. Il faut impérativement restaurer et étendre le principe de peines plancher, minimale, à laquelle le juge ne peut déroger que de manière exceptionnelle, en l'appliquant par exemple à toute forme de violence physique contre les personnes.

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