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Où sont les couteaux : lendemains d’élection tranquilles pour Nicolas Sarkozy ?
©Pixabay

Cap sur 2017

Beaucoup sont ceux qui avaient prédit que le lendemain des élections régionales allait être sanglant pour Nicolas Sarkozy. Il semblerait que cela ne soit pas le cas. Entre le Conseil National du parti les 13 et 14 février prochains et les primaires : les prochains enjeux sont de taille pour l'ancien président. Aussi, il prévoit le nécessaire pour assurer ses arrières.

Marika Mathieu

Marika Mathieu

Marika Mathieu est journaliste indépendante, diplômée d'un master en journalisme international à la City University de Londres. Elle est l'auteur du livre La Droite Forte : Année Zéro - Enquête sur les courants d'une droite sans chef paru le 2 mai 2013 aux éditions de La Martinière.

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Bruno Dive

Bruno Dive

Bruno Dive est journaliste politique et éditorialiste à Sud Ouest, spécialiste de la droite française et auteur de plusieurs livres politiques dont "La métamorphose de Nicolas Sarkozy" (Jacob-Duvernet) en 2012 et "Au coeur du pouvoir : l'exécutif face aux attentats" (Plon) en 2016. Il a également écrit Alain Juppé, l'homme qui revient de loin (l'Archipel).

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Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Atlantico  : Quelle est la prochaine étape pour l'ancien prédisent Nicolas Sarkozy ? Peut-il tenir d’ici là ?

Anita Hausser : La crise aurait éclaté immédiatement si le Front National avait gagné des régions dimanche. La Droite gagne sept régions , les plus peuplées, et le parti  "les Républicains" a obtenu le plus grand nombre de conseillers régionaux au niveau national.  Nicolas Sarkozy a donc pu reprendre la main au Bureau Politique en  décidant la convocation d' un Conseil National du Parti sur deux jours, les 13 et 14  février prochains. Deux jours, c'est une première pour le Parti qui expédie généralement ce type de réunion en quelques heures ; il s'agit d'une décision symbolique destinée à montrer que le débat existe au sein du Parti " les Républicains". C'est au cours de ce débat que sera officiellement arrêtée la ligne politique. D'ici là les militants auront élu leurs responsables locaux (présidents de fédérations), ce qui constitue également une innovation ; elle découle de l'application des statuts du Parti adoptés au moment du congrès constitutif du 30 mai. Et d'ici là encore, début janvier, Nicolas Sarkozy aura remanié son équipe de direction.

"Je suis le chef" a-t-il rappelé hier à ceux qui s'inquiétaient de l'éviction de Nathalie Kosciusko-Morizet, autrement dit "c'est moi qui décide". Dimanche soir, la vice-présidente de LR qui n'a jamais caché qu'elle est favorable au Front Républicain pour empêcher l'élection d'un candidat du Front National, a sciemment oublié les "éléments de langage" qui consistaient à simplement prendre acte du désistement de la Gauche, et elle a salué la "démarche courageuse" du PS dans le Nord et en PACA. 

Absent de la réunion du Bureau Politique, Alain Juppé a, depuis Bordeaux, regretté cette éviction et il a rappelé qu'il est favorable au désistement républicain. C'est dire que le débat n'est pas clos sur cette question. Il l'est d'autant moins que Jean-Pierre Raffarin a appelé "à travailler avec le gouvernement" sur les grandes questions, comme le chômage ! Autrement dit, les esprits bougent !

Et puis, il y a la question de la primaire pour la présidentielle prévue pour fin novembre 2016, que certains élus voudraient avancer afin d'éviter que les inévitables déchirements qu'elle provoquera, ne compromettent les chances du candidat ( -mais qui ?), que les électeurs choisiront.

Pour l'heure tous les candidats déclarés sont opposés à la modification du calendrier. Nicolas Sarkozy affirme que la question ne le préoccupe pas, ce qui n'est pas si sûr. C'est le comité d'organisation de la primaire présidé par le député lemairiste Thierry Solère, et chapeauté par une Haute Autorité qui a théoriquement la maitrise du calendrier et de l'organisation. Mais ses travaux avancent très lentement car les obstacles sont multiples .... On n'est pas à l'abri d'un clash !

NKM a été évincée de la direction des Républicains. Est-ce réellement une sanction alors qu'elle-même explique, depuis des mois, qu'elle partira en décembre pour lancer sa propre candidature à la primaire ? Qui, Nicolas Sarkozy, peut-il nommer pour la remplacer ? Cette nomination va devoir être soumise au vote du CN, cela limitera-t-il la marge de manœuvre de Nicolas Sarkozy ? Doit-on s'attendre à d'autres départs ?

Bruno Dive: Nicolas Sarkozy a annoncé aux journalistes qu’il désirait une direction cohérente pour porter la parole des Républicains. Depuis plusieurs mois déjà, le torchon brûlait entre NKM et l’ancien président. Outre les divergences de caractère fortes s’ajoutent celles de ligne et de stratégie.

Il s’agit d’une certaine manière d’une sanction. La direction du parti se dirige vers une composition assez homogène et sarkozyste. Nicolas Sarkozy va faire monter des personnes qui vont donner du pouvoir à sa ligne : Luc Chatel, Eric Ciotti… et d’autres qui ne lui feront pas d’ombre. Il est peu probable que les autres candidats y seront associer.

