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10 000 emplois dans les transports sans augmenter les impôts : les chiffres pour comprendre pourquoi Claude Bartolone remporte la palme de la supercherie électorale
©Reuters

Mauvais comptes de Noël

Alors que Jean Paul Huchon vient de signer un accord visant à augmenter les effectifs dans les transports franciliens de 490 personnes, le candidat socialiste propose de multiplier ce chiffre par 20, et ce, sans augmenter les impôts. En effet, ce sont les taxes qui vont progresser.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Dans une interview donnée au Parisien ce mercredi 9 décembre, Claude Bartolone, candidat du Parti Socialiste à la région Ile de France dévoilait ses intentions face à la problématique du chômage :

"Je ne dis pas que la région à elle seule peut tout faire, mais elle va être un accélérateur. Et je vais créer 5 000 emplois jeunes auprès des services publics et 10 000 emplois dans les transports."

Au-delà des 5 000 emplois jeunes, la question reste ouverte sur la pertinence d’employer 10 000 personnes supplémentaires dans les transports franciliens... En effet, le 24 septembre dernier, l’actuel Président de la région Ile de France, Jean Paul Huchon, se félicitait déjà dans un communiqué de son ambitieux et nouveau plan concernant les transports de la région :

"Les améliorations portent principalement sur l’augmentation de la présence humaine sur le réseau avec 490 agents supplémentaires qui seront déployés pour renforcer l’accueil et la sécurité des voyageurs et sur une offre de service au plus près des besoins des voyageurs (ponctualité, information, sécurité, propreté…)"

Mais Jean Paul Huchon voit sans doute trop petit, parce que 490 postes, c’est quand même beaucoup moins bien que les 10.000 emplois que Claude Bartolone veut créer, soit un rapport de 1 à 20. 

Reste la question du financement de ces 10 000 emplois, et sur ce point, le candidat à l’élection régionale est très strict :

"Je le répète : pas de hausse d'impôts si je suis élu"

Soit. Mais la création de 10.000 emplois dans les transports a tout de même un prix qu’il va falloir assumer. Car en comptabilisant un coût annuel par agent de 30 à 40 000 euros, le total atteint 300 à 400 millions d’euros (en fourchette basse et en ne comptant pas les équipements nécessaires). Et ce, alors que le budget de la région Ile de France est de 4.95 milliards d’euros (dont 1.8 milliards pour les transports), il s’agit donc d’un surcoût représentant près de 7% du budget total. Mais la réponse à cette question est apparue suite à une dépêche de l’AFP parue ce 9 décembre, et qui livre le détail de l’accord entre "la gauche et les écologistes en Ile de France" :

"Dans les transports, outre la gratuité graduée pour les enfants de moins de 11 ans, l'idée principale est de créer 10.000 emplois (maintenance, sécurité, chauffeurs de bus) à financer avec une augmentation du versement transport"

Ainsi, les 10.000 emplois seront financés par une augmentation du "versement transport", qui n’est rien d’autre que :

"Le versement transport, taxe acquittée par les entreprises et les organismes publics ou privés de plus de 9 salariés, constitue la ressource principale du STIF". Le STIF étant le Syndicat des transports d’Ile de France, qui est, comme son nom l’indique, l’autorité chargée des transports en Ile de France. Le coût de l’opération ne repose donc pas sur le budget de la région, tout va bien, mais sur une taxe.

Or, cette "taxe" permet déjà une collecte annuelle de 3.6 milliards (chiffre 2014), il s’agit donc d’obtenir une augmentation d’environ 10% du montant collecté en 2014 afin de satisfaire les ambitions du candidat du parti socialiste. L’astucieux jeu sémantique de Claude Bartolone consiste donc à créer une subtile distinction entre taxes et impôts. Les impôts ne seront pas mis à contribution, ce ne sont que les taxes qui sont considérées. En l’occurrence, le versement transport (VT).

Quelle différence entre les deux ? Un impôt n’est pas affecté à un service particulier, une taxe si. Or, le versement transport concerne le financement des…transports, l’affectation est donc retenue, et le caractère de taxe semble alors approprié (Bravo !). Pourtant, le ministère de l’écologie publie sur son site une note précisant la "nature fiscale" du versement transport.

"Par décision n° 90-287 du 16 janvier 1991, le Conseil Constitutionnel a considéré que le versement transport constitue une imposition et non un prélèvement social. Dans le même sens va la décision du Tribunal des Conflits du 7 décembre 1998."

En résumé, Claude Bartolone s’engage à multiplier par 20 le nombre d’emplois déjà promis par Jean Paul Huchon dans les transports, sans savoir si cela est vraiment utile et approprié, et ce, tout en affirmant qu’il n’augmenterait pas les impôts. Enfin, pas les impôts, mais juste l’imposition.

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