La grande question est de savoir quelle place va garder Laurent Wauquiez auréolé de sa victoire.

Marika Mathieu : Nicolas Sarkozy est en mauvaise posture. Les régionales auraient pu se finir encore plus mal pour lui mais le gain de la majorité et l'échec du FN lui assure un répit très relatif. Le couteaux sont tirés et oui, les primaires sont dans toutes les têtes. Fillon et Juppé sont déjà en campagne, à sa manière, NKM en fait autant. Maligne, elle devance son éviction de la direction (attendue de tous) et ruine au passage l'effet de d'annonce du grand et libre "débat" entre les lignes proposé par l'ancien président pour février.

Nicolas Sarkozy doit composer avec les statuts de son parti mais il est désormais en position de subir les chocs successifs de l'émancipation des uns et des autres. Son autorité est très faible. Il n'y a rien de commun dans cette situation avec la dynamique qui était la sienne en tant que chef de parti et candidat "naturel" de l'UMP entre 2004 et 2007. Il doit désormais "encaisser" les coups plutôt que de les donner.

Depuis quelques jours, il est question d'avancer la date de la primaire, pour quelle raison ? Qui cela peut-il avantager ? Ne risque-t-il pas d'y avoir un vrai problème d'organisation, notamment pour trouver des bureaux de vote qui ne soient pas les fédérations des Républicains ? La date de la primaire est incluse dans la charte d'organisation de la primaire, si on n'en tient pas compte n'y a -t-il pas un risque pour que d'autres points soient remis en cause ?

Bruno Dive : La question d’avancer la date de la primaire est une idée soumise par les sarkozystes tels que Eric Ciotti, Christian Jacob, Luc Chatel… La ficelle est un peu grosse. 

L’ancien président en tirera profit. Moins il y aura de votants, plus ces derniers seront favorables à Nicolas Sarkozy, et non à Alain Juppé. Les autres candidats pourraient en outre en profiter pour remettre en cause la charte d’organisation.

Ce qu’il se passe en ce moment relève d’une grande importance. Si cette primaire se passe mal, la possibilité d’avoir deux candidats de droite en 2017 n’est pas exclue.

Marika Mathieu : L'avancement de la primaire est un débat passager. Sans doute que l'idée de prendre de court des candidats potentiels en manque de dynamique (Fillon, Le Maire) ou de jouer sur les difficultés à organiser un scrutin de grande ampleur (pour demander un vote plus proche de la base militante qui reste - faiblement - favorable à Nicolas Sarkozy) traverse les esprits. Mais ce serait aussi prendre un risque majeur, notamment pour Nicolas Sarkozy dont les résultats en demi-teintes ne l'assurent en rien d'une victoire nette sur Alain Juppé. Reste à voir ce que donnera le fameux "débat" de février et si les couteaux frappent plus vite que prévu.

De plus, il ne faut pas oublier ni sous-estimer ce que fut le traumatisme du congrès de novembre 2012. La foire d'empoigne publique, la division sanglante, le scandale des pratiques et les soupçons de manipulations sont encore dans toutes les têtes et les élus de terrain finissent tout juste de restaurer un semblant de confiance dans l'appareil national. Toute faute ou tentative de biaiser l'organisation de ces primaires, aussi révolutionnaires soient-elles dans une culture de droite qui n'a jamais connu pareille échéance, serait très, très mal vécue. 

Ce matin, sur Itélé, Hervé Morin déclarait : « dès début janvier, nous devrons voir comment participer à l'organisation des primaires », pourquoi veut-il anticiper le congrès qui doit décider si l'UDI participera ou pas ? Congrès qui doit avoir lieu en mars. Quel intérêt ? Qui, la présence de l'UDI à la primaire, avantagerait-elle ?

Bruno Dive : La participation de l’UDI aux primaires jouerait en désavantage pour Alain Juppé. Si les centristes étaient amenés à proposer leur propre candidat, Alain Juppe perdrait une partie de son électorat centriste, sur qui il s’appuie beaucoup aujourd’hui. Nicolas Sarkozy à tout intérêt à pousser l’UDI à présenter leur propre candidat afin d’affaiblir son adversaire. 

Marika Mathieu : En l'absence de Jean-Louis Borloo, seul candidat "présidentiable" selon la formation, l'UDI est divisée sur la "forme" de son renoncement. Sa piètre performance de tête de liste dans trois régions a démontré que la liste unique avec LR n'était pas une garantie de victoire. Leur poids politique est plus faible que jamais et l’absorption pure et simple est une question de temps. Jégo soutient déjà Le Maire, Morin n'y croit plus et Lagarde - qui critique la droitisation de LR - avait fini par conditionner la présence d'un candidat centriste aux scores obtenus par le FN aux régionales. 

Parallèlement, François Bayrou pour le MoDem affiche clairement son alliance avec Alain Juppé et a déjà annoncé sa candidature pour 2017 si Nicolas Sarkozy venait à remporter les primaires. 

Le vote sur ces primaires sera peut-être déterminant de la survie de l'UDI en tant que formation politique autonome.

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